18 juin 1944 : un dimanche ensoleillé et des bombes

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Le docteur Patay, le nouveau maire, relate :

« J’avais pris l’habitude, à chaque bombardement, d’envoyer le personnel dans les caves et de monter, seul, jusqu’en haut du beffroi de l’hôtel de ville pour voir où tombent les bombes et renseigner la Défense passive par l’intermédiaire de Jézéquel, posté à la fenêtre de mon cabinet. Pour repérer les quartiers plus facilement je fais, sur des feuilles volantes, le croquis de tous les points caractéristiques, en faisant le tour complet du balcon de pierre qui entoure la grosse horloge (qui me fait faire un bond la première fois qu’elle sonne si près de mes oreilles). »[1]

Voici exactement quatre ans que les Allemands sont à Rennes. Le 18 juin 1944 est un dimanche ensoleillé. Mais, dès le petit matin, une alerte réveille les Rennais, puis une seconde ceux qui n'auraient pas encore été réveillés. Des vagues d'avions bombardent la gare de triage de la plaine de Baud et la gare. On entend sans arrêt les explosions des bombes à retardement. A 10 heures, une troisième alerte suivie de bombes qui tombent dans la quartier de la rue de l'Alma, rue de Châtillon, rue de La Motte Picquet[2].

Forteresse B-26 Marauder (de Wikimedia Commons)

Ce sont des P. 47 américains du 404e squadron et du 508e squadron qui escortent des B-26. Le compte rendu du premier squadron indique avoir manqué le rendez-vous avec les bombardiers B-26 mais n'avoir pas manqué les voies ferrées de Rennes. Le rapport du second squadron fait état d'une mission assez inhabituelle : servir d'escorte à des B-26 puis bombarder en piqué la gare de triage de Rennes. Les résultats des P-47 auraient été plus précis que ceux des bombardiers lourds. La seconde mission de ce jour concerna le maquis de Saint-Marcel[3].

L'après-midi de ce jour, il y eut quatre autres alertes en trois heures et des bombes seraient tombées sur Saint-Laurent et le champ de courses occasionnant quatre décès[4]. Ces bombardements du 18 juin ne sont pas mentionnés dans les journaux du lendemain et du surlendemain alors qu'il est fait état de la journée de prières tenue ce 18 juin à Saint-Laurent pour la protection de la cité, avec messe, grand'messe suivie de vêpres à 17 h 00, en présence de Mgr Roques et suivis par une grande foule.

Le 21 juin, le maire de Rennes écrit aux artisans des environs pour leur demander de faire des cercueils de bois blanc, car les cercueils étant "réquisitionnés par l'armée d'occupation, la ville de Rennes est obligée d'enterrer ses morts (et particulièrement les victimes des bombardements, à même la terre, dans une fosse commune!)". Par lettre du 26 juin, l’entreprise Roger Amiot, de Bruz, qui a déjà "fourni" après le Bombardement de Bruz du 8 mai 1944 , propose la confection d'au moins 25 cercueils en sapin au prix unitaire de 775 F, mais ne peut donner de délai en raison des coupures d’électricité et de la réticence des voituriers qui « ne tiennent plus à aller à Rennes »[5].

Dernier appel à ceux qui ont fui (Ouest-Eclair 23.06.1944)

Témoignage Dimanche 18 juin 1944 - 21h30

"La nuit fut calme; une alerte nous avait réveillés mais comme nous n'entendions pas d'avions, nous n'avons pas bougé. Ce matin vers 9 heures, comme je commençais à déjeuner avec Yves, la sirène se fit entendre et en même temps le bruit des bombes. immédiatement je réveille les petites filles qui dorment encore et je prends Jean-Pierre et nous descendons à la cave. Pierre et Paulette' viennent nous rejoindre. Les avions passent au-dessus de nous et piquent en faisant un lugubre bruit de sirène. * [3] C'est vraiment sinistre. Pierre va aux renseignements. Il apprend qu'il ne doit pas y avoir de victimes. C'est un train de munitions qui a été bombardé dans la plaine de Baud. On entend les explosions. Les deux dernières, surtout, sont très fortes et des vitres du quartier dégringolent. […] Vers 4 heures il y a une alerte sans suites. Puis à 6 heures une autre alerte, fin de l'alerte et en même temps des bombes toutes proches éclatent, la sirène resonne un début d'alerte. Nous descendons à la cave. Le bombardement ne dure que quelques minutes. On voit une colonne de fumée du côté de Maurepas. Henri part sur la route à bicyclette, il apprend que des bombes ont été jetées aux Gaïeules. Trois alertes sonnent à quelques minutes d'intervalle mais ne donnent rien."

Armande de La Haye

Références

  1. Mémoires d’un Français moyen, par René Patay - 1974
  2. Les Heures douloureuses de Rennespar V. Ladam. éd. Les Nouvelles
  3. reports of the 404th bomber group
  4. Les Heures douloureuses de Rennes par V. Ladam. éd. Les Nouvelles
  5. Archives municipales de Rennes, 6H23