7 août 1932 : le monument d'Union de la Bretagne à la France saute

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Le monument de Boucher symbolisant l'union de la Bretagne à la France saute le 7 août 1932

La niche de l'hôtel-de-ville de Rennes perd son monument

Il est 4 h40, ce dimanche 7 août 1932 quand les Rennais sont réveillés par une très forte déflagration qui les met tous aux fenêtres. Ils sauront très vite qu'en fait il s'agit du monument de Jean Boucher, enseble symbolisant l'union de la Bretagne à la France, aux genoux du roi de France Charles VIII. Il a été détruit par une forte charge explosive. Les vitres de l'hôtel-de-ville, du théâtre et des maisons voisines ont volé en éclats. L'Ouest-Eclair, publiera quelques heures après "le crime" une édition spéciale que les Rennais "s'arrachèrent".

L'édition du lendemain, lundi, consacre les deux tiers de sa première page à cet événement et titre :

Sur la place de l'Hôtel-de-Ville à Rennes une bombe a fait sauter le monument symbolisant l'union de la Bretagne à la France

Et il précise : la statue renversée de son socle a été affreusement mutilée. Le monument de Boucher git dans un pêle-mêle indescriptible de métaux et de moellons, les personnages du groupe "face contre terre et horriblement mutilés". Une photo montre le monument avant sa destruction, une autre la foule des Rennais qui ont défilé toute la journée du dimanche place de la Mairie devant les débris. Et le journaliste d'inerroger la Sûreté sur les peines dont étaient passibles les coupables et la réponse est : la peine de mort.

La seconde page est aux trois quarts consacrée à l'événement, une photo montrant les dégâts, une autre le statuaure Jean Boucher devant ceux-ci. On y précise que l'explosif devait être composé de deux ou trois cartouches de cheddite ou de dynamite, volées à la poudrière de Laval. Les poseurs étaient expérimentés car ils ont placé le pétard à l'endroit où le métal du monument était au plus près de la pierre. on aretrouvé des débris de bronze au bas de la rue d'Estrées.

Le contexte

Dès le 8 août, le journal d'interroger : " Quels sont les auteirs de cet attentat inqualifiable coïncidant avec les fêtes commémoratives célébrées hier à Vannes ?" Cet événement intervient le jour même où à Vannes, on va célébrer avec éclat - et non avec éclats comme à Rennes - le quatrième centenaire de l'acte d'union de la Bretagne à la France, intervenu en 1532. Or le monument visé commémore ce pacte dans "la capitale administrative, morale et intellectuelle de la Bretagne", souligne le journal. On a retrouvé au pied du monument des tracts de Breiz Atao mais leurs représentants à Rennes sont introuvables et leurs portes closes. A Vannes le dimanche, Debauvais et plusieurs autonomistes ont été détenus toute la journée. Des perquisitions ont lieu au siège de Breiz Atao, rue Edith Cavell et chez François Debauvais. On ne trouve pas d'indices sur les auteurs que l'on soupçonne être dans la mouvance de l'association secrète Gwenn-ha-Du.

Et le journal d'exprimer le souhait qu'à Vannes la foule anonyme chante d'un même coeur et avec une émotion plus grande encore La Marseillaise et le Bro Goz ma Zadou. Jean Boucher interrogé estime que s'en prendre à un pauvre bronze ne peut que nuire à la cause régionaliste ou autonomiste. [1]Le journal rappelle aussi l'inauguration du monument, le 30 octobre 1911, qui s'était déroulée devant "un concours de Bretons venant de tous les coins du pays", avec un vibrant discours d' Anatole Le Braz mais la cérémonie fut troublée "par un coup de sifflet d'un excellent poète breton" appréhendé et détenu provisoirement. Camille Le Mercier d'Erm qualifiait l'oeuvre de Boucher de "monument de la honte" et, en 1911, des régionalites convaincus, tel le marquis Régis de l'Estourbeillon, chef de file de l'Union régionaliste bretonne, avaient décliné l'invitation du maire de Rennes à participer à cette inauguration.

Gwenn-ha-Du revendiquera la destruction dans un communiqué envoyé à la presse:

Les Français célèbrent aujourd'hui le quatrième centenaire de leur victoire et de l'annexion de la Bretagne. Toujours Bretons, non conquis malgré quatre siècles d'occupation française, nous avons décidé de remettre entre les mains des Bretons les destinées de leur patrie pour le plus grand bien de la patrie bretonne. Nous ouvrons la lutte pour la délivrance de notre pays en ce jour anniversaire de notre annexion par la destruction du symbole de notre asservissement qui trône au centre de notre capitale.[2]

L'attentat aurait été perpétré par Célestin Lainé seul, avec de la nitroglycérine contenue dans une boîte à lait condensé. Selon d'autres, l'auteur serait le nationaliste André Geffroy qui aurait utilisé un engin concocté par Lainé.

Le journal communiste L'Humanité prend parti en faveur des indépendantistes bretons. Edouard Herriot, président du Conseil, (qui, le 20 novembre à Ingrandes, verra couper la voie ferrée par laquelle il arrive à Nantes pour inaugurer une plaque commémorative dudit acte d'union) craint que cet attentat ne soit exploité par malveillance par certaine presse étrangère et le gouvernement demande aux quotidiens parisiens de ne pas grossir les faits, ainsi que le préfet d'Ille-et-Vilaine Bodenan qui demande aux journalistes de "réduire cette affaire à de justes proportions et de rester sur le terrain judiciaire". La destruction du monument rennais produisit au dehors une vive émotion que vint ensuite accroître ce que l'on a appelé "l'attentat d'Ingrandes".[3]


références

  1. L'Ouest-Eclair des 8 et 9 août 1932
  2. Fransez Debauvais de Breiz-Atao et les siens, par Anna Youenou t. II - 1975
  3. Histoire de Bretagne des origines à nos jours par E. Durtelle de Saint-Sauveur. t. II Rennes Plihon - 1936