« Bombardement du 17 juin 1940 : témoignages » : différence entre les versions

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[[Catégorie:Seconde Guerre mondiale]]
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Des témoignages de Rennais et d'autres personnes ayant vécu les journées des dimanche 16 et lundi 17 juin 1940 à Rennes ont apporté des précisions et des impressions personnelles sur cet événement dramatique qui fit un millier de morts.
Des témoignages de Rennais et d'autres personnes ayant vécu les journées des dimanche 16 et lundi 17 juin 1940 à Rennes ont apporté des précisions et des impressions personnelles sur cet événement dramatique qui fit un millier de morts. Les témoignages marqués de '''*''' ont été recueillis par Étienne Maignen, auteur de ''Rennes pendant la guerre, chroniques de 1939 à 1945'', aux  éditions Ouest-France - 2013.


[[Fichier:Dornier_17_Z.png|300px|right|thumb|Des bombardiers Do 17 Z, tels qu'ils ont pu apparaître dans le ciel de Rennes le 17 juin 1940]]
[[Fichier:Dornier_17_Z.png|300px|right|thumb|Des bombardiers Do 17 Z, tels qu'ils ont pu apparaître dans le ciel de Rennes le 17 juin 1940]]
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Le lendemain dans la matinée, il y eut ces détonations renouvelées sur la ville. On a su ensuite que des bombes étaient tombées sur la plaine de Baud et que plusieurs trains de soldats français et anglais avaient été démolis. La plupart des jeunes qu'on avait approchés la veille au soir n'étaient plus de ce monde."
Le lendemain dans la matinée, il y eut ces détonations renouvelées sur la ville. On a su ensuite que des bombes étaient tombées sur la plaine de Baud et que plusieurs trains de soldats français et anglais avaient été démolis. La plupart des jeunes qu'on avait approchés la veille au soir n'étaient plus de ce monde."


'''''Odette Cohignac, épouse Dartois''''', 17 ans en 1940. - recueilli à Rennes par --[[Utilisateur:Stephanus|Stephanus]] 4 août 2011 à 13:32 (CEST)
'''''Odette Cohignac, épouse Dartois''''', 17 ans en 1940. '''*''' - recueilli à Rennes par --[[Utilisateur:Stephanus|Stephanus]] 4 août 2011 à 13:32 (CEST)




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Ce n'était pas une alerte d'entraînement. On a vu, tout de suite, aussi, que ce n'était pas une simple visite. On a juste eu le temps de voir trois bombardiers qui nous ont presque rasés. On s'est mis accroupis. Nous les avons regardés. '''Ils ont suivi la Vilaine et ont pris la direction de la gare et de la ''plaine de Baud''. Quelques minutes après, on a commencé à entendre les explosions.''' C'est épouvantable le bruit que cela faisait. Il y avait des éclats de lumière et de la fumée. Bien que loin et avec mon père, j'ai eu peur... <ref> ''Ouest-France'', édition de Rennes, 3 juin 2010</ref> Les équipages des bombardiers qui volaient à moyenne vitesse nous semblaient bien renseignés et savoir ce qu'ils allaient faire. Le choc de cette horrible journée et l'arrivée des Allemands à Rennes le lendemain déclenchèrent chez moi une espèce de soif de vengeance qui sont les raisons premières de mon engagement, quelques années plus tard au Régiment de Marche du Tchad pour me battre".<ref> entretien de Joseph Jean Naviner du 14 juin 2012 avec Etienne Maignen</ref>
Ce n'était pas une alerte d'entraînement. On a vu, tout de suite, aussi, que ce n'était pas une simple visite. On a juste eu le temps de voir trois bombardiers qui nous ont presque rasés. On s'est mis accroupis. Nous les avons regardés. '''Ils ont suivi la Vilaine et ont pris la direction de la gare et de la ''plaine de Baud''. Quelques minutes après, on a commencé à entendre les explosions.''' C'est épouvantable le bruit que cela faisait. Il y avait des éclats de lumière et de la fumée. Bien que loin et avec mon père, j'ai eu peur... <ref> ''Ouest-France'', édition de Rennes, 3 juin 2010</ref> Les équipages des bombardiers qui volaient à moyenne vitesse nous semblaient bien renseignés et savoir ce qu'ils allaient faire. Le choc de cette horrible journée et l'arrivée des Allemands à Rennes le lendemain déclenchèrent chez moi une espèce de soif de vengeance qui sont les raisons premières de mon engagement, quelques années plus tard au Régiment de Marche du Tchad pour me battre". '''*''' <ref> entretien de Joseph Jean Naviner du 14 juin 2012 avec Etienne Maignen</ref>




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Les carreaux de fenêtres de la maison côté est volèrent en éclats, à l'exception de ceux d'une fenêtre ouverte sur une pièce où la cloison fut soufflée. Un morceau de wagon brûlait sur le toit et un nuage nauséabond dispersait dans le jardin un épais manteau de suie accompagné d'objets calcinés : chaussures, masques à gaz et autres, dont un carton d'un magasin de vêtements de Roubaix. Le soir, notre maison accueillit des réfugiés dont une dame et ses deux petites filles du Nord. L'enchaînement des faits laisse l'évènement très présent à ma mémoire."  
Les carreaux de fenêtres de la maison côté est volèrent en éclats, à l'exception de ceux d'une fenêtre ouverte sur une pièce où la cloison fut soufflée. Un morceau de wagon brûlait sur le toit et un nuage nauséabond dispersait dans le jardin un épais manteau de suie accompagné d'objets calcinés : chaussures, masques à gaz et autres, dont un carton d'un magasin de vêtements de Roubaix. Le soir, notre maison accueillit des réfugiés dont une dame et ses deux petites filles du Nord. L'enchaînement des faits laisse l'évènement très présent à ma mémoire."  


'''''Gilbert Guillou''''', 6 ans en juin 1940 Rennes.<ref> entretien avec tienne Maignen, avril 2012</ref>
'''''Gilbert Guillou''''', 6 ans en juin 1940 Rennes. '''*''' <ref> entretien avec tienne Maignen, avril 2012</ref>


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"Il faisait très beau ce matin-là. Nous habitions 6 rue de Châteaugiron, près de la Croix Saint-Hélier où nous abritions un couple de réfugiés du Nord. Je vais en face dans une maison où mon frère de  7 ans était chez un camarade lorsqu'une première énorme déflagration se produit. je m'xtrais à quatre pates de dessous une cloison abattue par le souffle et vois la cave car il n'y a plus de plancher. Les trois machines à coudre de l'atelier de coûture sont pulvérisées et il y a du verre partout. Un petit garçon a un œil crevé.. Je rejoins ma mère qui prie tandis que d'autres lui disent :" S'il y avait on bon Dieu, il ne permettrait pas des choses pareilles." dehors volent des ferrailles, des bouts de toitures, des flammèches et un long morceau de rail est tombé rue de vern. De l'avenue du cimetière de l'Est arrivent nombreux des blessés, enfants, viellards, des gens tout nus."
'''''Mme Forner, née Jaqueline Clessin''''',  10 ans en juin 1940  '''*'''


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"J'habitais impasse Joseph Durocher<ref>[[rue Joseph Durocher]]</ref> et je m'apprêtais à faire mon petit tour sur le chemin de halage derrière le vélodrome. Du haut de l'escalier, une violente déflagration m'a projeté en bas. Je suis sorti et j'ai vu alors un avion qui me semblait très bas, à hauteur des toits, à croire qu'il allait les toucher, passant au-dessus de l'impasse sur toute sa longueur. Il avait des croix noires sous les ailes."
"J'habitais impasse Joseph Durocher<ref>[[rue Joseph Durocher]]</ref> et je m'apprêtais à faire mon petit tour sur le chemin de halage derrière le vélodrome. Du haut de l'escalier, une violente déflagration m'a projeté en bas. Je suis sorti et j'ai vu alors un avion qui me semblait très bas, à hauteur des toits, à croire qu'il allait les toucher, passant au-dessus de l'impasse sur toute sa longueur. Il avait des croix noires sous les ailes."


'''''Julien Loton''''', 18 ans en 1940, <ref> entretien de Julien Noton avec Étienne Maignen le 21 juin 2012</ref>
'''''Julien Loton''''', 18 ans en 1940, '''*''' <ref> entretien de Julien Noton avec Étienne Maignen le 21 juin 2012</ref>




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" Sur le chemin de l'école - j'étais collégien à l'école technique d'industrie de
" Sur le chemin de l'école - j'étais collégien à l'école technique d'industrie de
Rennes - j'étais sur la passerelle de la gare. J'avais une paire de jumelles à 2 sous que mon père m'avait offerte et je disais à un ami « '''Si les boches reviennent''', je pourrais les voir arriver ». Tout à coup j'ai entendu une énorme explosion, et je vois 3 avions arriver en rase mottes et faire un bond pour passer la passerelle. Ils étaient trop bas pour être touchés". Il apparaît donc que quand le jeune Guy les aperçoit, les appareils ont déjà lâché leurs bombes sur la gare de triage de la plaine de Baud". M. [[Guy Faisant]] confirme qu'il n'y avait bien que 3 avions et n'a pas entendu ou vu un passage préalable d'avions d'ouest en est. Quant à l'identification des avions, il avait cité dans un témoignage <ref> ''Ouest-France'', édition de Rennes, du 1er juin 2010</ref> qu'il s'agissait de stukas mais il ne peut en être sûr en raison de la rapidité du passage bas des avions qui leur a fait baisser la tête <ref> rencontre du 4 mai 2012 avec E. Maignen</ref>.
Rennes - j'étais sur la passerelle de la gare. J'avais une paire de jumelles à 2 sous que mon père m'avait offerte et je disais à un ami « '''Si les boches reviennent''', je pourrais les voir arriver ». Tout à coup j'ai entendu une énorme explosion, et je vois 3 avions arriver en rase mottes et faire un bond pour passer la passerelle. Ils étaient trop bas pour être touchés". Il apparaît donc que quand le jeune Guy les aperçoit, les appareils ont déjà lâché leurs bombes sur la gare de triage de la plaine de Baud". M. [[Guy Faisant]] confirme qu'il n'y avait bien que 3 avions et n'a pas entendu ou vu un passage préalable d'avions d'ouest en est. Quant à l'identification des avions, il avait cité dans un témoignage <ref> ''Ouest-France'', édition de Rennes, du 1er juin 2010</ref> qu'il s'agissait de stukas mais il ne peut en être sûr en raison de la rapidité du passage bas des avions qui leur a fait baisser la tête.  '''*''' <ref> rencontre du 4 mai 2012 avec E. Maignen</ref>.


'''''Guy Faisant''''', 15 ans en juin 1940  
'''''Guy Faisant''''', 15 ans en juin 1940  
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"Nous étions sur un quai non couvert de la gare, descendus d'un train provenant de Paris, ma mère avec ma petite sœur de 6 mois, mon frère Claude et moi tenant la main de ma mère lorsque j'ai vu '''cinq avions''' arrivant sur nous, quatre au ras du pont, '''*''' un autre passant dessous ! et ils mitraillèrent les quais de la gare. La glace de la librairie de quai descendit en morceaux tandis que des soldats sautaient du train de blessés stationné à côté. Nous nous sommes engouffrés par l'escalier d'un souterrain parmi la foule affolée. En bas, ma mère hurla "Claude ! Claude !", ce qui occasionna un grand silence et nous entendîmes heureusement mon frère qui était descendu par une autre entrée crier : "Maman, je suis là !". Après, nous sommes partis dans une camionnette et on a entendu de nouveaux bombardements au loin sur Rennes; nous sommes descendus jusqu'à Confolens et un paysan voulut faire payer l'eau, faute de lait, pour abreuver le bébé."
"Nous étions sur un quai non couvert de la gare, descendus d'un train provenant de Paris, ma mère avec ma petite sœur de 6 mois, mon frère Claude et moi tenant la main de ma mère lorsque j'ai vu '''cinq avions''' arrivant sur nous, quatre au ras du pont, '''*''' un autre passant dessous ! et ils mitraillèrent les quais de la gare. La glace de la librairie de quai descendit en morceaux tandis que des soldats sautaient du train de blessés stationné à côté. Nous nous sommes engouffrés par l'escalier d'un souterrain parmi la foule affolée. En bas, ma mère hurla "Claude ! Claude !", ce qui occasionna un grand silence et nous entendîmes heureusement mon frère qui était descendu par une autre entrée crier : "Maman, je suis là !". Après, nous sommes partis dans une camionnette et on a entendu de nouveaux bombardements au loin sur Rennes; nous sommes descendus jusqu'à Confolens et un paysan voulut faire payer l'eau, faute de lait, pour abreuver le bébé."


'''''François Choel''''', 7 ans en juin 1940 <ref>témoignage oral recueilli par Etienne Maignen le 11 février 2013</ref>
'''''François Choel''''', 7 ans en juin 1940 '''*''' <ref>témoignage oral recueilli par Etienne Maignen le 11 février 2013</ref>


NB :  '''*'''  L'étonnante  illusion visuelle d'un passage d'un avion au-dessous du pont Saint-Hélier peut résulter du vol des avions en saute-mouton attesté par ailleurs. Les "nouveaux bombardements" sont les explosions de wagons qui se sont produites pendant des heures.
NB :  '''*'''  L'étonnante  illusion visuelle d'un passage d'un avion au-dessous du pont Saint-Hélier peut résulter du vol des avions en saute-mouton attesté par ailleurs. Les "nouveaux bombardements" sont les explosions de wagons qui se sont produites pendant des heures.
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