« Mai-juin 1940, l'afflux des réfugiés à Rennes » : différence entre les versions

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On prit la précaution d'arrêter l'hébergement en ville avant saturation afin de laisser place aux officiers et aux requis civils gagnant la ville sur ordre. Les cheminots d'Amiens furent logés dans de grands hangars de la gare et aux professeurs fut assignée la salle des fêtes du lycée. 15 000 repas par jour furent distribués durant les 15 premiers jours et 26 000 par jour durant les trois semaines les plus chargées. Les derniers jours les trajets des trains devinrent erratiques : train de Brest avec des réfugiés normands arrivant à Rennes, train refoulé de Laval à Rennes puis repartant pour Laval, et le 15 juin des trains pour Nantes revenant à Rennes faute d'avoir pu passer les ponts.( *''' 5''' )<ref>''Les déplacements de la population vers la Bretagne en 1939-40'', par André Meynier, Annales de Bretagne, vol. 56 - 1949</ref>
On prit la précaution d'arrêter l'hébergement en ville avant saturation afin de laisser place aux officiers et aux requis civils gagnant la ville sur ordre. Les cheminots d'Amiens furent logés dans de grands hangars de la gare et aux professeurs fut assignée la salle des fêtes du lycée. 15 000 repas par jour furent distribués durant les 15 premiers jours et 26 000 par jour durant les trois semaines les plus chargées. Les derniers jours les trajets des trains devinrent erratiques : train de Brest avec des réfugiés normands arrivant à Rennes, train refoulé de Laval à Rennes puis repartant pour Laval, et le 15 juin des trains pour Nantes revenant à Rennes faute d'avoir pu passer les ponts.( *''' 5''' )<ref>''Les déplacements de la population vers la Bretagne en 1939-40'', par André Meynier, Annales de Bretagne, vol. 56 - 1949</ref>


Puis les trains de réfugiés ne dépassant plus Rennes, le préfet charge l'ingénieur en chef des Ponts et Chaussées d'organiser les transports vers d'autres départements bretons en mobilisant les autocars disponibles, les chauffeurs étant "casernés" au moulin du [[Port-Cahours]], au bas de la [[rue de Saint-Brieuc]] puis le service des transports est confié au chef de ce service à la [[brasserie Graff]]. Le préfet s'efforce par la suite de diriger le plus de réfugiés possible vers le sud-ouest. Le transport de réfugiés vers leur lieu de logement définitif fut aussi assuré par des volontaires de l'Automobile Club de l'ouest, des auxiliaires de la défense passive, des anciens combattants pourvus d'essence par la préfecture. L'Ille-et-Vilaine aurait ainsi accueilli environ 140 000 réfugiés, soit une surcharge démographique de 25%, et les réfugiés des départements du Nord et de la Seine furent de beaucoup les plus nombreux à Rennes. Le département d'Ille-et-Vilaine connaît des problèmes de ravitaillement car les trains de réfugiés arrivent de manière imprévisible. Près de la moitié d'entre eux viennent de la région parisienne, plus du quart du Nord et plus de 15 % de Belgique, des Pays-Bas et du Luxembourg. La presse subit la censure ; plusieurs articles du ''Semeur d’Ille-et-Vilaine'', mais aussi du ''Nouvelliste de Bretagne'' et de ''L’Ouest-Éclair'' sont censurés dès le 1er septembre 1939, censure fort visible puisque des articles sont partiellement blancs. <ref>''L'Ille-et-Vilaine dans la guerre 1939/1945'' ''Le traumatisme de la guerre et de l’Occupation (1939-1944)'' chap. 5 , par Jacqueline Sainclivier, éd. Horvath - 1986</ref>. Au total 26 000 réfugiés s'inscrivirent à Rennes (32 000 au regard des cartes alimentaires distribuées) mais le nombre des réfugiés de passage a pu atteindre en pointe 100 000 simultanément.( '''* 5''' ) Cet afflux de population favorise le commerce et les hôtels, mais aussi la presse qui accroît son tirage, en particulier L''’Ouest- Éclair'' passe de 480 000 exemplaires environ pour l’ensemble de la région à presque 600 000 en mars 1940.
Puis les trains de réfugiés ne dépassant plus Rennes, le préfet charge l'ingénieur en chef des Ponts et Chaussées d'organiser les transports vers d'autres départements bretons en mobilisant les autocars disponibles, les chauffeurs étant "casernés" au moulin du [[Port-Cahours]], au bas de la [[rue de Saint-Brieuc]] puis le service des transports est confié au chef de ce service à la [[brasserie Graff]]. De Rennes, chaque soir, une colonne d'autos partait, dirigée par un membre du centre d'accueil, vers quelque village du département. Mais souvent les divers centres, déjà complets, ne purent les recevoir et les engagèrent à aller plus loin. <ref> A. Meynier? op. cit. p.58</ref> Le préfet s'efforce par la suite de diriger le plus de réfugiés possible vers le sud-ouest. Le transport de réfugiés vers leur lieu de logement définitif fut aussi assuré par des volontaires de l'Automobile Club de l'ouest, des auxiliaires de la défense passive, des anciens combattants pourvus d'essence par la préfecture. L'Ille-et-Vilaine aurait ainsi accueilli environ 140 000 réfugiés, soit une surcharge démographique de 25%, et les réfugiés des départements du Nord et de la Seine furent de beaucoup les plus nombreux à Rennes. Le département d'Ille-et-Vilaine connaît des problèmes de ravitaillement car les trains de réfugiés arrivent de manière imprévisible. Près de la moitié d'entre eux viennent de la région parisienne, plus du quart du Nord et plus de 15 % de Belgique, des Pays-Bas et du Luxembourg. La presse subit la censure ; plusieurs articles du ''Semeur d’Ille-et-Vilaine'', mais aussi du ''Nouvelliste de Bretagne'' et de ''L’Ouest-Éclair'' sont censurés dès le 1er septembre 1939, censure fort visible puisque des articles sont partiellement blancs. <ref>''L'Ille-et-Vilaine dans la guerre 1939/1945'' ''Le traumatisme de la guerre et de l’Occupation (1939-1944)'' chap. 5 , par Jacqueline Sainclivier, éd. Horvath - 1986</ref>. Au total 26 000 réfugiés s'inscrivirent à Rennes (32 000 au regard des cartes alimentaires distribuées) mais le nombre des réfugiés de passage a pu atteindre en pointe 100 000 simultanément.( '''* 5''' ) Cet afflux de population favorise le commerce et les hôtels, mais aussi la presse qui accroît son tirage, en particulier L''’Ouest- Éclair'' passe de 480 000 exemplaires environ pour l’ensemble de la région à presque 600 000 en mars 1940.


===Le reflux===  
===Le reflux===  
[[Fichier:Recherche.png|250px|right|thumb|''Ouest-Eclair'' 27 juillet 1940]]
[[Fichier:Recherche.png|250px|right|thumb|''Ouest-Eclair'' 27 juillet 1940]]


Le 18 juin, au matin, '''* ( 1 )''' 4000 à 5000 réfugiés affolés furent évacués vers des communes du département à bord de T.I.V '''* ( 2 )'''. La veille des réfugiés dans un train en provenance de Lisieux avaient été tués par les bombes allemandes sur le triage ferroviaire de Rennes . Le retour des réfugiés s'amorça à partir du 8 juillet par un train Rennes-Paris accessible aux porteurs d'ordre de mission. Le 14 juillet Rennes fut envahie par des réfugiés venant du Finistère et des Côtes-du-Nord qui comptaient y trouver des trains vers le Nord, et qu'il fallut héberger aux centres d'accueil à raison de 1600 par jour. "On vit ainsi des rames de wagons naviguer sur les voies les plus inattendues avant de se stabiliser, au hasard des avaries de la locomotive ou de l'approvisionnement en charbon, attendant un passage intercepté par les destructions ou par l'avance ennemie. Des évacués normands arrivèrent ainsi à Rennes, venant de Brest où le train s'était d'abord rendu, mais un autre train allait au même moment de Rennes à Laval, d'où il était venu peu de temps avant. <ref>''L'exode de mai-juin 1940'', p. 194 Jean Vidalenc. PUF - 1957</ref> Le journal ''L'Ouest-Eclair'' ouvre une colonne à ceux qui recherchent les leurs perdus dans l'exode. Puis circulèrent des trains spéciaux gratuits de la mi-août au 18 septembre. Les artistes de la radio nationale, à Rennes depuis 11 mois, regagneront Paris le 12 septembre par train spécial. Fin juillet, les autorités d'occupation avaient créé une zone interdite incluant plusieurs départements du nord, mais à fin novembre, il ne restait à Rennes que 1100 réfugiés sur 10 000 de ces départements.'''* ( 3 )'''
Le 18 juin, au matin, '''* ( 1 )''' 4000 à 5000 réfugiés affolés furent évacués vers des communes du département à bord de T.I.V '''* ( 2 )'''. La veille des réfugiés dans un train en provenance de Lisieux avaient été tués par les bombes allemandes sur le triage ferroviaire de Rennes. Le retour des réfugiés s'amorça à partir du 8 juillet par un train Rennes-Paris accessible aux porteurs d'ordre de mission. Le 14 juillet Rennes fut envahie par des réfugiés venant du Finistère et des Côtes-du-Nord qui comptaient y trouver des trains vers le Nord, et qu'il fallut héberger aux centres d'accueil à raison de 1600 par jour. "On vit ainsi des rames de wagons naviguer sur les voies les plus inattendues avant de se stabiliser, au hasard des avaries de la locomotive ou de l'approvisionnement en charbon, attendant un passage intercepté par les destructions ou par l'avance ennemie. Des évacués normands arrivèrent ainsi à Rennes, venant de Brest où le train s'était d'abord rendu, mais un autre train allait au même moment de Rennes à Laval, d'où il était venu peu de temps avant. <ref>''L'exode de mai-juin 1940'', p. 194 Jean Vidalenc. PUF - 1957</ref> Le journal ''L'Ouest-Eclair'' ouvre une colonne à ceux qui recherchent les leurs perdus dans l'exode. Puis circulèrent des trains spéciaux gratuits de la mi-août au 18 septembre. Les artistes de la radio nationale, à Rennes depuis 11 mois, regagneront Paris le 12 septembre par train spécial. Fin juillet, les autorités d'occupation avaient créé une zone interdite incluant plusieurs départements du nord, mais à fin novembre, il ne restait à Rennes que 1100 réfugiés sur 10 000 de ces départements.'''* ( 3 )'''
[[Fichier:Plaque_comm%C3%A9morative.png|200px|right|thumb|Plaque commémorative de l'action de G. Duhamel en faveur des blessés de l'exode à l'hôpital de Pontchaillou et retirée en 1959 pour ne pas froisser les Allemands<ref> ''Lieu d'asile'', Georges Duhamel. Mercure de France - 1940</ref>]]
[[Fichier:Plaque_comm%C3%A9morative.png|200px|right|thumb|Plaque commémorative de l'action de G. Duhamel en faveur des blessés de l'exode à l'hôpital de Pontchaillou et retirée en 1959 pour ne pas froisser les Allemands<ref> ''Lieu d'asile'', Georges Duhamel. Mercure de France - 1940</ref>]]


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