La rescapée de Bruz, adoptée par Acigné

Article paru dans le bulletin municipal d'Acigné en mars 2010[1], repris avec l'autorisation de son auteur :


Le café Turpin en 1929. Au 1er rang, de gauche à droite : une voisine, Juliette Turpin (la mère du futur bébé), la grand-mère Turpin, Marie Turpin (la mère adoptive du bébé), Louise Turpin.

« Souvent l'actualité nous relate de grandes catastrophes. Malgré le désastre, la vie s'accroche et nous surprend de trouver des survivants, parfois de façon miraculeuse.

Écoutez l'histoire extraordinaire qui s'est produite il y a plus de 60 ans. Juliette Turpin, native d'Acigné, avait épousé un menuisier de Saint-Erblon. Ils s'étaient installés avenue de la gare à Bruz. Dans la nuit du 7 au 8 mai 1944, ils y dormaient à l'étage avec leurs trois enfants, dont la plus jeune, Jacqueline, 3 mois, avait été laissée dans un landau. Mais cette nuit-là, une importante formation de bombardiers anglais avait pour mission d'anéantir le dépôt de munitions allemand situé à un kilomètre au nord. Mais, tragique erreur de repérage, le bourg de Bruz reçut près de 300 tonnes de bombes et fut anéanti. La famille de Jacqueline périt asphyxiée par la poussière mêlée de chaux, phosphore et gravats. Quant au bébé, il se retrouva propulsé dans son landau à la cave. Un morceau de poutre obstrua la capote, créant une poche d'air permettant à l'enfant de respirer plus facilement bien qu’enfoui sous les débris de la maison. La petite fille se mit à pleurer. Tandis que les secours des communes environnantes affluaient à toute vitesse, un infirmier entendit ses cris et sauva l’enfant. Elle devint ainsi la plus jeune rescapée de Bruz, où l’on releva 200 morts cette nuit-là. Très rapidement Jean Berré, l’un des rares ici à posséder une voiture, la ramena à Acigné chez sa tante Marie Turpin, épouse d'Albert Lelièvre. Une solidarité s'organisa.

La petite fille, qui était très fragilisée, fut hébergée pendant deux mois au bon air à la Heudinière dans la ferme de Théodore Huet. Le docteur Le Douarec s'en occupait tous les jours pour contrôler l’état de santé de la petite et nettoyer ses voies respiratoires. Sauvée par tant de dévouement, Jacqueline fut adoptée par sa tante, qui n'avait pas d'enfants.

C’est ainsi qu’elle grandit rue de Calais dans ce qui était le café Turpin, devenu le café-restaurant Lelièvre, puis le restaurant La Bretonnière et aujourd’hui La Crêp’Rit.

Pour Jacqueline la rescapée, Acigné est une vraie patrie de cœur. »

— Alain Racineux, Acigné Autrefois
Origine : L'Acignolais • Mai 2011licence

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Notes et références

  1. L'Acignolais, bulletin municipal d'Acigné, numéro de mars 2011 [1](pdf)