« Chronique vezinoise sous l'occupation n°05 » : différence entre les versions

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D’instinct nous avons, avec mon frère, bien défini nos marques et établi des frontières du village à ne pas dépasser.  
D’instinct nous avons, avec mon frère, bien défini nos marques et établi des frontières du village à ne pas dépasser.  
''Le Tertre'' par exemple où demeure Pierre est pour moi une terre réservée aux enfants de ce fief. Nous ne le fréquentons jamais, nous le traversons parfois, accompagnés de notre mère. C’est un passage obligé pour se rendre à Rennes. La nouvelle route n’est pas encore percée. Pour ce faire, les travaux qui ont démarré avant guerre sont stoppés net avec la déclaration de celle-ci. Situé peu après la ferme Lefeuvre, l’endroit présente l’aspect d’un chantier abandonné. Des wagonnets encore posés sur quelques mètres de rails menant nulle part, attendent de meilleurs jours pour rependre du service.  
''Le Tertre'' par exemple où demeure Pierre Pécoil est pour moi une terre réservée aux enfants de ce fief. Nous ne le fréquentons jamais, nous le traversons parfois, accompagnés de notre mère. C’est un passage obligé pour se rendre à Rennes. La nouvelle route n’est pas encore percée. Pour ce faire, les travaux qui ont démarré avant guerre sont stoppés net avec la déclaration de celle-ci. Situé peu après la ferme Lefeuvre, l’endroit présente l’aspect d’un chantier abandonné. Des wagonnets encore posés sur quelques mètres de rails menant nulle part, attendent de meilleurs jours pour rependre du service.  
Ce lieu domine légèrement Rennes, suffisamment toutefois pour apercevoir, un soir avancé qui précédera le départ de l’occupant, différents points lumineux de la capitale bretonne provoqués par les flammes d’incendies de dépôts de ceux qui, nous ayant humiliés en 1940 s’en retournent enfin rejoindre leurs pénates.
Ce lieu domine légèrement Rennes, suffisamment toutefois pour apercevoir, un soir avancé qui précédera le départ de l’occupant, différents points lumineux de la capitale bretonne provoqués par les flammes d’incendies de dépôts de ceux qui, nous ayant humiliés en 1940 s’en retournent enfin rejoindre leurs pénates.


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Celui d’un authentique s’est offert à nous avec Albert Pinel qui s’y entend parfaitement. Armé d’un outil ressemblant à un piolet très pointu, il assène un grand coup sur la tète de l’animal qui s’affale, le sang gicle, c’est la vie !… enfin pour ceux qui profiteront de sa viande. Il faut dire qu’à cette époque elle se faisait plutôt rare dans l’assiette du particulier
Celui d’un authentique s’est offert à nous avec Albert Pinel qui s’y entend parfaitement. Armé d’un outil ressemblant à un piolet très pointu, il assène un grand coup sur la tète de l’animal qui s’affale, le sang gicle, c’est la vie !… enfin pour ceux qui profiteront de sa viande. Il faut dire qu’à cette époque elle se faisait plutôt rare dans l’assiette du particulier


Dans le pré de chez Lebastard, nous sommes plusieurs enfants, il doit bien y avoir Gaby, peut-être Alphonse et d’autres. Nous nous positionnons à quatre pattes, les uns derrière les autres, nous singeons des petites bêtes qui se dirigent vers le coup fatal. Le boucher du jour est Bernard, le plus grand. Il est armé d'une barre de fer faisant croix. Il feint d’asséner un violent coup sur la tête. La barre s'arrête un poil au-dessus de la cible et la petite bête s’affale en jetant un petit cri. À chacun son tour pour la tuerie, quand celui de mon frère arrive au moment important où le fer s'abat, il relève soudainement la tête en meuglant pour faire plus vrai. C’est alors la rencontre du fer contre crâne, le choc, des pleurs qui dépassent en intensité sonore les meuglements déjà entendus, il y a beaucoup de sang. Dans ce cas-là on appelle toujours sa maman. Bernard est bouleversé, il prend mon frère par le bras qu’il tient comme pour jouer au side-car. Nous nous précipitons tous en courant vers la maison. Ma mère affolée ne supporte pas la vue du sang. La voisine, madame Blanchard, de Rennes, heureusement présente ce jour là, soigne la plaie, finalement sans gravité. Heureusement Bernard a eu la main plus légère qu’Albert. On en parle encore. Soixante ans ont passé et Bernard se confond toujours en excuses.
Dans le pré de chez Lebastard, nous sommes plusieurs enfants, il doit bien y avoir Gaby, peut-être Alphonse et d’autres. Nous nous positionnons à quatre pattes, les uns derrière les autres, nous singeons des petites bêtes qui se dirigent vers le coup fatal. Le boucher du jour est Bernard, le plus grand. Il est armé d'une barre de fer faisant croix. Il feint d’asséner un violent coup sur la tête. La barre s'arrête un poil au-dessus de la cible et la petite bête s’affale en jetant un petit cri. À chacun son tour pour la tuerie, quand celui de mon frère arrive au moment important où le fer s'abat, il relève soudainement la tête en meuglant pour faire plus vrai. C’est alors la rencontre du fer contre crâne, le choc, des pleurs qui dépassent en intensité sonore les meuglements déjà entendus, il y a beaucoup de sang. Dans ce cas-là on appelle toujours sa maman. Bernard est bouleversé, il prend mon frère par le bras qu’il tient comme pour jouer au side-car. Nous nous précipitons tous en courant vers la maison. Ma mère affolée ne supporte pas la vue du sang. La voisine, madame Blanchard, de Rennes, heureusement présente ce jour là, soigne la plaie, finalement sans gravité. Heureusement Bernard a eu la main plus légère qu’Albert Pinel. On en parle encore. Soixante ans ont passé et Bernard se confond toujours en excuses.


'''''La chasse aux corbeaux'''''
'''''La chasse aux corbeaux'''''
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