Grâce au Dr Colas-Pelletier les bombardiers américains ne frappèrent pas Rennes les 2 et 3 août 1944

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Les 2 et 3 août 1944, après le combat du 1er août 1944 à Maison Blanche , des averses d’obus américains tombèrent sur Rennes devant laquelle stationnaient les troupes de la 4e division blindée américaine du général John S. Wood,[1] mais une grande crainte des Rennais ne se concrétisa pas : des bombardements aériens, préludes à la libération de la ville.

Marcel Colas-Pelletier, président de l'A.G.E.R., 1924

Un Vannetais rennais

Le Dr Marcel Colas-Pelletier a 45 ans en 1944 (né le 26/07/1899 - décédé le 7 juin 1953). Ce Vannetais d’origine, avait fait ses études de médecine et, en 1928, ancien interne des hôpitaux du Havre, il passe sa thèse de doctorat sur l’absence congénitale de sein. En 1929 il est à Rennes au centre des mutilés. Participant à la vie de la cité, il avait été un président dynamique de « l’A.G », l’Assemblée générale des étudiants rennais et l’Ouest-Eclair relata longuement la joyeuse fête folklorique du 24 février 1925. Il avait été aussi un fondateur du R.EC., le Rennes Étudiants Club qui devait fusionner avec le Stade rennais pour devenir le S.R.U.C., le Stade rennais étudiants club. Il exerça à Vannes en qualité de directeur du bureau d’hygiène municipal. En avril 1939, il exerce à Rennes comme « spécialiste yeux-nez-gorge-oreilles » et présida, en présence du député Pinault et du maire François Château, une réunion des anciens étudiants des facultés de Rennes, dont le journal rendit amplement compte avec photos.

Le Dr Colas-Pelletier en avril 1939, en 1er plan au centre, lors d'une réunin d'anciens étudiants de Rennes ( à droite le maire Château)

Résistant

Et ce fut la guerre et le médecin O.R.L. est mobilisé. Puis il entre dans la Résistance et il est enregistré dès le 10 août 1940, devenant agent de renseignement P1, en contact avec Gilbert Renault, alias colonel Rémy qui dirige le réseau CND-Castille (réseau Confrérie Notre-Dame).[2] À Rennes Il va jouer un rôle décisif au moment de la Libération de Rennes. Il en a rendu compte de façon détaillée [3]

2 août 1944, au devant des Américains, une initiative personnelle

Après le combat de la veille qui semble avoir bloqué les Américains, on peut craindre qu'avant un assaut, la ville de Rennes subisse de lourds bombardements aériens. Aussi, au matin du 2 août, le Dr Colas-Pelletier prend une initiative courageuse parce qu'elle est dangereuse : à 7 heures, à bicyclette, il réussit à passer la ligne ennemie et trouve, sur la route de Fougères, vers Fouillard, une vingtaine de chars américains commandés par le Captain Joseph F. Brady, de la 4e division blindée. Sa connaissance de l’anglais lui permet d’exposer avec précision la situation de la ville, ses abords, la faible importance des effectifs ennemis, les points de chute des obus, l’attente des Rennais. Du haut de son char, le capitaine correspond avec la division où l’on persiste à croire à une forte garnison allemande à Rennes : 15 000 hommes, et un bombardement de Rennes est prévu à midi en attendant l’arrivée de l’infanterie et des réserves d’essence. Il faudrait d’urgence des renseignements catégoriques.

Le capitaine Brady du 35e bataillon de chars, contacté le 2 août

Colas-Pelletier regagne Rennes difficilement à travers champs, les Allemands ayant disposé des chevaux de frise et abattu des arbres à hauteur des Gayeulles [4] et se rend chez un de ses amis, Eugène Bourdin, adjoint au maire. Et, avec M. Hec, architecte, ils joignent au palais Saint-Georges, P.c. clandestin de la Résistance,[5] le général Le Vigan. [6] et, dans la fumée des cigarettes anglaises qu’il a ramenées et offertes, il obtient les renseignements nécessaires. À bord d’une petite 202 Peugeot grise, il réussit avec Bourdin , le long de la voie ferrée détruite à retrouver le capitaine Brady à 10 heures qui transmet les informations officielles de la Résistance à ses supérieurs. A midi Rennes n’est pas bombardée. Mais le 2 août, au soir, d’importants renforts allemands ont été amenés du Mans à Rennes : 1900 hommes, un char stationne place Hoche devant la Feldkommandantur .

Fiche de Colas-Pelletier au réseau CND, contacté par "Roulier", un des noms d'emprunt de Gilbert Renault, Rémy (NB: erreur sur la date d'entrée 1940 et non 1944)

3 août, la situation exposée au général Wood

Il faut informer les Américains de la topographie de la défense allemande qui augmente. Après un nouveau contact avec le général Le Vigan et M. Hec, le docteur, pour la 3e fois, et M. Bourdin réussissent à franchir les zones dangereuses mais sur place les chars ne sont plus là. En suivant, sur quelques kilomètres à l’ouest, leurs traces marquées dans le sol, ils finissent par rencontrer une sentinelle alliée. « Un mot que m’avait remis le capitaine facilite la présentation et je suis dirigé vers un talus derrière lequel se trouve un officier qui porte une croix d’argent sur le casque, puis, auprès d’une ferme où un sergent du nom de La Rochelle, entend mes déclarations et les transmet à ses chefs ; de là, une jeep me conduit plus loin, et je me trouve bientôt transporté au milieu de camions pleins de soldats. Enfin, après avoir dépassé des batteries qui tirent des obus sans discontinue, j’arrive auprès d’un bâtiment où je prends contact avec un médecin, un dentiste américain, et un officier d’état-major quelques minutes plus tard ; ce dernier me présente au général et j’ai l’honneur d’exposer ma mission. Sur une carte topographique qu’il a dépliée devant moi, j’indique, toujours en langue anglaise, les emplacements de troupes, de mines, de canons, de tanks, de mitrailleuses, que j’avais repérés, et le général, à l’aide d’un crayon rouge, note les endroits indiqués. Je suis mis en présence d’un officier spécialisé dans le choix des obus destinés aux différents blindages des tanks allemands, et présenté à un autre officier chargé des mines. Avant de prendre congé, j’apprends que l’attaque aura lieu le jour suivant. C’est au retour, sur la route d’Acigné, que nous avons été arrêtés par un groupe de soldats allemands. Sous la menace des fusils, nous avons dû nous laisser fouiller brutalement, mais notre mission était terminée. »

Un engagement sévère aura pourtant lieu le 3 au soir à Rennes, aux Gantelles, information non donnée par le général, mesure de défiance ou de précaution.

Le 4 août après-midi, [[place de la Mairie]), dans la foule en liesse, quelqu'un frappe sur l'épaule du colonel Rémy, c'est Marcel Colas-Pelletier. Les deux camarades d'enfance ne se quitteront plus jusqu'à la libération de Paris. [7]

  1. Square Général John S. Wood
  2. Square Colonel Rémy
  3. La libération de Rennes. Témoignages recueilliis par des élèves de Chartres-de-Bretagne P 66,7 (Association pour le développement des activités du musée de Bretagne – Média Graphic – juillet 1989
  4. Les Gayeulles : août 1944, le champ de courses devenu hôpital militaire de campagne
  5. 1er-4 août 1944 : l’étrange libération de Rennes. Étienne Maignen. Éditions Yellow Concept. – oct. 2017
  6. Pierre Herbart
  7. La Délivrance. Mémoires d'un agent secret de la France libre. Colonel Rémy