« Grâce au Dr Colas-Pelletier les bombardiers américains ne frappèrent pas Rennes les 2 et 3 août 1944 » : différence entre les versions

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=== 2 août 1944,  au devant des Américains, une initiative personnelle ===
=== 2 août 1944,  au devant des Américains, une initiative personnelle ===
Après le combat de la veille qui semble avoir bloqué les Américains, on peut craindre qu'avant un assaut, la ville de Rennes subisse  de lourds bombardements aériens. Aussi, au matin du 2 août, le Dr Colas-Pelletier prend une initiative courageuse parce qu'elle est dangereuse : à 7 heures, à bicyclette, il réussit à passer la ligne ennemie et trouve, sur la route de Fougères, vers Fouillard, une vingtaine de chars américains commandés par le Captain Joseph F. Brady, de la 4e division blindée. Sa connaissance de l’anglais lui permet d’exposer avec précision la situation de la ville, ses abords, la faible importance des effectifs ennemis, les points de chute des obus, l’attente des Rennais. Du haut de son char, le capitaine correspond avec la division où l’on persiste à croire à une forte garnison allemande à Rennes : 15 000 hommes, et un bombardement de Rennes est prévu à midi en attendant l’arrivée de l’infanterie et des réserves d’essence. Il faudrait d’urgence des renseignements catégoriques.
Après le combat de la veille qui semble avoir bloqué les Américains, on peut craindre qu'avant un assaut, la ville de Rennes subisse  de lourds bombardements aériens. Aussi, au matin du 2 août, le Dr Colas-Pelletier prend une initiative courageuse parce qu'elle est dangereuse : à 7 heures, à bicyclette, il réussit à passer "les lignes ennemies" et trouve, sur la route de Fougères, vers Fouillard, une vingtaine de chars américains commandés par un New-Yorkais, le Captain Joseph F. Brady, de la 4e division blindée. Sa connaissance de l’anglais permet au docteur d’exposer avec précision la situation de la ville, ses abords, la faible importance des effectifs ennemis, les points de chute des obus, l’attente des Rennais et suggère de profiter de l'effet de surprise. Du haut de son char, le capitaine correspond avec la division où l’on persiste à croire à une forte garnison allemande à Rennes : 15 000 hommes. Un bombardement de Rennes est prévu à midi en attendant l’arrivée de l’infanterie et des réserves d’essence. Il faudrait d’urgence des renseignements catégoriques.
[[Fichier:Captain_Joseph_F._Brady.png|250px|left|thumb|Le capitaine Brady du 35e bataillon de chars, contacté le 2 août]]
[[Fichier:Captain_Joseph_F._Brady.png|250px|left|thumb|Le capitaine Brady du 35e bataillon de chars, contacté le 2 août (photo d'octobre 1944)]]
Colas-Pelletier regagne Rennes difficilement à travers champs, les Allemands ayant disposé des chevaux de frise et abattu des arbres à hauteur des Gayeulles <ref>[[ Les Gayeulles : août 1944, le champ de courses devenu hôpital militaire de campagne]]</ref> et se rend chez un de ses amis, Eugène Bourdin, adjoint au maire. Et, avec M. Hec, architecte, ils joignent au [[palais Saint-Georges]], P.c. clandestin de la Résistance,<ref> ''1er-4 août 1944 : l’étrange libération de Rennes''. Étienne Maignen. Éditions Yellow Concept. – oct. 2017</ref>  le général Le Vigan. <ref>[[Pierre Herbart]]</ref> et, dans la fumée des cigarettes anglaises qu’il a ramenées et offertes, il obtient les renseignements nécessaires. À bord d’une petite 202 Peugeot grise, il réussit avec Bourdin , le long de la voie ferrée détruite à retrouver le capitaine Brady à 10 heures qui transmet les informations officielles de la Résistance à ses supérieurs. A midi Rennes n’est pas bombardée.
Colas-Pelletier regagne Rennes difficilement à travers champs, les Allemands ayant disposé des chevaux de frise et abattu des arbres à hauteur des Gayeulles <ref>[[ Les Gayeulles : août 1944, le champ de courses devenu hôpital militaire de campagne]]</ref> et se rend chez un de ses amis, Eugène Bourdin, adjoint au maire. Et, avec M. Hec, architecte, ils joignent au [[palais Saint-Georges]], P.C. clandestin de la Résistance,<ref> ''1er-4 août 1944 : l’étrange libération de Rennes''. Étienne Maignen. Éditions Yellow Concept. – oct. 2017</ref>  le général Le Vigan. <ref>[[Pierre Herbart]]</ref> et, dans la fumée des cigarettes anglaises qu’il a ramenées et offertes, il obtient les renseignements nécessaires. À bord d’une petite Peugeot grise, il réussit avec Bourdin , le long de la voie ferrée détruite, à retrouver le capitaine Brady à 10 heures qui transmet les informations officielles de la Résistance à ses supérieurs. A midi Rennes n’est pas bombardée.
Mais le 2 août, au soir, d’importants renforts allemands ont été amenés du Mans à Rennes : 1900 hommes, un char stationne [[place Hoche]] devant la Feldkommandantur .  
Mais le 2 août, au soir, d’importants renforts allemands ont été amenés du Mans à Rennes : 1900 hommes, un char stationne [[place Hoche]] devant la Feldkommandantur .  


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Avant de prendre congé, j’apprends que l’attaque aura lieu le jour suivant. C’est au retour, sur la route d’[[Acigné]], que nous avons été arrêtés par un groupe de soldats allemands. Sous la menace des fusils, nous avons dû nous laisser fouiller brutalement, mais notre mission était terminée. »
Avant de prendre congé, j’apprends que l’attaque aura lieu le jour suivant. C’est au retour, sur la route d’[[Acigné]], que nous avons été arrêtés par un groupe de soldats allemands. Sous la menace des fusils, nous avons dû nous laisser fouiller brutalement, mais notre mission était terminée. »


Un engagement sévère aura pourtant lieu le 3 au soir à Rennes, aux Gantelles, information non donnée par le général, mesure de défiance ou de précaution.
Un engagement sévère aura pourtant lieu le 3 au soir à Rennes, aux Gantelles, information non donnée par le général au docteur.
Le 4 août après-midi, [[place de la Mairie]], dans la foule en liesse, une main tire sur la manche du colonel Rémy, c'est Marcel Colas-Pelletier. Les deux camarades d'enfance ne se quitteront plus jusqu'à la libération de Paris. <ref> ''La Délivrance. Mémoires d'un agent secret de la France libre''. Colonel Rémy - 1947</ref>
 
=== Observations ===
 
Il n'y avait pas de "lignes ennemies" à franchir le 2 août vers 6 heures du matin dans le secteur de la route de Fougères, déjà libre la veille. Au pire, le docteur pouvait voisiner avec une patrouille ennemie; tous les témoins font état d'un affolement des Allemands dans Rennes le 1er et le 2 août, jusqu'à l'arrivée en fin d'après midi de renforts importants: 1900 hommes amenés du Mans avec deux canons de 20mm  et des lance-roquettes antichar.
Le deuxième déplacement à bord d'une 202 Peugeot était beaucoup plus risqué, de même que celui du 3 août.


Le 4 août après-midi, [[place de la Mairie]], dans la foule en liesse, une main tire sur la manche du colonel Rémy, c'est Marcel Colas-Pelletier. Les deux camarades d'enfance ne se quitteront plus jusqula libération de Paris. <ref> ''La Délivrance. Mémoires d'un agent secret de la France libre''. Colonel Rémy - 1947</ref>
Le capitaine Brady n'avait pas participé le 1er août au sanglant affrontement de Maison-Blanche, la compagnie D
qu'il commandait n'ayant pas été engagée.Ses chars Sherman ont été envoyés dans la nuit du 1er au 2 de Betton à ce secteur de Fouillard en vue d'un éventuel essai de pénétration, vite abandonné.
Les Américains sont méfiants: le capitaine demande l'identité mais le dialogue s'établit et il donne son origine new-yorkaise; l'état-major demande une confirmation officielle à la Résistance et des renseignements complémentaires. Le capitaine est autorisé à annoncer un bombardement à midi, justifiant ainsi l'urgence de renseignements complémentaires fiables. 
 
Le 3 après-midi, le docteur Colas-Pelletier constate l'absence des chars: la compagnie D fait partie du groupe de combat A qui, tôt le matin, est partie de Saint-Aubin d'Aubigné pour amorcer un contournement de Rennes par l'ouest. C'est en suivant la voie ferrée du T.I.V le long de la route de Fougères puis une voie reliant le dépôt de munitions de Fouillard à Betton que le Dr Colas-Pelletier a pu joindre  des éléments américains : une sentinelle, un sergent, un aumônier, puis le général Wood.
 
Les renseignements fournis lors de la rencontre  avec le général, à la ferme de la  Guinebaudière, à l'est de Maison-Blanche, a dû conforter le chef de la 4e division blindée dans sa décision d'attendre l'infanterie, sachant par le système ULTRA que, malgré les renforts arrivés à Rennes le 2 au soir, les Allemands n'ont pas l'intention de faire de Rennes une place forte où il faudrait résister coûte que coûte. Le 13e régiment d'infanterie enfin disponible, le général lancera une attaque le 3 en début de soirée au-delà de Saint-Laurent, dans le secteur des Gantelles, cause d'un affrontement sanglant non décisif. Le général, par prudence et défiance, avait tu  ce projet et s'était borner à indiquer  au docteur que l'attaque aurait lieu le lendemain 4.
 
(observations d'Etienne Maignen, auteur de ''1er - 4 août: l'étrange  libération de Rennes'')