« Rue Leconte de Lisle » : différence entre les versions

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En [[1837]], ses parents l'envoie chez un oncle, avoué à Dinan, qui le conduisit à Rennes où il lui avait loué une chambre au numéro 4 de la [[rue des Carmes]].  Un an après son installation à Rennes, Leconte de Lisle fut enfin reçu bachelier. Il se fit inscrire aussitôt à la [[Faculté de droit]], l'intention de son père étant qu'il entrât dans la magistrature. De l'Île Bourbon où il se morfondait, son père ne cessait de prodiguer des recommandations au jeune Charles : il ferait bien, pour se perfectionner dans l'étude du droit, de travailler chez un avoué une heure matin et soir ; il pourrait suivre aussi, à la [[Faculté des sciences]], un cours d'anatomie et de physiologie, fort utiles en médecine légale, un peu de botanique et de chimie. Et M. Leconte père indiquait à son fils, parmi les distractions éminemment propres à un jeune homme bien né, « l'étude de la flûte ou du paysage ».  
En [[1837]], ses parents l'envoie chez un oncle, avoué à Dinan et maire de la ville, qui le conduisit à Rennes en octobre où il lui avait loué une chambre au numéro 4 de la [[rue des Carmes]].  Un an après son installation à Rennes, Leconte de Lisle fut enfin reçu bachelier, avec beaucoup d'indulgence, semble-t-il. Il est inscrit aussitôt à la [[Faculté de droit]], l'intention de son père étant qu'il entrât dans la magistrature. De l'Île Bourbon, son père ne cessait de prodiguer des recommandations au jeune Charles : il ferait bien, pour se perfectionner dans l'étude du droit, de travailler chez un avoué une heure matin et soir ; il pourrait suivre aussi, à la [[Faculté des sciences]], un cours d'anatomie et de physiologie, fort utiles en médecine légale, un peu de botanique et de chimie. Et M. Leconte père indiquait à son fils, parmi les distractions éminemment propres à un jeune homme bien né, « l'étude de la flûte ou du paysage ».  


====un piètre étudiant====
====un piètre étudiant====


Leconte de Lisle  fut un piètre étudiant. La Faculté, à diverses reprises, l'admonesta. Peine perdue ! Leconte de Lisle ne fut pas plus assidu aux cours. Il est permis de croire, en revanche, qu'il fréquentait fort les cafés à la mode et les estaminets, qu'il prenait sa part des manifestations contre la préfecture, coupable de refuser à [[Frédérick-Lemaître]] l'autorisation de jouer ''Robert Macaire'', qu'il flânait, par beau temps, sous les ombrages du [[Thabor]], qu'il culottait des pipes. Il ne payait pas ses créanciers :  un sieur Binda écrivit à M. Leconte, à Dinan, pour lui réclamer le règlement d'une dette de 22 francs contractée par son neveu, soit 18 francs pour une pipe en écume garnie d'argent et 4 francs pour une paire de lunettes.
Leconte de Lisle  fut un piètre étudiant car "le droit lui faisait monter le dégoût à la gorge. <ref>''Leconte de Lisle et la Faculté des Lettres de Rennes'', par Georges Colas, Annales de Bretagne, vol. 39 - 1930</ref>. La Faculté, à diverses reprises, l'admonesta. Peine perdue ! Leconte de Lisle ne fut pas plus assidu aux cours. Il est permis de croire, en revanche, qu'il fréquentait fort les cafés à la mode et les estaminets, qu'il prenait sa part des manifestations contre la préfecture, coupable de refuser à [[Frédérick-Lemaître]] l'autorisation de jouer ''Robert Macaire'', qu'il flânait, par beau temps, sous les ombrages du [[Thabor]], qu'il culottait des pipes. Il ne payait pas ses créanciers :  un sieur Binda écrivit à M. Leconte, à Dinan, pour lui réclamer le règlement d'une dette de 22 francs contractée par son neveu, soit 18 francs pour une pipe en écume garnie d'argent et 4 francs pour une paire de lunettes. En outre son oncle estime que les opinions politiques de Charles sont d'une "exagération blâmable" et qu'il affecte "un mépris sauvage pour tout ce que l'on est convenu de respecter dans la société".  


====qui prend la plume====
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C'est que Leconte de Lisle s'était mis à « faire de la littérature ». Quelques camarades et lui avaient fondé à Rennes un petit journal satirique, intitulé ''le Foyer'', dont certains numéros s'imprimaient tout entiers en vers, y compris la signature de l'imprimeur :  
C'est que Leconte de Lisle s'était mis à « faire de la littérature ». Quelques camarades et lui avaient fondé à Rennes un petit journal satirique, intitulé ''le Foyer'', "journal de littérature, musique beaux-arts et programmes" dont certains numéros s'imprimaient tout entiers en vers, y compris la signature de l'imprimeur :  


Notre petit journal s'imprime en cette ville
Notre petit journal s'imprime en cette ville
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Chez notre typographe Alphonse [[Marteville]]. ( '''* 1''' )  
Chez notre typographe Alphonse [[Marteville]]. ( '''* 1''' )  


Leconte de Lisle collabora anonymement au ''Foyer'' et l'on aurait quelque peine à distinguer ses vers de ceux de ses collaborateurs. Au contraire, son nom s'étale en toutes lettres dans ''la Variété'', au  premier numéro de cette petite revue paru le 1er avril [[1840]]. Un professeur de la Faculté des Lettres, M. Alexandre Nicolas, avait accepté de la présenter au public et d'en exposer le programme, qui tenait en deux points : rénovation et exaltation de la société par l'art, son affranchissement par le christianisme.  
Leconte de Lisle collabora anonymement au ''Foyer'' et l'on aurait quelque peine à distinguer ses vers de ceux de ses collaborateurs. Dans le n° 8, Rennes est moquée sous le nom de ''Castel-Gorin''  et on y critique son conseil municipal, ses gouttières et ses pavés pointus, mais dans le même numéro un article intitulé ''Rennes'' vante ses magasins "de fraîches nouveautés", de jouets, et ses librairies. En outre, Leconte de Lisle profite intensément des brillants concerts, opéras célèbres et comédies donnés dans la ville. <ref> ''Bretons de Lettres'', par Louis Tiercelin, Annales de Bretagne - 1905</ref>  Au contraire, son nom s'étale en toutes lettres dans ''la Variété'', au  premier numéro de cette petite revue paru le 1er avril [[1840]]. Un professeur de la Faculté des Lettres, M. Alexandre Nicolas, avait accepté de la présenter au public et d'en exposer le programme, qui tenait en deux points : rénovation et exaltation de la société par l'art, son affranchissement par le christianisme.  


L'état d'âme de Leconte de Lisle en 1840 reproduisait fidèlement celui des romantiques de l'époque, nourris de Saint-Simon, de Fourrier, de Lamennais. Le journal dura douze numéros. Le 11 mars [[1841]], qui fut le mois où ''la Variété'' cessa de paraître, Leconte de Lisle fut de nouveau cité devant la Faculté de droit pour y recevoir un blâme. Autre blâme le 23 juillet, suivi de la perte de son inscription. Les parents du jeune homme finirent par se fâcher. On menaça de lui couper les vivres. Tout à ses velléités littéraires, il répondit en s'associant à un certain Paul  
L'état d'âme de Leconte de Lisle en 1840 reproduisait fidèlement celui des romantiques de l'époque, nourris de Saint-Simon, de Fourrier, de Lamennais. Le journal dura douze numéros. Le 11 mars [[1841]], qui fut le mois où ''la Variété'' cessa de paraître, Leconte de Lisle, bachelier en droit depuis janvier, fut de nouveau cité devant la Faculté de droit pour y recevoir un blâme vu ses nombreuses absences. Autre blâme le 23 juillet, suivi de la perte de son inscription. Les parents du jeune homme finirent par se fâcher. On menaça de lui couper les vivres. Tout à ses velléités littéraires, il répondit en s'associant à un certain Paul Duclos, pour fonder ''le Scorpion'', gazette au titre prometteur. Le premier numéro était prêt quand l'imprimeur, effrayé de l'audace des articles, se déroba. Leconte de Lisle et Paul Duclos l'assignèrent devant le Tribunal civil de Rennes, qui donna gain de cause à l'imprimeur le 9 janvier 1843. Leconte de Lisle, ses dernières ressources épuisées, ne résista plus aux instances de sa famille et, après un séjour de près de six ans à Rennes, s'embarqua à Nantes pour l'Île Bourbon au mois de septembre [[1843]].<ref>''L'Âme bretonne'', 3e série, Leconte de Lisle à Rennes, par Charles Le Goffic</ref>
Duclos, pour fonder ''le Scorpion'', gazette au titre prometteur. Le premier numéro était prêt quand l'imprimeur, effrayé de l'audace des articles, se déroba. Leconte de Lisle et Paul Duclos l'assignèrent le 28 décembre 1842 devant le Tribunal civil de Rennes, qui donna gain de cause à l'imprimeur. Leconte de Lisle, ses dernières ressources épuisées, ne résista plus aux instances de sa famille et, après cinq ans à Rennes, s'embarqua pour l'Île Bourbon au mois de septembre [[1843]].<ref>''L'Âme bretonne'', 3e série, Leconte de Lisle à Rennes, par Charles Le Goffic</ref>


( '''* 1''' ) Les jeunes journalistes s'étaient trompés : le prénom est ''Alexis''.
( '''* 1''' ) Les jeunes journalistes s'étaient trompés : le prénom est ''Alexis''.
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