« Quartier 9 : du passé ouvrier ne faisons pas table rase » : différence entre les versions

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Le projet sur la mémoire du quartier Prévalaye- Cleunay-Arsenal-Redon a été l’occasion, pour moi, de renouer avec les Archives Municipales et, pour d’autres, de les découvrir et se plonger dans un passé récent ou plus ou moins ancien du quartier 9.




Le projet sur la mémoire du quartier Prévalaye- Cleunay-Arsenal-Redon a été l’occasion, pour moi, de renouer avec les Archives Municipales et, pour d’autres, de les découvrir et se plonger dans un passé récent ou plus ou moins ancien du quartier 9.
Il ne s’agissait pas de faire un travail d’historien. Cependant il me semble utile de faire quelques remarques préliminaires. Les documents écrits sont une source d’information mais il faut les regarder avec du recul. Ils relatent quelques instants, quand ils sont objectifs, de la vie du quartier mais c’est très peu par rapport à tout ce qui n’a pas été écrit, nous n’avons que des pointillés du passé. Le plus souvent c’est ce que les institutions en ont gardé et généralement ce sont des personnes qui savent s’exprimer par écrit qui le parlent. Pour les autres, il n’y a pas de trace alors que ces autres regards ont tout autant d’intérêt pour approcher le passé proche sans vision unilatérale. De plus, dans ce projet, pour plusieurs d’entre nous nos propres souvenirs s’y sont entremêlés et, là aussi, il faut prendre du recul. Ce que nous appelons notre mémoire est une sélection de ce que notre cerveau a bien voulu retenir, c’est aussi ce que nous avons reconstruit plus ou moins consciemment en faisant jouer notre propre subjectivité et en n’ayant vu les évènements que sous un seul angle.
Il ne s’agissait pas de faire un travail d’historien. Cependant il me semble utile de faire quelques remarques préliminaires. Les documents écrits sont une source d’information mais il faut les regarder avec du recul. Ils relatent quelques instants, quand ils sont objectifs, de la vie du quartier mais c’est très peu par rapport à tout ce qui n’a pas été écrit, nous n’avons que des pointillés du passé. Le plus souvent c’est ce que les institutions en ont gardé et généralement ce sont des personnes qui savent s’exprimer par écrit qui le parlent. Pour les autres, il n’y a pas de trace alors que ces autres regards ont tout autant d’intérêt pour approcher le passé proche sans vision unilatérale. De plus, dans ce projet, pour plusieurs d’entre nous nos propres souvenirs s’y sont entremêlés et, là aussi, il faut prendre du recul. Ce que nous appelons notre mémoire est une sélection de ce que notre cerveau a bien voulu retenir, c’est aussi ce que nous avons reconstruit plus ou moins consciemment en faisant jouer notre propre subjectivité et en n’ayant vu les évènements que sous un seul angle.
Ce texte est le résultat de cinq ou six séances de travail aux Archives Municipales et de quelques recherches d’information dans d’autres documents et dans mon entourage. Il ne donnera donc pas plus qu’il ne peut. Comme je l’ai précisé, cet écrit peut être empreint de subjectivité. Certains voudrons peut être y réagir, pour préciser, rectifier, protester ? … et c’est tant mieux.
Ce texte est le résultat de cinq ou six séances de travail aux Archives Municipales et de quelques recherches d’information dans d’autres documents et dans mon entourage. Il ne donnera donc pas plus qu’il ne peut. Comme je l’ai précisé, cet écrit peut être empreint de subjectivité. Certains voudrons peut être y réagir, pour préciser, rectifier, protester ? … et c’est tant mieux.
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'''De la place de la Rotonde vers le boulevard Voltaire'''
'''De la place de la Rotonde vers le boulevard Voltaire'''
Revenu place de la Rotonde, sur ma gauche et en face, j’ai le souvenir d’un long et haut mur de schiste rouge arrivant par la rue de l’Arsenal, c’est de l’entreprise qu’ils protégeaient que vient son nom. Il continue par la rue de Redon jusqu’à ce qui est aujourd’hui la Maison Héloïse. Le trottoir la plupart du temps à l’ombre me poussait à marcher sur celui d’en face plus accueillant. De l’autre côté de ce mur, l’Arsenal de Rennes. Il s’est installé là dans les bâtiments d’un hospice de santé en 1793 et il sera complètement reconstruit en 1844. Trop à l’étroit dans la ville, il se déploie aussi sur les terrains de la Courrouze qui commenceront à être achetés en 1856. La spécialité de l’arsenal de Rennes, qui lui vaudra son développement, est l’usinage des munitions et des douilles métalliques. La surface des terrains utilisés va  aller jusqu’à 78 hectares. Au plus fort de la première guerre mondiale ce seront jusqu’à 18 000 personnes qui y travailleront et la deuxième verra l’emploi de 10 500 personnes. L’après-guerre voit le début de fabrications civiles comme le matériel agricole. C’est en 1968 que commence le début de la fin, une réduction drastique des effectifs suivi de la fin des activités sur le site d’origine de l’arsenal. Avant 1970 il y a de moins en moins de personnes employées sur le site de la Courrouze et en 2009 un résidu d’activité ne génère plus que 45 postes. Les effectifs, longtemps imposants, expliquent la circulation qui pouvait y avoir dans le quartier où résidaient de nombreux ouvriers alors qu’une partie du personnel sortait par le bout de la rue Philippe Lebon. Les entrées et sorties du travail étaient rythmées par une sirène. Cela me rappelle aussi que vers midi le premier mercredi de chaque mois on entendait le concert des sirènes de l’arsenal, de l’usine à gaz et de bien d’autres usines de la ville qui faisaient l’exercice mensuel d’alerte. Je ne sais pas si cela a encore lieu à l’instant où j’écris ceci. Le bruit de la circulation, des avions qui décollent à Saint-Jacques et de la rocade couvrent peut-être ce hurlement qui rappelait aux vieux Rennais les alertes aux bombardements de la dernière guerre.
Revenu place de la Rotonde, sur ma gauche et en face, j’ai le souvenir d’un long et haut mur de schiste rouge arrivant par la rue de l’Arsenal, c’est de l’entreprise qu’ils protégeaient que vient son nom. Il continue par la rue de Redon jusqu’à ce qui est aujourd’hui la Maison Héloïse. Le trottoir la plupart du temps à l’ombre me poussait à marcher sur celui d’en face plus accueillant. De l’autre côté de ce mur, l’Arsenal de Rennes. Il s’est installé là dans les bâtiments d’un hospice de santé en 1793 et il sera complètement reconstruit en 1844. Trop à l’étroit dans la ville, il se déploie aussi sur les terrains de la Courrouze qui commenceront à être achetés en 1856. La spécialité de l’arsenal de Rennes, qui lui vaudra son développement, est l’usinage des munitions et des douilles métalliques. La surface des terrains utilisés va  aller jusqu’à 78 hectares. Au plus fort de la première guerre mondiale ce seront jusqu’à 18 000 personnes qui y travailleront et la deuxième verra l’emploi de 10 500 personnes. L’après-guerre voit le début de fabrications civiles comme le matériel agricole. C’est en 1968 que commence le début de la fin, une réduction drastique des effectifs suivi de la fin des activités sur le site d’origine de l’arsenal. Avant 1970 il y a de moins en moins de personnes employées sur le site de la Courrouze et en 2009 un résidu d’activité ne génère plus que 45 postes. Les effectifs, longtemps imposants, expliquent la circulation qui pouvait y avoir dans le quartier où résidaient de nombreux ouvriers alors qu’une partie du personnel sortait par le bout de la rue Philippe Lebon. Les entrées et sorties du travail étaient rythmées par une sirène. Cela me rappelle aussi que vers midi le premier mercredi de chaque mois on entendait le concert des sirènes de l’arsenal, de l’usine à gaz et de bien d’autres usines de la ville qui faisaient l’exercice mensuel d’alerte. Je ne sais pas si cela a encore lieu à l’instant où j’écris ceci. Le bruit de la circulation, des avions qui décollent à Saint-Jacques et de la rocade couvrent peut-être ce hurlement qui rappelait aux vieux Rennais les alertes aux bombardements de la dernière guerre.
Si on travaille beaucoup dans tous ces lieux, les revendications sociales sont aussi présentes. Je n’énumère qu’une part infime de ce qui a été le plus visible, une grève des ouvriers de l’Arsenal et du Polygone en 1892, des grèves ouvrières en 1910 dont l’Arsenal, celles des employés du gaz en 1912 et 1919 … il y en aura beaucoup d’autres.
Si on travaille beaucoup dans tous ces lieux, les revendications sociales sont aussi présentes. Je n’énumère qu’une part infime de ce qui a été le plus visible, une grève des ouvriers de l’Arsenal et du Polygone en 1892, des grèves ouvrières en 1910 dont l’Arsenal, celles des employés du gaz en 1912 et 1919 … il y en aura beaucoup d’autres.


'''Inkerman-Alexandre Duval'''
'''Inkerman-Alexandre Duval'''
Je continue vers le boulevard Voltaire, un nouveau souvenir, près de l’angle de la rue d’Inkerman et de la rue Alexandre Duval, le grand portail métallique surmonté d’un arc indiquant l’Asturienne-Penamet, une entreprise spécialisée dans les toitures et particulier pour le travail du zinc. Si je continue par cette rue, j’arrive à l’usine Amora et sa tour emblématique. Si les archives ont pu confirmer mes connaissances, des souvenirs personnels les complètent. Je revois des étroite bandes de papier, mes fiches, de paye des mois d’août 1962 et 1963 alors que lycéen j’y travaillais pour la de saison des cornichons. Les premiers jours c’est l’inspection des barriques stockées dans le sous-sol à droite. Il fallait qu’elles soient toujours remplies de saumure à ras bord pour préserver câpres, olives et autre qui attendaient leur conditionnement. Plus tard, très tôt le matin, c’est le déchargement des cageots de cornichons des wagons frigorifiques qui stationnent derrière l’usine, puis l’arrivée d’un vol de jeunes filles qui arrivent pour le travail de mise en bocaux. Le palan,  j’y aidais un vieil espagnol à descendre et remonter les claies chargées des produits à stériliser. Enfin la tour, elle interroge encore aujourd’hui. Si mes souvenirs sont bons, je me rappelle avoir monté tout en haut des sacs de graine de moutarde que nous déversions dans un conduit … ce qui se passait ensuite, je ne saurais le dire … Toujours est-il qu’en bas c’est de la moutarde qui était mise en pot. Nous sommes revenus au nom de l’usine, c’était de la moutarde Amora. Depuis c’est devenu un dépôt de câbles électriques, l’entreprise Picard, et maintenant s’y trouvent les Ateliers du Vent. Un peu loin, arrivé à la Mabilais, sur la fin de la rue Alexandre Duval se trouvent des entrepôts de la Chambre de Commerce et de l’Industrie. Ultérieurement des ateliers de restauration y prendront place. Il s’agissait de sauvegarder et rénover mobiliers et peintures qui ont souffert en 1994 de l’incendie du Palais de justice, comme les Rennais l’appelaient autrefois. Il semble que le projet d’en faire un site de restauration définitif ait été abandonné.
Je continue vers le boulevard Voltaire, un nouveau souvenir, près de l’angle de la rue d’Inkerman et de la rue Alexandre Duval, le grand portail métallique surmonté d’un arc indiquant l’Asturienne-Penamet, une entreprise spécialisée dans les toitures et particulier pour le travail du zinc. Si je continue par cette rue, j’arrive à l’usine Amora et sa tour emblématique. Si les archives ont pu confirmer mes connaissances, des souvenirs personnels les complètent. Je revois des étroite bandes de papier, mes fiches, de paye des mois d’août 1962 et 1963 alors que lycéen j’y travaillais pour la de saison des cornichons. Les premiers jours c’est l’inspection des barriques stockées dans le sous-sol à droite. Il fallait qu’elles soient toujours remplies de saumure à ras bord pour préserver câpres, olives et autre qui attendaient leur conditionnement. Plus tard, très tôt le matin, c’est le déchargement des cageots de cornichons des wagons frigorifiques qui stationnent derrière l’usine, puis l’arrivée d’un vol de jeunes filles qui arrivent pour le travail de mise en bocaux. Le palan,  j’y aidais un vieil espagnol à descendre et remonter les claies chargées des produits à stériliser. Enfin la tour, elle interroge encore aujourd’hui. Si mes souvenirs sont bons, je me rappelle avoir monté tout en haut des sacs de graine de moutarde que nous déversions dans un conduit … ce qui se passait ensuite, je ne saurais le dire … Toujours est-il qu’en bas c’est de la moutarde qui était mise en pot. Nous sommes revenus au nom de l’usine, c’était de la moutarde Amora. Depuis c’est devenu un dépôt de câbles électriques, l’entreprise Picard, et maintenant s’y trouvent les Ateliers du Vent. Un peu loin, arrivé à la Mabilais, sur la fin de la rue Alexandre Duval se trouvent des entrepôts de la Chambre de Commerce et de l’Industrie. Ultérieurement des ateliers de restauration y prendront place. Il s’agissait de sauvegarder et rénover mobiliers et peintures qui ont souffert en 1994 de l’incendie du Palais de justice, comme les Rennais l’appelaient autrefois. Il semble que le projet d’en faire un site de restauration définitif ait été abandonné.


'''De Malakoff à la Vilaine'''
'''De Malakoff à la Vilaine'''
Je reviens sur mes pas et termine la rue de Redon. Arrivé au Carrefour Redon-Voltaire-Claude Bernard-Malakoff, j’ai le choix entre trois directions alors que juste à l’angle, à ma droite, je vois l’entrée des établissements Joncoux aux bâtiments vieillots et bas, ils sont spécialisés dans la tuyauterie galvanisée, la vente de gazinière et autres appareils de chauffage. Ils quitteront les lieux pour Saint Grégoire en 1957 et seront remplacés par un bâtiment des Télécoms. En face à l’angle gauche, de grands bâtiments de réparation de camions, c’est le garage Saurer-Hotchkiss et plus tard Mercedes. Je me décide à prendre à droite, aussitôt de l’autre côté j’aperçois la vinaigrerie Dessault. Je la retrouverai boulevard Voltaire car elle donne sur deux les deux voies. Je ne sais si ce règlement intérieur était aussi appliqué au site rennais, mais dans le règlement intérieur de la Vinaigrerie Dessaux de 1880 on trouve :
Je reviens sur mes pas et termine la rue de Redon. Arrivé au Carrefour Redon-Voltaire-Claude Bernard-Malakoff, j’ai le choix entre trois directions alors que juste à l’angle, à ma droite, je vois l’entrée des établissements Joncoux aux bâtiments vieillots et bas, ils sont spécialisés dans la tuyauterie galvanisée, la vente de gazinière et autres appareils de chauffage. Ils quitteront les lieux pour Saint Grégoire en 1957 et seront remplacés par un bâtiment des Télécoms. En face à l’angle gauche, de grands bâtiments de réparation de camions, c’est le garage Saurer-Hotchkiss et plus tard Mercedes. Je me décide à prendre à droite, aussitôt de l’autre côté j’aperçois la vinaigrerie Dessault. Je la retrouverai boulevard Voltaire car elle donne sur deux les deux voies. Je ne sais si ce règlement intérieur était aussi appliqué au site rennais, mais dans le règlement intérieur de la Vinaigrerie Dessaux de 1880 on trouve :
''1- Piété, propreté et ponctualité sont la force d’une bonne affaire 2- … les employés de bureau n’auront plus à être présents que de sept heures du matin à six heures du soir, et ce, les jours de semaine seulement. 3- Des prières seront dites chaque matin dans le grand bureau. Les employés de bureau y seront obligatoirement présents. 6- … il est recommandé à chaque membre du personnel d’apporter chaque jour quatre livres de charbon durant la saison froide … et tout le reste à l’avenant qui se termine par Les propriétaires reconnaissent et acceptent la générosité des nouvelles lois du Travail mais attendent du personnel un accroissement considérable du rendement en compensation de ces conditions presque utopiques.''
''1- Piété, propreté et ponctualité sont la force d’une bonne affaire 2- … les employés de bureau n’auront plus à être présents que de sept heures du matin à six heures du soir, et ce, les jours de semaine seulement. 3- Des prières seront dites chaque matin dans le grand bureau. Les employés de bureau y seront obligatoirement présents. 6- … il est recommandé à chaque membre du personnel d’apporter chaque jour quatre livres de charbon durant la saison froide … et tout le reste à l’avenant qui se termine par Les propriétaires reconnaissent et acceptent la générosité des nouvelles lois du Travail mais attendent du personnel un accroissement considérable du rendement en compensation de ces conditions presque utopiques.''
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'''Vers le passage à niveau Claude Bernard'''
'''Vers le passage à niveau Claude Bernard'''
Au carrefour Voltaire-Redon, j’aurais pu remonter sur ma gauche par la rue Claude Bernard jusqu’aux établissements Jean Prost au n° 22. Tout en restant sur le Mail, la plus grande partie de l’établissement a émigré sur le site de l’ancien manoir Le Gravot. C’est en 1961 que les transports s’y installent. Le personnel du garage du Mail y arrive en 1962. Les voies de chemin de fer y accèdent. Par plusieurs étapes, on y trouve tout ce qui est nécessaire au fonctionnement de l’entreprise : citernes à gasoil et pompes, station de lavage, atelier de réparation, carrosserie, bureaux. Pendant et après la dernière guerre, l’entreprise a beaucoup transporté pour la société l’Économique. En 1972, l’entreprise Jean Prost qui compte près de 600 employés, devient le transporteur le plus important de Bretagne. Devenue « Prost Transport »,  il ne cesse de s’étendre, à toute la France d’abord, puis à la Belgique et  aux Pays Bas. De 1972 à 1985, 800 nouveaux emplois sont créés. En 1992, l’entreprise compte 61 succursales, emploie 2085 personnes et exploite 1 410 véhicules. Le rachat par UPS qui avait d’autres intérêts à lieu en 1991. Les Américains débarquent physiquement ; parmi eux, Tony Montan, un gars du New Jersey d'origine italienne. Il s’agissait surtout de racheter la compétence et le réseau … une autre histoire, d’autres valeurs mais d’horribles camions et camionnettes marron qui font leur apparition. Aujourd’hui c’est place rase autour de la trémie Claude Bernard, difficile d’imaginer les entrées et sorties, surtout le soir et très tôt le matin, des innombrables poids lourds et semi-remorques sortant des entrepôts. Un peu plus loin, boulevard de Cleunay, un autre dépôt Prost à pris la place du garage Ricard, des véhicules de transports exceptionnels comme le tracteur de 240 CV tous terrains 6 6 avec cabestan arrière ou le semi d’une longueur transportable de 18 à 25 mètres, boggie arrière orientable par servo-direction pneumatique. Tout près, c’est l’entreprise Rol Lister, boîte de travaux publics, encore des camions.
Au carrefour Voltaire-Redon, j’aurais pu remonter sur ma gauche par la rue Claude Bernard jusqu’aux établissements Jean Prost au n° 22. Tout en restant sur le Mail, la plus grande partie de l’établissement a émigré sur le site de l’ancien manoir Le Gravot. C’est en 1961 que les transports s’y installent. Le personnel du garage du Mail y arrive en 1962. Les voies de chemin de fer y accèdent. Par plusieurs étapes, on y trouve tout ce qui est nécessaire au fonctionnement de l’entreprise : citernes à gasoil et pompes, station de lavage, atelier de réparation, carrosserie, bureaux. Pendant et après la dernière guerre, l’entreprise a beaucoup transporté pour la société l’Économique. En 1972, l’entreprise Jean Prost qui compte près de 600 employés, devient le transporteur le plus important de Bretagne. Devenue « Prost Transport »,  il ne cesse de s’étendre, à toute la France d’abord, puis à la Belgique et  aux Pays Bas. De 1972 à 1985, 800 nouveaux emplois sont créés. En 1992, l’entreprise compte 61 succursales, emploie 2085 personnes et exploite 1 410 véhicules. Le rachat par UPS qui avait d’autres intérêts à lieu en 1991. Les Américains débarquent physiquement ; parmi eux, Tony Montan, un gars du New Jersey d'origine italienne. Il s’agissait surtout de racheter la compétence et le réseau … une autre histoire, d’autres valeurs mais d’horribles camions et camionnettes marron qui font leur apparition. Aujourd’hui c’est place rase autour de la trémie Claude Bernard, difficile d’imaginer les entrées et sorties, surtout le soir et très tôt le matin, des innombrables poids lourds et semi-remorques sortant des entrepôts. Un peu plus loin, boulevard de Cleunay, un autre dépôt Prost à pris la place du garage Ricard, des véhicules de transports exceptionnels comme le tracteur de 240 CV tous terrains 6 6 avec cabestan arrière ou le semi d’une longueur transportable de 18 à 25 mètres, boggie arrière orientable par servo-direction pneumatique. Tout près, c’est l’entreprise Rol Lister, boîte de travaux publics, encore des camions.


'''La Mabilais'''
'''La Mabilais'''
Si je retourne au carrefour Redon-Voltaire, rien de remarquable d’un point de vue entreprise, sauf peut-être une menuiserie. Au 57 boulevard Voltaire au début du XXe, est installée une usine pour la fabrication d’agglomérés de charbon de bois. Elle sera l’objet de plaintes des voisins pour le bruit et les odeurs. Maintenant j’arrive à La Mabilais. Ce sont, de part et d’autre du pont de chemin de fer, des voies ferrées qui traversent le Boulevard. Il est régulièrement fermé par une barrière pour sécuriser les manœuvres des trains de marchandises. Á gauche d’autre entrepôts de la Chambre de Commerce, des dépôts de bois, à droite d’autres entrepôts, des dépôts de bois, les transports Hautière et un moment les Ateliers de la Mabilais spécialisés dans l’emploi des handicapés. Ces ateliers ont émigré à Noyal sur Vilaine en conservant leur nom.
Si je retourne au carrefour Redon-Voltaire, rien de remarquable d’un point de vue entreprise, sauf peut-être une menuiserie. Au 57 boulevard Voltaire au début du XXe, est installée une usine pour la fabrication d’agglomérés de charbon de bois. Elle sera l’objet de plaintes des voisins pour le bruit et les odeurs. Maintenant j’arrive à La Mabilais. Ce sont, de part et d’autre du pont de chemin de fer, des voies ferrées qui traversent le Boulevard. Il est régulièrement fermé par une barrière pour sécuriser les manœuvres des trains de marchandises. Á gauche d’autre entrepôts de la Chambre de Commerce, des dépôts de bois, à droite d’autres entrepôts, des dépôts de bois, les transports Hautière et un moment les Ateliers de la Mabilais spécialisés dans l’emploi des handicapés. Ces ateliers ont émigré à Noyal sur Vilaine en conservant leur nom.


'''L’usine à gaz, le quartier de Cleunay'''
'''L’usine à gaz, le quartier de Cleunay'''
Je passe sous le pont étroit et traverse la voise ferrée desservant l’usine à Gaz auparavant ravitaillée en coke par voie fluviale. Elle n’a jamais cessé de se transformer, autrefois il y avait les parcs à charbon, d’autres pour les résidus de mâchefer, les fours de fabrication du gaz, les gazomètres de stockage dont un situé rue Monselet, il a été remplacé par des locaux d’EDF-GDF. En 1915 l’usine participe à l’effort de guerre en adaptant un de ses fours au recuit des douilles, la production grimpera jusqu’à 60 000 par jour. Ce sont près de 700 personnes réparties en trois équipes qui y travaillent quotidiennement. Les femmes y travaillent à l’emballage, les caisses transitent entre l’usine à gaz et l’arsenal. Des Nord-Africains, comme on disait, sont recrutés, 25 en 1917 logés dans l’usine, puis cent et ensuite cinquante de plus. Ils sont plus de 2000 à travailler à l’arsenal. C’est aussi une période où les revendications salariales se multiplient.
Je passe sous le pont étroit et traverse la voise ferrée desservant l’usine à Gaz auparavant ravitaillée en coke par voie fluviale. Elle n’a jamais cessé de se transformer, autrefois il y avait les parcs à charbon, d’autres pour les résidus de mâchefer, les fours de fabrication du gaz, les gazomètres de stockage dont un situé rue Monselet, il a été remplacé par des locaux d’EDF-GDF. En 1915 l’usine participe à l’effort de guerre en adaptant un de ses fours au recuit des douilles, la production grimpera jusqu’à 60 000 par jour. Ce sont près de 700 personnes réparties en trois équipes qui y travaillent quotidiennement. Les femmes y travaillent à l’emballage, les caisses transitent entre l’usine à gaz et l’arsenal. Des Nord-Africains, comme on disait, sont recrutés, 25 en 1917 logés dans l’usine, puis cent et ensuite cinquante de plus. Ils sont plus de 2000 à travailler à l’arsenal. C’est aussi une période où les revendications salariales se multiplient.
L’usine était cernée par des murs de schiste rouge, certes moins hauts que ceux de l’arsenal, mais comme lui, c’était un lieu fermé. Je me souviens qu’à un moment de la guerre d’Algérie, ils avaient été surmontés de barbelés et que des soldats montaient la garde aux différents angles. Ces entreprises closes apparaissaient un peu mystérieuses à ceux qui n’y pénétraient pas. Pour moi, cela a été un peu différent, mon père y travaillant comme chef de quart de fabrication, c’était un lieu que je connaissais assez bien. L’usine fonctionnant en continu sept jours sur sept, jeune, voire très jeune, je lui rendais assez souvent visite. Le processus de fabrication du gaz n’avait alors pas trop de secrets pour moi. J’ai depuis un peu oublié les nombreuses explications paternelles, mais les termes de cracking, de délutage me reviennent à l’esprit. Je me rappelle aussi du bâtiment tôlé à plusieurs étages qui abritait les fours de fabrication et de la chaleur qui y régnait. Chaleur donc isolation … à l’amiante, mon père en a payé le prix fort. Ensuite le gaz de Lacq est arrivé par tuyaux, fini les trains traversant la rue. Les fours se sont arrêtés puis plusieurs bâtiments ont été abattus comme la haute cheminée. Aujourd’hui le gaz arrive directement des très lointains sites d’extraction par pipe-line ou par tanker, les gazomètres devenus inutiles ont aussi disparu, seules subsistent les halles qui ont été bien rénovées. Par contre, toute la bande le long de la voie de chemin de fer n’est pas près d’être reconstruite … pollution des sols trop coûteuse à régler.
L’usine était cernée par des murs de schiste rouge, certes moins hauts que ceux de l’arsenal, mais comme lui, c’était un lieu fermé. Je me souviens qu’à un moment de la guerre d’Algérie, ils avaient été surmontés de barbelés et que des soldats montaient la garde aux différents angles. Ces entreprises closes apparaissaient un peu mystérieuses à ceux qui n’y pénétraient pas. Pour moi, cela a été un peu différent, mon père y travaillant comme chef de quart de fabrication, c’était un lieu que je connaissais assez bien. L’usine fonctionnant en continu sept jours sur sept, jeune, voire très jeune, je lui rendais assez souvent visite. Le processus de fabrication du gaz n’avait alors pas trop de secrets pour moi. J’ai depuis un peu oublié les nombreuses explications paternelles, mais les termes de cracking, de délutage me reviennent à l’esprit. Je me rappelle aussi du bâtiment tôlé à plusieurs étages qui abritait les fours de fabrication et de la chaleur qui y régnait. Chaleur donc isolation … à l’amiante, mon père en a payé le prix fort. Ensuite le gaz de Lacq est arrivé par tuyaux, fini les trains traversant la rue. Les fours se sont arrêtés puis plusieurs bâtiments ont été abattus comme la haute cheminée. Aujourd’hui le gaz arrive directement des très lointains sites d’extraction par pipe-line ou par tanker, les gazomètres devenus inutiles ont aussi disparu, seules subsistent les halles qui ont été bien rénovées. Par contre, toute la bande le long de la voie de chemin de fer n’est pas près d’être reconstruite … pollution des sols trop coûteuse à régler.
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