Bannière liberation Rennes 2.jpg

A l'occasion des 80 ans de la libération de Rennes, (re)découvrez l'ensemble des
contributions autour de la Seconde Guerre mondiale et de la libération sur Wiki-Rennes.

« Un tueur en série à Rennes en 1824 » : différence entre les versions

De WikiRennes
Aller à la navigationAller à la recherche
Aucun résumé des modifications
Aucun résumé des modifications
Ligne 14 : Ligne 14 :
Adolphe Orain donna une version très glauque et inexacte de la découverte de la victime :  des gendarmes auraient gardé la maison pendant quelques jours, afin de s’emparer de Poulain de Beauregard, dans le cas où il reviendrait. Installés dans la cuisine, et tout en fumant leurs pipes autour du foyer, ils auraient senti une odeur nauséabonde venant du parquet. L’un d’eux, avec son sabre, soulevant une brique du fond de l’âtre, aurait fait apparaître  des débris de chair humaine, le cadavre de Turmel, coupé par morceaux et "salé comme du lard dans un charnier".  <ref>''Au Pays de Rennes'', Adolphe Orain. éd. Hyacinthe Caillière - 1892.</ref>. En fait, les minutes du procès de Caen exposent que le fils de M. Turmel, inquiet de la disparition de son père, se rendit avec le commissaire de police à ''Lorette'' et que voyant le sol travaillé, il souleva une dalle et exhuma une main de M. Turmel père, puis les restes du cadavre ; une armoire contenait beaucoup d'objets de son père et l'on trouva une redingote lui appartenant. L'homme avait été tué d'un coup de pistolet. L’émotion fut vive à Rennes.
Adolphe Orain donna une version très glauque et inexacte de la découverte de la victime :  des gendarmes auraient gardé la maison pendant quelques jours, afin de s’emparer de Poulain de Beauregard, dans le cas où il reviendrait. Installés dans la cuisine, et tout en fumant leurs pipes autour du foyer, ils auraient senti une odeur nauséabonde venant du parquet. L’un d’eux, avec son sabre, soulevant une brique du fond de l’âtre, aurait fait apparaître  des débris de chair humaine, le cadavre de Turmel, coupé par morceaux et "salé comme du lard dans un charnier".  <ref>''Au Pays de Rennes'', Adolphe Orain. éd. Hyacinthe Caillière - 1892.</ref>. En fait, les minutes du procès de Caen exposent que le fils de M. Turmel, inquiet de la disparition de son père, se rendit avec le commissaire de police à ''Lorette'' et que voyant le sol travaillé, il souleva une dalle et exhuma une main de M. Turmel père, puis les restes du cadavre ; une armoire contenait beaucoup d'objets de son père et l'on trouva une redingote lui appartenant. L'homme avait été tué d'un coup de pistolet. L’émotion fut vive à Rennes.


Poulain de Beauregard était retourné en Normandie, où il fut arrêté à Saint-Lô, le 14 septembre 1824, "au moment où il se disposait à joindre le crime de bigamie à ceux qui pesaient déjà sur sa tête", car il était déjà marié et était père d'un garçon  - bonne couverture pour ses escroqueries  et ses assassinats de marchands. L'été de 1824, une psychose sévissait sur la ville de Caen à la suite de la découverte du corps d'une demoiselle Thouroude et de nouveaux cadavres. Au mois d'avril 1815, celui  dont l'identité était en fait Pierre Lemaire de Clermont, 44 ans, né près de Bayeux, fut condamné à la peine de mort. Il écrivit ses mémoires en prison.  
Poulain de Beauregard était retourné en Normandie, où il fut arrêté à Saint-Lô, le 14 septembre 1824, "au moment où il se disposait à joindre le crime de bigamie à ceux qui pesaient déjà sur sa tête", car il était déjà marié et était père d'un garçon  - bonne couverture pour ses escroqueries  et ses assassinats de marchands. L'été de 1824, une psychose sévissait sur la ville de Caen à la suite de la découverte du corps d'une demoiselle Thouroude, fripière, et de nouveaux cadavres. Au mois d'avril 1815, celui  dont l'identité était en fait Pierre Lemaire de Clermont, 44 ans, né près de Bayeux, fut arrêté et écrivit ses mémoires en prison.  


=== Au bord de la bigamie, à Rennes===
=== Au bord de la bigamie, à Rennes===
Ligne 20 : Ligne 20 :


===Un tueur en série===
===Un tueur en série===
Libertin et escroc, il s'avéra qu'il avait été condamné en 1806 à 8 ans de travaux forcés et "à la marque" pour une affaire de faux, avait été mis à la chaîne à Bicêtre, le bagne parisien, et  avait été conduit au bagne de Brest, ce qui ne l'empêcha pas, une fois libéré, de devenir voleur professionnel dans une étonnante série de crimes crapuleux. Lors du procès, une femme témoigna que Lemaire, se disant au service d'un marquis de Beauregard, était venu chez elle en compagnie de  M. Turmel en vue d'acheter du bois et que celui-ci s'étant probablement rendu chez le marquis, n'avait pas reparu; on constata que Lemaire avait fait acheter une ''parroire'' (sorte de bêche) par l'homme qu'il employait comme jardinier; une aubergiste vit Beauregard avec une montre en or, celui-ci indiquant qu'il venait de gagner un procès et 6500 F ;  un employé du sieur Legendre, horloger à Rennes, déposa qu'un individu en redingote verte, disant se nommer Poulain de Beauregard, apporta une montre en or à réparer, montre qui est reconnue comme ayant appartenu à M. Turmel et M. Turmel fils reconnaîtra aussi une serviette marquée L.C, ayant enveloppé une redingote à réparer, qui avait été prise dans la maison de son père et appartenait à sa femme, née Lecamus.<ref>Procès de Lemaire de Clermont et de ses complices. Cour d'Assises de Caen. Imp. Poisson Caen - 1825.</ref>. Le lundi 2 mai 1825, on lui signifie le rejet de son pourvoi en cassation et, le même jour, il est guillotiné sur la place de Caen, après une jeune fille condamnée  pour infanticide, devant une foule immense. <ref>''Histoire très monstrueuse de Lemaire de Clermont'', Claude Quetel, chargé de recherches au CNRS. IHMC, Caen. Annales de Normandie, Vol. 34, Numéro 4, pp. 421-430 - 1984.</ref>.
Libertin et escroc, il s'avéra qu'il avait été condamné en 1806 à 8 ans de travaux forcés et "à la marque" pour une affaire de faux, avait été mis à la chaîne à Bicêtre, le bagne parisien, et  avait été conduit au bagne de Brest, ce qui ne l'empêcha pas, une fois libéré, de devenir voleur professionnel dans une étonnante série de crimes crapuleux. Lors du procès, une femme témoigna que Lemaire, se disant au service d'un marquis de Beauregard, était venu chez elle en compagnie de  M. Turmel en vue d'acheter du bois et que celui-ci s'étant probablement rendu chez le marquis, n'avait pas reparu; on constata que Lemaire avait fait acheter une ''parroire'' (sorte de bêche) par l'homme qu'il employait comme jardinier; une aubergiste vit Beauregard avec une montre en or, celui-ci indiquant qu'il venait de gagner un procès et 6500 F ;  un employé du sieur Legendre, horloger à Rennes, déposa qu'un individu en redingote verte, disant se nommer Poulain de Beauregard, apporta une montre en or à réparer, montre qui est reconnue comme ayant appartenu à M. Turmel et M. Turmel fils reconnaîtra aussi une serviette marquée L.C, ayant enveloppé une redingote à réparer, qui avait été prise dans la maison de son père et appartenait à sa femme, née Lecamus.<ref>Procès de Lemaire de Clermont et de ses complices. Cour d'Assises de Caen. Imp. Poisson Caen - 1825.</ref>.
 
Le lundi 2 mai 1825, on lui signifie le rejet de son pourvoi en cassation et, le même jour, il est guillotiné sur la place de Caen, après une jeune fille condamnée  pour infanticide, devant une foule immense et excitée. <ref>''Histoire très monstrueuse de Lemaire de Clermont'', Claude Quetel, chargé de recherches au CNRS. IHMC, Caen. Annales de Normandie, Vol. 34, Numéro 4, pp. 421-430 - 1984.</ref>.


On chercha vainement à Rennes les restes des autres victimes du misérable, et ce ne fut que 28 ans plus tard, lorsque des travaux en vue de la construction de la gare remuèrent les terres du quartier, qu’on les découvrit. À la suite de cette tragédie plus personne ne voulut louer cette maison, rachetée par l'État qui en fit d'abord un magasin à poudre et l'inclut dans l'emprise de la gare de Rennes en voie d'aménagement.
On chercha vainement à Rennes les restes des autres victimes du misérable, et ce ne fut que 28 ans plus tard, lorsque des travaux en vue de la construction de la gare remuèrent les terres du quartier, qu’on les découvrit. À la suite de cette tragédie plus personne ne voulut louer cette maison, rachetée par l'État qui en fit d'abord un magasin à poudre et l'inclut dans l'emprise de la gare de Rennes en voie d'aménagement.