« À Rennes, Du Perron de Maurin, chasseur de Juifs puis milicien » : différence entre les versions

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===Un chasseur de Juifs===
===Un chasseur de Juifs===
Le 3 décembre 1942, Jean Quénette, préfet régional de Bretagne, informe les préfets des quatre départements de sa circonscription qu’il a eu la visite d’un M. Ratton, chef des délégués régionaux à la Police des Questions Juives, dépendant du CGQJ, le commissariat général aux questions juives de Louis Darquier de Pellepoix. Il était accompagné de M. Du Perron de Maurin, 41 ans, qui fut présenté comme le délégué régional des sections d’enquête et de contrôle du commissariat général des questions juives pour la Bretagne (SEC).  
Le 3 décembre 1942, Jean Quénette, préfet régional de Bretagne, informe les préfets des quatre départements de sa circonscription qu’il a eu la visite d’un M. Ratton, chef des délégués régionaux à la Police des Questions Juives, dépendant du CGQJ, le commissariat général aux questions juives de Louis Darquier de Pellepoix. Il était accompagné de M. Du Perron de Maurin, 41 ans, qui fut présenté comme le délégué régional des sections d’enquête et de contrôle du commissariat général des questions juives pour la Bretagne (SEC).  
La Bretagne était pourtant une région où les habitants d’origine juive étaient peu nombreux : aux descendants des réfugiés alsaciens venus après la guerre de 1870, aux exilés d'Europe Centrale des années 1930, naturalisés ou pas, à des Juifs  arrivés en France vers 1936 : petits négociants, ouvriers façonniers, confectionneurs, artisans, ils venaient d’Europe centrale après avoir, parfois, séjourné plus ou moins longtemps dans la région parisienne, s'étaient ajoutés des réfugiés du nord de la France au moment de l'exode de 1940 mais les services de Darquier de Pellepoix, l’actif commissaire général, devaient être implantés partout. En Ille-et-Vilaine on n'avait recensé que 372 juifs en octobre 1940, dont 172 étrangers. EN juillrt 1941, on comptait 140 Juifs à Rennes, 98 à Dinard, ville de Du Perron de Maurin, et 60 à Saint-Malo. Même si deux grandes rafles avaient déjà eu lieu, en juillet et octobre, et avaient été assez fructueuses, avec 46 Juifs arrêtés en Ille-et-Vilaine, <ref>[[ Les Juifs de Rennes sous l'occupation]]</ref> un délégué régional du CGQJ était mis en place.
La Bretagne était pourtant une région où les habitants d’origine juive étaient peu nombreux : aux descendants des réfugiés alsaciens venus après la guerre de 1870, aux exilés d'Europe Centrale des années 1930, naturalisés ou pas, à des Juifs  arrivés en France vers 1936 : petits négociants, ouvriers façonniers, confectionneurs, artisans, ils venaient d’Europe centrale après avoir, parfois, séjourné plus ou moins longtemps dans la région parisienne, s'étaient ajoutés des réfugiés du nord de la France au moment de l'exode de 1940 mais les services de Darquier de Pellepoix, l’actif commissaire général, devaient être implantés partout. En Ille-et-Vilaine on n'avait recensé que 372 juifs en octobre 1940, dont 172 étrangers. EN juillet 1941, on comptait 140 Juifs à Rennes, 98 à Dinard, ville de Du Perron de Maurin, et 60 à Saint-Malo. Même si deux grandes rafles avaient déjà eu lieu, en juillet et octobre, et avaient été assez fructueuses, avec 46 Juifs arrêtés en Ille-et-Vilaine, <ref>[[ Les Juifs de Rennes sous l'occupation]]</ref> un délégué régional du CGQJ était mis en place.
L’antenne régionale du commissariat général aux questions juives fut installée au 7 [[ rue de Nemours]], à Rennes, dans l’appartement anciennement cabinet dentaire de M. Jean Schklarewski, juif déporté six mois auparavant. Le 28 juin 1943, le délégué régional fait un rapport sur les parents et leurs deux enfants juifs arrêtés à Saint-Brieuc qu'il fera déporter à Drancy. <ref> ADCA, dossier 5 W 194</ref>  
L’antenne régionale du commissariat général aux questions juives fut installée au 7 [[ rue de Nemours]], à Rennes, dans l’appartement anciennement cabinet dentaire de M. Jean Schklarewski, juif déporté six mois auparavant. Le 28 juin 1943, le délégué régional fait un rapport sur les parents et leurs deux enfants juifs arrêtés à Saint-Brieuc qu'il fera déporter à Drancy. <ref> ADCA, dossier 5 W 194</ref>  


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En fait, cette administration parallèle du commissariat aux questions juives ternissait l’image du service public.  
En fait, cette administration parallèle du commissariat aux questions juives ternissait l’image du service public.  
Contrôlé par un agent de la section IV du SD, un sergent, le sergent Josef Ernser,  Du Perron de Maurin s’avéra un déterminé chasseur des Juifs qu’il considérait comme un gibier "de race étrangère" à traquer, à débusquer et dont il y avait lieu de se débarrasser en le livrant aux Nazis du SD. Un rapport de la 13e brigade régionale de la police judiciaire de Rennes, du 30 mars 1945, indique qu'il dépassait même les limites du droit, dans la recherche et l’arrestation des personnes prétendues juives. Il regardait parfois la verge de certains hommes non porteurs de l'étoile jaune qu’il soupçonnait d’être juifs pour voir s'ils étaient circoncis. Après la réception de deux lettres de menace au nom de "l’Organisation Secrète de la Résistance en France" et une tentative d’attentat par envoi d’un colis piégé à son bureau, [[rue de Nemours]], il demanda une  protection, le 6 octobre 1942, au Kommandeur de la police de sûreté du SD et un agent de police  fut détaché à la garde de ses bureaux.
Contrôlé par un agent de la section IV du SD, le sergent Josef Ernser,  Du Perron de Maurin s’avéra un déterminé chasseur des Juifs qu’il considérait comme un gibier "de race étrangère" à traquer, à débusquer et dont il y avait lieu de se débarrasser en le livrant aux Nazis du SD. Un rapport de la 13e brigade régionale de la police judiciaire de Rennes, du 30 mars 1945, indique qu'il dépassait même les limites du droit, dans la recherche et l’arrestation des personnes prétendues juives. Il regardait parfois la verge de certains hommes non porteurs de l'étoile jaune qu’il soupçonnait d’être juifs pour voir s'ils étaient circoncis. Après la réception de deux lettres de menace au nom de "l’Organisation Secrète de la Résistance en France" et une tentative d’attentat par envoi d’un colis piégé à son bureau, [[rue de Nemours]], il demanda une  protection, le 6 octobre 1942, au Kommandeur de la police de sûreté du SD et un agent de police  fut détaché à la garde de ses bureaux.
Le 27 février 1943, faisant le bilan des activités de son service au cours des deux premiers mois de l’année  le délégué régional se vante de l'arrestation, le 19 février à Saint-Malo, du  couple Ash : Alphonse , Français,53 ans, et Marthe, son épouse, 51 ans, mis au convoi n° 53, le 25 mars, à destination de Sobibor. Il est aussi responsable du départ de la famille Bloch, de Rennes par le convoi n° 57, 18 juillet 1943 . <ref>''Les Juifs en Bretagne''.  Claude Toczé,  Annie Lambert. Presses universitaires de Rennes </ref>
Le 27 février 1943, faisant le bilan des activités de son service au cours des deux premiers mois de l’année  le délégué régional se vante de l'arrestation, le 19 février à Saint-Malo, du  couple Ash : Alphonse , Français,53 ans, et Marthe, son épouse, 51 ans, mis au convoi n° 53, le 25 mars, à destination de Sobibor. Il est aussi responsable du départ de la famille Bloch, de Rennes par le convoi n° 57, 18 juillet 1943 . <ref>''Les Juifs en Bretagne''.  Claude Toczé,  Annie Lambert. Presses universitaires de Rennes </ref>


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En juin 1943, il créa le ''Cercle d’études national-socialiste'' (CENS) auquel adhérèrent Guy Vissault<ref>[[Un Rennais, agent actif de la Gestapo, Guy Vissault]]</ref> et Émile Schwaller,<ref>[[Émile Schwaller, à la LVF puis milicien criminel]]</ref> estimant que « Nous ne pouvons espérer notre relèvement que par une politique raciste et eugénique. L'apport de sang étranger ne peut qu'amener la disparition de notre culture. [...] La personne humaine ne pourra être protégée que dans une nation raciste. » Le cercle, avec bureau 8 [[quai Emile Zola]], ne recueillera que 52 adhérents fichés, dont la moitié à Dinard, la ville de Du Perron de Maurin.
En juin 1943, il créa le ''Cercle d’études national-socialiste'' (CENS) auquel adhérèrent Guy Vissault<ref>[[Un Rennais, agent actif de la Gestapo, Guy Vissault]]</ref> et Émile Schwaller,<ref>[[Émile Schwaller, à la LVF puis milicien criminel]]</ref> estimant que « Nous ne pouvons espérer notre relèvement que par une politique raciste et eugénique. L'apport de sang étranger ne peut qu'amener la disparition de notre culture. [...] La personne humaine ne pourra être protégée que dans une nation raciste. » Le cercle, avec bureau 8 [[quai Emile Zola]], ne recueillera que 52 adhérents fichés, dont la moitié à Dinard, la ville de Du Perron de Maurin.
Ce sont des membres du CENS qui aassassineront des Rennais, dans la nuit du 30 juin 1944, en représailles de l'assassinat de Philippe Henriot. <ref>[[Nuit du 30 juin 1944, des miliciens pour assassiner des Rennais]]</ref>
 
Le préfet régional Martin annonce dans l'''Ouest-Eclair'' l'arrivée de la Milice à Rennes et dit grand bien de cette formation mais n'a pas pu faire abstraction de l'évidente prévention populaire à son égard.
Le préfet régional Martin annonce dans l'''Ouest-Eclair'' l'arrivée de la Milice à Rennes et dit grand bien de cette formation mais n'a pas pu faire abstraction de l'évidente prévention populaire à son égard.
En effet, en avril 1944, Du Perron de Maurin démissionna du commissariat aux questions juives, pour lancer la Milice en Bretagne et en devenir le chef régional à Rennes, avec dans son collimateur les mouvements de résistance, les Juifs ayant disparu. Au [[camp Margueritte]], Mme Le Pannerier de Roissay, internée administrative côtoiera  "  Mlle Sonia Oulberg ( Ulberg), secrétaire du marquis du Perron, chef de la Milice, reconnaissant avoir été beaucoup utilisée par les Allemands mais se défendant d’avoir fait de l’espionnage". <ref>[[Après la libération, les internées administratives au camp Margueritte]]</ref> Le bureau de recrutement était situé au 11 [[rue Le Bastard]] et, à lire une liste retrouvée à la Libération, 120 personnes en ressortirent membres pour le département, dont une cinquantaine habitant Rennes. Les bras armés de la Milice furent alors Schwaller puis Di Costanzo, chef d’une franc-garde de 200 hommes. <ref>[[La Milice à Rennes]]</ref>
En effet, en avril 1944, Du Perron de Maurin démissionna du commissariat aux questions juives, pour lancer la Milice en Bretagne et en devenir le chef régional à Rennes, avec dans son collimateur les mouvements de résistance, les Juifs ayant disparu. Au [[camp Margueritte]], Mme Le Pannerier de Roissay, internée administrative côtoiera  "  Mlle Sonia Oulberg ( Ulberg), secrétaire du marquis du Perron, chef de la Milice, reconnaissant avoir été beaucoup utilisée par les Allemands mais se défendant d’avoir fait de l’espionnage". <ref>[[Après la libération, les internées administratives au camp Margueritte]]</ref> Le bureau de recrutement était situé au 11 [[rue Le Bastard]] et, à lire une liste retrouvée à la Libération, 120 personnes en ressortirent membres pour le département, dont une cinquantaine habitant Rennes. Les bras armés de la Milice furent alors Schwaller puis Di Costanzo, chef d’une franc-garde de 200 hommes. <ref>[[La Milice à Rennes]]</ref >Ce sont des membres du CENS qui assassineront des Rennais, dans la nuit du 30 juin 1944, en représailles de l'assassinat de Philippe Henriot. <ref>[[Nuit du 30 juin 1944, des miliciens pour assassiner des Rennais]]</ref>
Réfugié en Allemagne à Marbourg, il n’avait, à l’automne 1944, rien perdu de ses convictions, mais en voulait aux Allemands de le faire, avec sa famille, coucher sur la paille alors que des chambres libres dans les hôtels étaient réservées aux soldats allemands.
Réfugié en Allemagne à Marbourg, du Perron de Maurin n’avait, à l’automne 1944, rien perdu de ses convictions, mais en voulait aux Allemands de le faire, avec sa famille, coucher sur la paille alors que des chambres libres dans les hôtels étaient réservées aux soldats allemands.


===Jugé et fusillé===
===Jugé et fusillé===
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