« Le traité de la Mabilais, une éphémère pacification » : différence entre les versions

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En avril 1795 : '''le traité de la Mabilais''' fut une pacification éphémère, voire illusoire.
En avril 1795 : '''le traité de la Mabilais''' fut une pacification éphémère, voire illusoire.
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== Une conjoncture favorable==
== Une conjoncture favorable==


Après la terreur et la chute de Robespierre, le nouveau représentant du peuple, Boursault, arrivé à Rennes le 11 octobre 1794, prit des mesures laissant présager d'un adoucissement du régime : mise en liberté de nombreux citoyens et citoyennes, incarcération de membres du terrible comité révolutionnaire renouvelé en comité de surveillance, convocation du peuple dans le temple de l'Etre suprême pour lui soumettre ces dispositions. On entrevit donc la possibilité d'un rapprochement entre chouans et républicains, ceux-ci, forts de l'intensification de la lutte menée par Hoche en novembre, proposant l'amnistie à ceux qui mettraient bas les armes dans le mois; un chef insurgé du Morbihan, Le Deist de Botidoux écrit à Boursault, offrant d'oeuvrer pour un apaisement et est relayé par Cormatin en janvier 1795 qui signe une proclamation annonçant à ses camarades des cantons de Vitré, Laval et Fougères, la suspension des hostilités.<ref> ''Histoire de Rennes''sous la direction de Jean Meyer, Privat,éditeur. 1972 </ref> Deux députés de la Convention, Guezno et Guermeur, arrivèrent à Rennes pour activer la pacification mais le premier armistice conclut entre quelques chefs chouans et le général Hoche n'empêcha pas les chouans d'intercepter les convois destinés à Rennes et le maire Leperdit fut envoyé à la Convention pour obtenir des secours financiers et le droit de réquisition par voie militaire. Enfin trente-deux officiers chouans et royalistes, parmi lesquels Cormatin et Boishardy, se rendirent à Rennes et eurent comme résidence le château de [[la Prévalaye]], où ils menérent grand train, et près duquel campa leur escorte; Guezno et Guermeur avaient logé à l'[[hôtel de Cuillé]] divers représentants dont le conventionnel Lanjuinais. La demeure dite de [[la Mabilais]], * à l'ouest de la ville, fut choisie comme lieu de tenue des conférences. Les Rennais se rendirent en promenade voir le campement des chouans dans les avenue de la Mabilais, et d'aucuns acceptaient cocardes blanches et pièces d'or, ce qui choqua le général Hoche qui ne croyait guère au rapprochement.
Après la terreur et la chute de Robespierre, le nouveau représentant du peuple, Boursault, arrivé à Rennes le 11 octobre 1794, prit des mesures laissant présager d'un adoucissement du régime : mise en liberté de nombreux citoyens et citoyennes, incarcération de membres du terrible comité révolutionnaire renouvelé en comité de surveillance, convocation du peuple dans le temple de l’Être suprême pour lui soumettre ces dispositions. On entrevit donc la possibilité d'un rapprochement entre chouans et républicains, ceux-ci, forts de l'intensification de la lutte menée par Hoche en novembre, proposant l'amnistie à ceux qui mettraient bas les armes dans le mois; un chef insurgé du Morbihan, Le Deist de Botidoux écrit à Boursault, offrant d’œuvrer pour un apaisement et est relayé par Cormatin en janvier 1795 qui signe une proclamation annonçant à ses camarades des cantons de Vitré, Laval et Fougères, la suspension des hostilités<ref> ''Histoire de Rennes'' sous la direction de Jean Meyer, Privat, éditeur. 1972 </ref>. Deux députés de la Convention, Guezno et Guermeur, arrivèrent à Rennes pour activer la pacification mais le premier armistice conclut entre quelques chefs chouans et le général Hoche n'empêcha pas les chouans d'intercepter les convois destinés à Rennes et le maire [[Jean Leperdit|Leperdit]] fut envoyé à la Convention pour obtenir des secours financiers et le droit de réquisition par voie militaire. Enfin trente-deux officiers chouans et royalistes, parmi lesquels Cormatin et Boishardy, se rendirent à Rennes et eurent comme résidence le château de [[la Prévalaye]], où ils menèrent grand train, et près duquel campa leur escorte; Guezno et Guermeur avaient logé à l'[[hôtel de Cuillé]] divers représentants dont le conventionnel [[Jean-Denis Lanjuinais|Lanjuinais]]. Le manoir dit de [[la Mabilais]]<ref>''On peut encore voir cette demeure, à l'angle de la [[rue de la Mabilais]] et de la [[rue Malaguti]], près du [[boulevard Voltaire]]''</ref>, à l'ouest de la ville, fut choisi comme lieu de tenue des conférences. Les Rennais se rendirent en promenade voir le campement des chouans dans les avenues de la Mabilais, et d'aucuns acceptaient cocardes blanches et pièces d'or, ce qui choqua le général Hoche qui ne croyait guère au rapprochement.
 
[[Fichier:Manoir-de-la-mabilais-rennes.jpg|200px|right|thumb|Le manoir de la Mabilais, tel qu'on peut encore le voir, où fut signé le traité]]
== Un traité chaleureusement accueilli...==
== Un traité chaleureusement accueilli...==


Longs furent les entretiens, tant les positions étaient opposées. Enfin, au bout de vingt jours, le 20 avril, cinq arrêtés furent signés, concluant la pacification tant attendue : les chouans se soumettant à la République étaient à l'abri de toute poursuite, étaient prévus des secours aux habitants, tant chouans que républicains, dont les propriétés avaient été pillées ou dévastées, les insurgés rentraient dans la possession de tous leurs biens du fait de leur soumission aux lois républicaines.
Longs furent les entretiens, tant les positions étaient opposées. Enfin, au bout de vingt jours, le 20 avril, cinq arrêtés furent signés, concluant la pacification tant attendue : les chouans se soumettant à la République étaient à l'abri de toute poursuite, étaient prévus des secours aux habitants, tant chouans que républicains, dont les propriétés avaient été pillées ou dévastées, les insurgés rentraient dans la possession de tous leurs biens du fait de leur soumission aux lois républicaines.


La joie des Rennais fut grande et les visiteurs se répandirent dans les avenues de la Prévalaye en criant "Vive la République!", auxquels les chouans répondaient cependant "Vive la religion !" Le 22 avril, les chefs chouans firent leur entrée dans Rennes, mêlés aux représentants du peuple, ornés comme ceux-ci des couleurs nationales, conduits par la garnison sous les armes, au bruit des salves d'artillerie et des cris de "Vive la paix!", à l'hôtel de Cuillé où fut servi un dîner.
La joie des Rennais fut grande et les visiteurs se répandirent dans les avenues de la Prévalaye en criant "Vive la République!", auxquels les chouans répondaient cependant "Vive la religion !" Le 22 avril, les chefs chouans firent leur entrée dans Rennes, Cormatin, à cheval, précède les carrosses des représentants sur le long trajet de la Prévalaye à l'hôtel de Cuillé, mêlés aux représentants du peuple, ornés comme ceux-ci des couleurs nationales, conduits par la garnison sous les armes, au bruit des salves d'artillerie et des cris de "Vive la paix!". on crie "Vive la France !", "Vive la République!", "Vive l'Union!". Au balcon de l'hôtel de Cuillé Cormoran paraît plusieurs fois pour répondre aux acclamations et il est 17 heures, l'heure du dîner dîner.


==...qui fit long feu==
==...qui fit long feu==


Cette belle entente fit long feu. Les chouans avaient-ils coopéré pour gagner du temps, dans l'attente d'une expédition anglaise ? Le général Hoche y trouvait-il un répit pour recevoir des renforts ? Le rapprochement était-il sincère entre partis las de s'entretuer ? Toujours est-il que des petits chefs chouans, qui n'aimaient pas Cormatin continuaient des exactions et que des populations bleues persistaient à exiger l'application des lois contre les émigrés et les prêtres, d'autres - les blancs- réclamant le retour des curés réfractaires. Vingt et un jours après la réception des chouans, ceux-ci se rassemblèrent à Grand-Champ, mais le représentant en mission dans le Morbihan arrêta un courrier de Cormatin venant de Rennes, porteur de lettres annonciatrices de la rupture, dont l'une signée de Boishardy et Cormatin soulignant que les chouans morbihanais, par leurs intiatives intempestives, compromettaient un plan de reprise de l'action en des temps meilleurs. Le représentant de la Convention Grenot, qui avait invité, à Rennes, les chefs chouans à dîner, s'abstint de paraître, les laissa retourner à leur hôtel où ils furent arrêtés, sauf Boishardy qui fut pris à sa demeure de la Ville-Huchet, près de Saint-Malo. Du coup, les hostilités reprirent partout et le débarquement des insurgés à Quiberon, le 27 juin en fut le point d'orgue.<ref> ''Rennes Moderne'' par A. Marteville. t.3 p.270 à 276</ref>
Cette belle entente fit long feu. Les chouans avaient-ils coopéré pour gagner du temps, dans l'attente d'une expédition anglaise ? Le général Hoche y trouvait-il un répit pour recevoir des renforts ? Le rapprochement était-il sincère entre partis las de s'entretuer ? Toujours est-il que des petits chefs chouans, qui n'aimaient pas Cormatin continuaient des exactions et que des populations bleues persistaient à exiger l'application des lois contre les émigrés et les prêtres, d'autres - les blancs- réclamant le retour des curés réfractaires. Vingt et un jours après la réception des chouans, ceux-ci se rassemblèrent à Grand-Champ, mais le représentant en mission dans le Morbihan arrêta un courrier de Cormatin venant de Rennes, porteur de lettres annonciatrices de la rupture, dont l'une signée de Boishardy et Cormatin soulignant que les chouans morbihanais, par leurs initiatives intempestives, compromettaient un plan de reprise de l'action en des temps meilleurs. Le représentant de la Convention Grenot, qui avait invité, à Rennes, les chefs chouans à dîner, s'abstint de paraître, les laissa retourner à leur hôtel où ils furent arrêtés, sauf Boishardy qui fut pris à sa demeure de la Ville-Huchet, près de Saint-Malo. Du coup, les hostilités reprirent partout et le débarquement des insurgés à Quiberon, le 27 juin en fut le point d'orgue.<ref> ''Rennes Moderne'' par A. Marteville. t.3 p.270 à 276</ref>


==références==
==Références==
 
<references/>
* ''On peut encore voir cette demeure, rue de la Mabilais, près du boulevard Voltaire''.


<references/>
==Lien interne==
* [[Rennes d'histoire et de souvenirs]] quatrain 20

Version actuelle datée du 10 septembre 2017 à 21:34


En avril 1795 : le traité de la Mabilais fut une pacification éphémère, voire illusoire.

Une conjoncture favorable

Après la terreur et la chute de Robespierre, le nouveau représentant du peuple, Boursault, arrivé à Rennes le 11 octobre 1794, prit des mesures laissant présager d'un adoucissement du régime : mise en liberté de nombreux citoyens et citoyennes, incarcération de membres du terrible comité révolutionnaire renouvelé en comité de surveillance, convocation du peuple dans le temple de l’Être suprême pour lui soumettre ces dispositions. On entrevit donc la possibilité d'un rapprochement entre chouans et républicains, ceux-ci, forts de l'intensification de la lutte menée par Hoche en novembre, proposant l'amnistie à ceux qui mettraient bas les armes dans le mois; un chef insurgé du Morbihan, Le Deist de Botidoux écrit à Boursault, offrant d’œuvrer pour un apaisement et est relayé par Cormatin en janvier 1795 qui signe une proclamation annonçant à ses camarades des cantons de Vitré, Laval et Fougères, la suspension des hostilités[1]. Deux députés de la Convention, Guezno et Guermeur, arrivèrent à Rennes pour activer la pacification mais le premier armistice conclut entre quelques chefs chouans et le général Hoche n'empêcha pas les chouans d'intercepter les convois destinés à Rennes et le maire Leperdit fut envoyé à la Convention pour obtenir des secours financiers et le droit de réquisition par voie militaire. Enfin trente-deux officiers chouans et royalistes, parmi lesquels Cormatin et Boishardy, se rendirent à Rennes et eurent comme résidence le château de la Prévalaye, où ils menèrent grand train, et près duquel campa leur escorte; Guezno et Guermeur avaient logé à l'hôtel de Cuillé divers représentants dont le conventionnel Lanjuinais. Le manoir dit de la Mabilais[2], à l'ouest de la ville, fut choisi comme lieu de tenue des conférences. Les Rennais se rendirent en promenade voir le campement des chouans dans les avenues de la Mabilais, et d'aucuns acceptaient cocardes blanches et pièces d'or, ce qui choqua le général Hoche qui ne croyait guère au rapprochement.

Le manoir de la Mabilais, tel qu'on peut encore le voir, où fut signé le traité

Un traité chaleureusement accueilli...

Longs furent les entretiens, tant les positions étaient opposées. Enfin, au bout de vingt jours, le 20 avril, cinq arrêtés furent signés, concluant la pacification tant attendue : les chouans se soumettant à la République étaient à l'abri de toute poursuite, étaient prévus des secours aux habitants, tant chouans que républicains, dont les propriétés avaient été pillées ou dévastées, les insurgés rentraient dans la possession de tous leurs biens du fait de leur soumission aux lois républicaines.

La joie des Rennais fut grande et les visiteurs se répandirent dans les avenues de la Prévalaye en criant "Vive la République!", auxquels les chouans répondaient cependant "Vive la religion !" Le 22 avril, les chefs chouans firent leur entrée dans Rennes, Cormatin, à cheval, précède les carrosses des représentants sur le long trajet de la Prévalaye à l'hôtel de Cuillé, mêlés aux représentants du peuple, ornés comme ceux-ci des couleurs nationales, conduits par la garnison sous les armes, au bruit des salves d'artillerie et des cris de "Vive la paix!". on crie "Vive la France !", "Vive la République!", "Vive l'Union!". Au balcon de l'hôtel de Cuillé Cormoran paraît plusieurs fois pour répondre aux acclamations et il est 17 heures, l'heure du dîner dîner.

...qui fit long feu

Cette belle entente fit long feu. Les chouans avaient-ils coopéré pour gagner du temps, dans l'attente d'une expédition anglaise ? Le général Hoche y trouvait-il un répit pour recevoir des renforts ? Le rapprochement était-il sincère entre partis las de s'entretuer ? Toujours est-il que des petits chefs chouans, qui n'aimaient pas Cormatin continuaient des exactions et que des populations bleues persistaient à exiger l'application des lois contre les émigrés et les prêtres, d'autres - les blancs- réclamant le retour des curés réfractaires. Vingt et un jours après la réception des chouans, ceux-ci se rassemblèrent à Grand-Champ, mais le représentant en mission dans le Morbihan arrêta un courrier de Cormatin venant de Rennes, porteur de lettres annonciatrices de la rupture, dont l'une signée de Boishardy et Cormatin soulignant que les chouans morbihanais, par leurs initiatives intempestives, compromettaient un plan de reprise de l'action en des temps meilleurs. Le représentant de la Convention Grenot, qui avait invité, à Rennes, les chefs chouans à dîner, s'abstint de paraître, les laissa retourner à leur hôtel où ils furent arrêtés, sauf Boishardy qui fut pris à sa demeure de la Ville-Huchet, près de Saint-Malo. Du coup, les hostilités reprirent partout et le débarquement des insurgés à Quiberon, le 27 juin en fut le point d'orgue.[3]

Références

  1. Histoire de Rennes sous la direction de Jean Meyer, Privat, éditeur. 1972
  2. On peut encore voir cette demeure, à l'angle de la rue de la Mabilais et de la rue Malaguti, près du boulevard Voltaire
  3. Rennes Moderne par A. Marteville. t.3 p.270 à 276

Lien interne