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« Chronique vezinoise sous l'occupation n°05 » : différence entre les versions

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'''Les jeux des enfants à Vezin-le-Coquet ''sous l’occupation''.'''
'''Les jeux des enfants à Vezin-le-Coquet ''sous l’occupation''.'''


Les jeux que nous partageons, enfants à Vezin-le-Coquet sous l'occupation, sont simples, inventifs et souvent copiés à partir d’évènements de la vie de tous les jours. Tout est prétexte aux jeux. En dehors de l’école et des devoirs pour les grands, il reste pour le temps libre encore de nombreuses heures disponibles. Les habitations  sont loin d’être suffisamment spacieuses, ainsi les enfants sont fort bien dehors pour jouer.
Les jeux que nous partageons, enfants à Vezin-le-Coquet sous l'Occupation, sont simples, inventifs et souvent copiés à partir d’évènements de la vie de tous les jours. Tout est prétexte aux jeux. En dehors de l’école et des devoirs pour les grands, il reste pour le temps libre encore de nombreuses heures disponibles. Les habitations  sont loin d’être suffisamment spacieuses, ainsi les enfants sont fort bien dehors pour jouer.


Libres les enfants, nous le sommes, dans ce village qui vit presque ''en autarcie'' compte tenu des possibilités réduites de déplacements et des interdictions de toutes sortes, énoncées par les lois de l’occupant.
Libres les enfants, nous le sommes, dans ce village qui vit presque ''en autarcie'' compte tenu des possibilités réduites de déplacements et des interdictions de toutes sortes, énoncées par les lois de l’occupant.
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Celui  d’un authentique s’est offert à nous avec Albert Pinel qui s’y entend parfaitement. Armé d’un outil ressemblant à un piolet très pointu, il assène un grand coup sur la tète de l’animal qui s’affale, le sang gicle, c’est la vie !… enfin pour ceux qui profiteront de sa viande. Il faut dire qu’à cette époque elle se faisait plutôt rare dans l’assiette du particulier
Celui  d’un authentique s’est offert à nous avec Albert Pinel qui s’y entend parfaitement. Armé d’un outil ressemblant à un piolet très pointu, il assène un grand coup sur la tète de l’animal qui s’affale, le sang gicle, c’est la vie !… enfin pour ceux qui profiteront de sa viande. Il faut dire qu’à cette époque elle se faisait plutôt rare dans l’assiette du particulier


Dans le pré de chez Lebastard, nous sommes plusieurs enfants, il doit bien y avoir Gaby, peut-être Alphonse et d’autres. Nous nous positionnons à quatre pattes, les uns derrière les autres, nous singeons des petites bêtes qui se dirigent vers le coup fatal. Le boucher du jour est Bernard, le plus grand. Il est armé d'une barre de fer faisant croix. Il feint d’asséner un violent coup sur la tête. La barre s'arrête un poil au-dessus de la cible et la petite bête s’affale en jetant un petit cri. A chacun son tour pour la tuerie, quand celui de mon frère arrive au moment important où le fer s'abat, il relève soudainement la tête en meuglant pour faire plus vrai. C’est alors la rencontre du fer contre crâne, le choc, des pleurs qui dépassent en intensité sonore les meuglements déjà entendus, il y a beaucoup de sang. Dans ce cas là on appelle toujours sa maman. Bernard est bouleversé, il prend mon frère par le bras qu’il tient comme pour jouer au side-car. Nous nous  précipitons tous en courant vers la maison. Ma mère affolée ne supporte pas la vue du  sang. La voisine, madame Blanchard de Rennes, heureusement présente ce jour là, soigne la plaie, finalement sans gravité. Heureusement Bernard a eu la main plus légère qu’Albert. On en parle encore. Soixante ans ont passé et Bernard se confond toujours en excuses.
Dans le pré de chez Lebastard, nous sommes plusieurs enfants, il doit bien y avoir Gaby, peut-être Alphonse et d’autres. Nous nous positionnons à quatre pattes, les uns derrière les autres, nous singeons des petites bêtes qui se dirigent vers le coup fatal. Le boucher du jour est Bernard, le plus grand. Il est armé d'une barre de fer faisant croix. Il feint d’asséner un violent coup sur la tête. La barre s'arrête un poil au-dessus de la cible et la petite bête s’affale en jetant un petit cri. A chacun son tour pour la tuerie, quand celui de mon frère arrive au moment important où le fer s'abat, il relève soudainement la tête en meuglant pour faire plus vrai. C’est alors la rencontre du fer contre crâne, le choc, des pleurs qui dépassent en intensité sonore les meuglements déjà entendus, il y a beaucoup de sang. Dans ce cas là on appelle toujours sa maman. Bernard est bouleversé, il prend mon frère par le bras qu’il tient comme pour jouer au side-car. Nous nous  précipitons tous en courant vers la maison. Ma mère affolée ne supporte pas la vue du  sang. La voisine, madame Blanchard, de Rennes, heureusement présente ce jour là, soigne la plaie, finalement sans gravité. Heureusement Bernard a eu la main plus légère qu’Albert. On en parle encore. Soixante ans ont passé et Bernard se confond toujours en excuses.




Un jour, sans pluie, ma grande sœur participe, pour les petits, à la fabrication d’arcs. Une fine branche bien droite, une ficelle, des flèches. Nous  voilà partis à la chasse, tous ensemble quatre ou cinq gamins, Alphonse était du nombre, je crois. Notre souci est de tuer des oiseaux nuisibles, pies ou corbeaux. Nous avions entendu dire qu'une prime est versée par la commune pour chaque bête tuée et bien sûr apportée en mairie. Ma sœur aînée entre dans notre jeu, elle nous encourage,'' « cela va toujours les occuper pour un moment ! ».''  
Un jour, sans pluie, ma grande sœur participe, pour les petits, à la fabrication d’arcs. Une fine branche bien droite, une ficelle, des flèches. Nous  voilà partis à la chasse, tous ensemble quatre ou cinq gamins, Alphonse était du nombre, je crois. Notre souci est de tuer des oiseaux nuisibles, pies ou corbeaux. Nous avions entendu dire qu'une prime est versée par la commune pour chaque bête tuée et bien sûr apportée en mairie. Ma sœur aînée entre dans notre jeu, elle nous encourage,'' « cela va toujours les occuper pour un moment ! ».''  
Elle n’imagine pas que nous irions jusqu’au bout de notre projet ''tant que faire se peut.'' Nous entrons à fond dans notre jeu avec l’esprit de rapporter de l’argent. Nous le croyons bien fermement. Au bout du compte, notre chasse n’est pas des plus heureuses, aucun gibier n’accepte de venir se suicider à nos pieds. Peu importe nous avons de la ressource. Je ne me souviens plus qui a eu cette idée, c’est tout à fait dans mes cordesde décrocher un volatil mort accroché à la branche d’un  pommier. Un cultivateur l’avait attaché là pour écarter les autres nuisibles. Quelle belle idée, plein d'espoir, nous le décrochons et l’emportons. Nous le présentons au secrétaire de mairie qui n'est autre que notre directeur d’école, monsieur Guérin. ''« C’est pour la prime »'' avons nous dit. A notre grand étonnement la réception n’est pas celle que nous imaginions. Monsieur Guérin lève les bras au ciel, des paroles fusent de sa bouche, je ne me souviens plus lesquelles, je crois tout de même me souvenir d’un mot : galopins. Je pense qu’il est préférable d’avoir oublié les autres. Piteusement nous rentrons rendre compte à ma sœur aînée de nos déboires.
Elle n’imagine pas que nous irions jusqu’au bout de notre projet ''tant que faire se peut.'' Nous entrons à fond dans notre jeu avec l’esprit de rapporter de l’argent. Nous le croyons bien fermement. Au bout du compte, notre chasse n’est pas des plus heureuses, aucun gibier n’accepte de venir se suicider à nos pieds. Peu importe nous avons de la ressource. Je ne me souviens plus qui a eu cette idée, c’est tout à fait dans mes cordes de décrocher un volatil mort accroché à la branche d’un  pommier. Un cultivateur l’avait attaché là pour écarter les autres nuisibles. Quelle belle idée, plein d'espoir, nous le décrochons et l’emportons. Nous le présentons au secrétaire de mairie qui n'est autre que notre directeur d’école, monsieur Guérin. ''« C’est pour la prime »'' avons nous dit. A notre grand étonnement la réception n’est pas celle que nous imaginions. Monsieur Guérin lève les bras au ciel, des paroles fusent de sa bouche, je ne me souviens plus lesquelles, je crois tout de même me souvenir d’un mot : galopins. Je pense qu’il est préférable d’avoir oublié les autres. Piteusement nous rentrons rendre compte à ma sœur aînée de nos déboires.


Plus qu’un jeu, c’est une distraction que le ciel nous apporte offerte par le déroulement des évènements habituels du moment. L’éclatement en l’air des obus lancés par les 8,8cm de la DCA de ''la Belle Epine'' lors de chaque passage d’avions alliés retombent un peu partout. Chaque détonation du canon claque sèchement, acide, bref sans écho bien différent des bruits que provoquent un bombardement. Ce bruit m’impressionne, me gêne sans toutefois m’effrayer. J’entends les éclats tomber sur la toiture d’ardoise de la maison, dégoulinant comme de la grêle, accompagnés d’un petit bruit clair. Lorsque l’alerte est terminée nous nous élançons  à la recherche de ces petits éclats métalliques. Nos recherches se portent sur les routes là où ils sont le plus visibles. Nous en récoltons de grosseurs plus ou moins importantes et de différentes formes. Nous les comparons entre nous, nous nous les échangeons. ''Lesquels sont les plus beaux.'' Les bords des éclats sont souvent acérés.
Plus qu’un jeu, c’est une distraction que le ciel nous apporte offerte par le déroulement des évènements habituels du moment. L’éclatement en l’air des obus lancés par les 8,8cm de la DCA de ''la Belle Epine'' lors de chaque passage d’avions alliés retombent un peu partout. Chaque détonation du canon claque sèchement, acide, bref sans écho bien différent des bruits que provoquent un bombardement. Ce bruit m’impressionne, me gêne sans toutefois m’effrayer. J’entends les éclats tomber sur la toiture d’ardoise de la maison, dégoulinant comme de la grêle, accompagnés d’un petit bruit clair. Lorsque l’alerte est terminée nous nous élançons  à la recherche de ces petits éclats métalliques. Nos recherches se portent sur les routes là où ils sont le plus visibles. Nous en récoltons de grosseurs plus ou moins importantes et de différentes formes. Nous les comparons entre nous, nous nous les échangeons. ''Lesquels sont les plus beaux.'' Les bords des éclats sont souvent acérés.