« Champ de l'Orme (cité) - n° 26 » : différence entre les versions

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La bonne nouvelle est enfin arrivée chez nous. Elle a fait naître, outre une immense joie, un espoir très prometteur. Nous étions devenus tout à coup des châtelains en puissance. Une bonne nouvelle, ça se partage, elle a été immédiatement et largement propagée dans le camp Victor Rault parmi les copains et les copines. Difficile de tenir la langue de l’enfant qui ne rêvait que de quitter le camp pour habiter une vraie maison. L’annonce est empreinte d’une immodeste fierté. C’est une heureuse nouvelle qui nous arrive, nous ne cessons de nous en réjouir.
La bonne nouvelle est enfin arrivée chez nous. Elle a fait naître, outre une immense joie, un espoir très prometteur. Nous étions devenus tout à coup des châtelains en puissance. Une bonne nouvelle, ça se partage, elle a été immédiatement et largement propagée dans le camp Victor Rault parmi les copains et les copines. Difficile de tenir la langue de l’enfant qui ne rêvait que de quitter le camp pour habiter une vraie maison. L’annonce est empreinte d’une immodeste fierté. C’est une heureuse nouvelle qui nous arrive, nous ne cessons de nous en réjouir.
Chez nous, au cours de conversations, des détails nous parviennent par bribes, mon père nous les distille au fur et à mesure de l’avancement de ses démarches. Je comprends qu’il est question, à ce qu’il parait, d’un pavillon en dur entouré d’un jardinet. Ce n’est pas un rêve, c’est un ange qui passe. Déjà, je n’habite plus en esprit au camp Victor Rault. Je suis transporté en pensée dans notre nouveau logement, qui demeure pourtant sur l’instant et pour moi le grand inconnu. Où se situe t’il, quel aspect a t’il. Dans mon imagination il promet tant et plus, ''c’est mon château en Bretagne.''  
Chez nous, au cours de conversations, des détails nous parviennent par bribes, mon père nous les distille au fur et à mesure de l’avancement de ses démarches. Je comprends qu’il est question, à ce qu’il parait, d’un pavillon en dur entouré d’un jardinet. Ce n’est pas un rêve, c’est un ange qui passe. Déjà, je n’habite plus en esprit au camp Victor Rault. Je suis transporté en pensée dans notre nouveau logement, qui demeure pourtant sur l’instant et pour moi le grand inconnu. Où se situe t’il, quel aspect a t’il. Dans mon imagination il promet tant et plus, ''c’est mon château en Bretagne.''  
 
[[Fichier:Cit%C3%A9_de_l%27Orme.png|left|400px|thumb|La cité du Champ de l'Orme en 1950: au sud du bd Clémenceau et du camp Margueritte]]
Mon frère et moi possédons quelques restes d’armes rouillées de la guerre que nous utilisons pour nos jeux, nous les distribuons généreusement aux copains de notre équipe, sachant que nous ne pourrons les emmener dans notre future belle Maison. Jojo hérite du fusil mitrailleur.  
Mon frère et moi possédons quelques restes d’armes rouillées de la guerre que nous utilisons pour nos jeux, nous les distribuons généreusement aux copains de notre équipe, sachant que nous ne pourrons les emmener dans notre future belle Maison. Jojo hérite du fusil mitrailleur.  
Des jours passent, puis des semaines, des mois et toujours pas de déménagement en vue. En effet, le pavillon convoité est déjà occupé par un couple sans enfant, qui prend son temps pour aller habiter ailleurs.  
Des jours passent, puis des semaines, des mois et toujours pas de déménagement en vue. En effet, le pavillon convoité est déjà occupé par un couple sans enfant, qui prend son temps pour aller habiter ailleurs.  
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[[Fichier:1-DSC08320-001.JPG|200px|thumb|Modèles de meubles réservés aux sinistrés reçus de l’État.]]
[[Fichier:1-DSC08320-001.JPG|200px|thumb|Modèles de meubles réservés aux sinistrés reçus de l’État.]]
L’intérieur de la maison dispose de plusieurs pièces. Un couloir d’entrée desservant immédiatement sur sa gauche un WC ainsi que l’accès à un cellier qui possède aussi sa porte extérieure.
L’intérieur de la maison dispose de plusieurs pièces. Un couloir d’entrée desservant immédiatement sur sa gauche un WC ainsi que l’accès à un cellier qui possède aussi sa porte extérieure.
Le WC n’est pas à la Turc, il est muni d’un bon siège moderne. Cette formule nous permettra de nous pencher plus confortablement sur la lecture d’un livre ou d’un journal, sous réserve que cette lecture ne soit pas interrompue par une urgence qui frappe à la porte.
Le WC n’est pas à la turque, il est muni d’un bon siège moderne. Cette formule nous permettra de nous pencher plus confortablement sur la lecture d’un livre ou d’un journal, sous réserve que cette lecture ne soit pas interrompue par une urgence qui frappe à la porte.
Franchi le couloir, la porte refermée, c’est à gauche une petite cuisine avec son évier préfabriqué en matériaux agglomérés, un conduit de cheminée qui permettra l’installation de la cuisinière à charbon. L’accès à la première chambre à coucher qui sera celle de ma sœur Jeanine, se présente à droite et donne dans la cuisine. En continuant notre chemin tout droit devant et sans que rien ne la sépare de la cuisine, une salle de séjour qui, vide, semble grande avec sa petite cheminée. Et puis encore une autre chambre à coucher, on y accède à partir de cette salle. Elle deviendra la nôtre et celle de mon père. La maison me parait immense. Les murs, tous enduits de plâtre, sont demeurés bruts bien lisses et blancs. Il règne une odeur bizarre, un mélange de neuf, de renfermé et d’indéfinissable. Une odeur étrangère à laquelle il faudra s’habituer tout pendant que la nôtre n’aura pas pris le dessus.
Franchi le couloir, la porte refermée, c’est à gauche une petite cuisine avec son évier préfabriqué en matériaux agglomérés, un conduit de cheminée qui permettra l’installation de la cuisinière à charbon. L’accès à la première chambre à coucher, qui sera celle de ma sœur Jeanine, se présente à droite et donne dans la cuisine. En continuant notre chemin tout droit devant et sans que rien ne la sépare de la cuisine, une salle de séjour qui, vide, semble grande avec sa petite cheminée. Et puis encore une autre chambre à coucher, on y accède à partir de cette salle. Elle deviendra la nôtre et celle de mon père. La maison me parait immense. Les murs, tous enduits de plâtre, sont demeurés bruts, bien lisses et blancs. Il règne une odeur bizarre, un mélange de neuf, de renfermé et d’indéfinissable. Une odeur étrangère à laquelle il faudra s’habituer tant que la nôtre n’aura pas pris le dessus.
Les plafonds sont constitués de plaques en fibrociment. Le sol est en béton lissé, sauf le cellier en terre battue.
Les plafonds sont constitués de plaques en fibrociment. Le sol est en béton lissé, sauf le cellier en terre battue.


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[[Fichier:1-Jeanine + 1951 A.jpg|200px|thumb|Jeanine – Albert – le père – Guy – année 1951.]]
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La maison est bâtie en parpaings et porte le numéro 27. Un numéro que nous ne partageons pas il est pour nous seuls. Elle est recouverte d’un enduit clair. La couverture est constituée de taules en fibrociment. Les volets et la porte extérieure du cellier sont en bois peint en vert. Les bois extérieurs de certains pavillons sont en marron. Il n’y a pour l’instant aucune isolation thermique entre le plafond et la toiture. Elle sera installée quelques temps plus tard, en même temps que la révision des circuits électriques de toutes les maisons de la cité, suite à l’incendie de l’une d’entre elles, tout près de chez nous. Les pavillons ont été construits  pour une durée d’existence de 20 ans. Après cette échéance nous verrons  l’édification de grandes cages superposées.  
La maison est bâtie en parpaings et porte le numéro 27. Un numéro que nous ne partageons pas il est pour nous seuls. Elle est recouverte d’un enduit clair. La couverture est constituée de tôles en fibrociment. Les volets et la porte extérieure du cellier sont en bois peint en vert. Les bois extérieurs de certains pavillons sont en marron. Il n’y a pour l’instant aucune isolation thermique entre le plafond et la toiture. Elle sera installée quelques temps plus tard, en même temps que la révision des circuits électriques de toutes les maisons de la cité, suite à l’incendie de l’une d’entre elles, tout près de chez nous. Les pavillons ont été construits  pour une durée d’existence de 20 ans. Après cette échéance nous verrons  l’édification de grandes cages superposées.  
Il est bien certain que la population de Rennes, qui s’annonce en nombre, ne pourra indéfiniment s’étaler, profitant de la formule de tranquilles petits pavillons avec jardinet et occuper ainsi d’immenses étendues du paysage, il faudra se serrer. Nous mangeons pour l’instant le pain blanc de notre vie tranquille, presque rurale. Durant la période que j’ai vécu au champ de l’orme, j’ai vu disparaître au fil du temps, petit à petit, les près plantés de pommiers, les champs de blé pour faire place d’abord à des jardins ouvriers puis à l’urbanisation que nous connaissons actuellement. Nous étions à cent lieues de penser que la ville dévorerait autant d’espaces de verdure, d’étangs, de parcs et de ruisseaux.
Il est bien certain que la population de Rennes, qui s’annonce en nombre, ne pourra indéfiniment s’étaler, profitant de la formule de tranquilles petits pavillons avec jardinet et occuper ainsi d’immenses étendues du paysage, il faudra se serrer. Nous mangeons pour l’instant le pain blanc de notre vie tranquille, presque rurale. Durant la période que j’ai vécue au Champ de l’Orme, j’ai vu disparaître au fil du temps, petit à petit, les près plantés de pommiers, les champs de blé pour faire place d’abord à des jardins ouvriers puis à l’urbanisation que nous connaissons actuellement. Nous étions à cent lieues de penser que la ville dévorerait autant d’espaces de verdure, d’étangs, de parcs et de ruisseaux.




== Le ruisseau de Blosne ==
== Le ruisseau de Blosne ==


Le ruisseau de Blosne n’est pas encore le nom d’une station de métro ou d’un quartier. Pour l’instant il faut aller le chercher, là bas bien loin, au milieu des champs. Il coupe une rote où, à cet endroit on peut le franchir aisément l’été à pied sec, mais durant la période des pluies, il en est tout autrement. En hiver, on s’arrête devant l’obstacle que représente le ruisseau en crue, on contemple le gros débit d’eau qu’il déplace puis on rebrousse chemin.  
Le ruisseau de Blosne n’est pas encore le nom d’une station de métro ou d’un quartier. Pour l’instant il faut aller le chercher, là-bas bien loin, au milieu des champs. Il coupe une route où, à cet endroit on peut le franchir aisément l’été à pied sec, mais durant la période des pluies, il en est tout autrement. En hiver, on s’arrête devant l’obstacle que représente le ruisseau en crue, on contemple le gros débit d’eau qu’il déplace puis on rebrousse chemin.  
Le ruisseau de Blosne est un des buts de promenade et de jeux d’été pour la garderie de vacances de Villeneuve. Une ferme proche procure volontiers, à l’occasion, aux enfants de la garderie de l’eau fraîche tirée du puits pour accompagner le goûter.  
Le ruisseau de Blosne est un des buts de promenade et de jeux d’été pour la garderie de vacances de Villeneuve. Une ferme proche procure volontiers, à l’occasion, aux enfants de la garderie de l’eau fraîche tirée du puits pour accompagner le goûter.  


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== Le château de Bréquigny ==
== Le château de Bréquigny ==


Le château de Bréquigny nous accueille dans son immense parc avec son petit bois où nous avons tant joué au cowboys et aux indiens et sa petite mare à canards. Un après midi d’été, en garderie de vacances, notre petit groupe de risque-tout a décidé de se baigner dans cette petite mare. L’eau est boueuse tant pis, la mare est profonde et il n’y a pas pied tant pis, nous ne savons pas nager, encore tant pis. Mon frère était le principal meneur de cette petite équipe. Pour nous maintenir à la surface de l’eau rien de tel que des roseaux que nous coupons et que chacun place en grand nombre sous  son ventre. Nous traversons la mare, le pari est gagné mais nous sommes sales comme des canards  s’ébrouant dans la boue. D’autres enfants, bien propres, ont assisté comme au spectacle à nos ébats, sans y participer. Ils nous ont surnommés les boueux, nom qui nous est longtemps resté.
Le château de Bréquigny nous accueille dans son immense parc avec son petit bois où nous avons tant joué au cow-boys et aux indiens et sa petite mare à canards. Un après-midi d’été, en garderie de vacances, notre petit groupe de risque-tout a décidé de se baigner dans cette petite mare. L’eau est boueuse, tant pis, la mare est profonde et il n’y a pas pied, tant pis, nous ne savons pas nager, encore tant pis. Mon frère était le principal meneur de cette petite équipe. Pour nous maintenir à la surface de l’eau rien de tel que des roseaux que nous coupons et que chacun place en grand nombre sous  son ventre. Nous traversons la mare, le pari est gagné mais nous sommes sales comme des canards  s’ébrouant dans la boue. D’autres enfants, bien propres, ont assisté comme au spectacle à nos ébats, sans y participer. Ils nous ont surnommés les boueux, nom qui nous est longtemps resté.


Le 31 octobre 2013
Le 31 octobre 2013
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