« Bombardement du 17 juin 1940 » : différence entre les versions

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====une catastrophe humaine disproportionnée====
====une catastrophe humaine disproportionnée====


Avaient été atteints d’abord  un train de réfugiés de Lisieux, au niveau de [[Cesson-Sévigné]] à hauteur de Pincepoche et de Bray, faisant 21 victimes, ensuite la gare de triage de la [[plaine de Baud]] où 146 soldats français (203ème et 212ème d’artillerie venant des Flandres), amenés pour défendre le « réduit breton »  mort-né, furent tués ainsi que 156 Anglais du Royal Engineer, dans un train qui aurait dû partir vers Brest à 9h00, enfin la gare de triage de Saint-Hélier où  206 artilleurs du 222ème et du 64ème RALD, la plupart originaires du Midi, trouvent la mort. Avant midi des pompiers, des cheminots et de courageux citoyens se rendirent sur place pour retirer des blessés tandis que des rescapés quittaient ce lieu d’horreur par le moulin de Jouet. À 12H30 la TSF diffusa le discours du maréchal Pétain : « C’est le cœur serré  que je vous dis aujourd’hui qu’il faut cesser le combat… » Malgré l’interdiction du général Bazoches, qui avait constaté la catastrophe du haut du pont Saint-Hélier, et les explosions qui se succèdent pendant 24 heures,  les sauveteurs continuèrent à sortir des corps mutilés, brûlés, racornis, et d’autres intacts, comme pétrifiés. Alors que continuaient des explosions, beaucoup de blessés furent arrachés des flammes par des pompiers héroïques, dont le lieutenant Lebastard, allongés sur le ballast et dans la prairie de la ferme du général Lefort. Bien que très endommagée elle-même, la [[clinique St-Yves]] fut elle-même fort endommagée, tout son personnel, ses religieuses et ses médecins se dépensèrent sans compter pour secourir de leur mieux le flot de blessés qui ne cessait de lui parvenir de la gare, d'autres érant dirigés vers les autres cliniques et l'hôpital de Pontchaillou.  
Avaient été atteints d’abord  un train de réfugiés de Lisieux, au niveau de [[Cesson-Sévigné]] à hauteur de Pincepoche et de Bray, faisant 21 victimes, ensuite la gare de triage de la [[plaine de Baud]] où 146 soldats français (203ème et 212ème d’artillerie venant des Flandres), amenés pour défendre le « réduit breton »  mort-né, furent tués ainsi que 156 Anglais du Royal Engineer, dans un train qui aurait dû partir vers Brest à 9h00, enfin la gare de triage de Saint-Hélier où  206 artilleurs du 222ème et du 64ème RALD, la plupart originaires du Midi, trouvent la mort. Avant midi des pompiers, des cheminots et de courageux citoyens se rendirent sur place pour retirer des blessés tandis que des rescapés quittaient ce lieu d’horreur par le moulin de Jouet. À 12H30 la TSF diffusa le discours du maréchal Pétain : « C’est le cœur serré  que je vous dis aujourd’hui qu’il faut cesser le combat… » Malgré l’interdiction du général Bazoches, qui avait constaté la catastrophe du haut du pont Saint-Hélier, et les explosions qui se succèdent pendant 24 heures,  les sauveteurs continuèrent à sortir des corps mutilés, brûlés, racornis, et d’autres intacts, comme pétrifiés. Alors que continuaient des explosions, beaucoup de blessés furent arrachés des flammes par des pompiers héroïques, dont le lieutenant Lebastard, allongés sur le ballast et dans la prairie de la ferme du général Lefort. Bien que très endommagée elle-même, la [[clinique St-Yves]] fut elle-même fort endommagée, tout son personnel, ses religieuses et ses médecins se dépensèrent sans compter pour secourir de leur mieux le flot de blessés qui ne cessait de lui parvenir de la gare, d'autres étant dirigés vers les autres cliniques et l'hôpital de Pontchaillou.  


Le nombre des victimes, hors de proportion avec l’importance des bombes larguées, vient d’une négligence des services de la gare de Rennes qui, plaine Saint-Hélier, ont laissé le train d’artilleurs contre un train de munitions avec des wagons de cheddite qui, en sautant, ont broyé et enflammé le train voisin, et à Baud, ont mis un train de munitions entre le train des Anglais et celui des artilleurs français. À ces victimes, il faut ajouter quelques civils et militaires tués par éclats ou matériaux projetés. Traumatisée aux deux sens du terme, la ville se vide d'une partie de sa population qui, en voiture, à bicyclette ou à pied prend les routes de l'ouest ou du sud.<ref>  ''Les Heures douloureuses de Rennes'', par V. Ladan. Impr. Les Nouvelles</ref>  Les évacués ont abandonné des bagages et des voitures d'enfant qui seront stockés plus tard à la gare et classés par ordre alphabétique pour une recherche rapide.<ref> 2 photos de ''L'Ouest-Eclair'' du 8 juillet 1940</ref> Quant aux troupes, elles perdent ce qui pouvait leur rester de moral et elles vont se débander.
Le nombre des victimes, hors de proportion avec l’importance des bombes larguées, vient d’une négligence des services de la gare de Rennes ou d'un ordre des autorités militaires qui, plaine Saint-Hélier, ont laissé le train d’artilleurs contre un train de munitions avec des wagons de cheddite qui, en sautant, ont broyé et enflammé le train voisin, et à Baud, ont mis un train de munitions entre le train des Anglais et celui des artilleurs français. À ces victimes, il faut ajouter quelques civils et militaires tués par éclats ou matériaux projetés. Traumatisée aux deux sens du terme, la ville se vide d'une partie de sa population qui, en voiture, à bicyclette ou à pied prend les routes de l'ouest ou du sud.<ref>  ''Les Heures douloureuses de Rennes'', par V. Ladan. Impr. Les Nouvelles</ref>  Les évacués ont abandonné des bagages et des voitures d'enfant qui seront stockés plus tard à la gare et classés par ordre alphabétique pour une recherche rapide.<ref> 2 photos de ''L'Ouest-Eclair'' du 8 juillet 1940</ref> Quant aux troupes, elles perdent ce qui pouvait leur rester de moral et elles vont se débander.


====minimisée par les media locaux, amplifiée par les media extérieurs====
==Le traitement médiatique : minimal localement, maximalisé à l'extérieur==


Le communiqué officiel n°576 du 17 juin au soir ne mentionne pas ce bombardement sur Rennes.
Le communiqué officiel n°576 du 17 juin au soir ne mentionne pas ce bombardement sur Rennes.


Quant à l'information locale et régionale de l'époque, elle sera vague et minimaliste, par censure stratégique le lendemain du drame, par censure politique pendant l'occupation allemande : le quotidien Ouest-Éclair du 18 juin, dernier numéro avant une reprise le 5 juillet, ne comporte quune feuille : en première page,un entrefilet intitulé :
====L'information locale et régionale====
 
A l'époque, l'information sera vague et minimaliste, par censure stratégique le lendemain du drame, par censure politique pendant l'occupation allemande : le quotidien Ouest-Éclair du 18 juin, dernier numéro avant une reprise le 5 juillet, ne comporte qu'une feuille : en première page,un entrefilet intitulé :


''' ''Bombardement aérien dans l'ouest'' '''
''' ''Bombardement aérien dans l'ouest'' '''
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Mais ce bombardement de Rennes prît une proportion d’autant plus exagérée que l’éloignement était plus grand. À Toulouse on lit dans «  La Dépêche » qu’il y a  eu 4500  morts et que l’hôtel de ville de Rennes est détruit. A Beyrouth, où le professeur Burloud est en tournée de conférences, on annonça  20 000 morts !  
Mais ce bombardement de Rennes prît une proportion d’autant plus exagérée que l’éloignement était plus grand. À Toulouse on lit dans «  La Dépêche » qu’il y a  eu 4500  morts et que l’hôtel de ville de Rennes est détruit. A Beyrouth, où le professeur Burloud est en tournée de conférences, on annonça  20 000 morts !  


Dans ''l'Ouest-Éclair'' du 5 juillet, premier numéro à reparaître mais sous censure allemande, on voit, en page 2, sous la rubrique Rennes, "Images de la ville", le marché aux fleurs de la [[place de la République]], une soeur conduisant une carriole "en tournée pour les pauvres", et la toilette classique des rues par des employés avec pelle et arrosoir; en fait divers est relaté un incendie à Noyal-sur-Seiche à la ferme de la Boisardière. Il faut aller en page 3 pour trouver trace de la catastrophe survenue 17 jours plus tôt : la mairie donne la liste des 29 architectes affectés aux constats d'évaluation des dommages aux immeubles d'une trentaine de rues du canton sud-est sinistrées lors de "l'explosion du 17 juin", terme repris un an plus tard dans la presse contôlée par l'occupant. ( '''*''' )Et le journal du 10 juillet publie la liste des noms de 32 hommet et 2 femmes évadés de l'asile de Saint-Méen à l'occasion du bombardement du 17 juin.  
Dans ''l'Ouest-Éclair'' du 5 juillet, premier numéro à reparaître mais sous censure allemande, on voit, en page 2, sous la rubrique Rennes, "Images de la ville", le marché aux fleurs de la [[place de la République]], une soeur conduisant une carriole "en tournée pour les pauvres", et la toilette classique des rues par des employés avec pelle et arrosoir; en fait divers est relaté un incendie à Noyal-sur-Seiche à la ferme de la Boisardière. Il faut aller en page 3 pour trouver trace de la catastrophe survenue 17 jours plus tôt : la mairie donne la liste des 29 architectes affectés aux constats d'évaluation des dommages aux immeubles d'une trentaine de rues du canton sud-est sinistrées lors de "l'explosion du 17 juin", terme repris un an plus tard dans la presse contôlée par l'occupant. ( '''*''' )Et le journal du 10 juillet publie la liste des noms de 32 hommet et 2 femmes évadés de l'asile de Saint-Méen à l'occasion du bombardement du 17 juin.


====Des communiqués allemands laconiques====
Un document des Bundesarchiv indique : " De jour, mention de combat car hier, malgré une situation météorologique pénalisante, un bombardement du III/KG 76 sur la gare de Rennes dans la matinée a eu un effet foudroyant."


En septembre, le docteur Patay recevra une mission d’officier d’état civil militaire bénévole avec des crédits pour l’exhumation, l’identification, la mise en bière et la ré-inhumation au cimetière de l’est des corps provisoirement mis en fosses communes le long des voies ferrées : prairie de Saint-Hélier, plaine de Baud et passage à niveau de Bray, en Cesson... 805 corps sont mis en bière, sans qu’on puisse compter les corps broyés, calcinés et démembrés, et des blessés graves retirés qui mourront ultérieurement. On peut estimer le nombre des morts à un millier, chiffre épouvantable, mais la moitié du chiffre 2000, lequel est encore couramment repris et cité.
Le 18 juin, le communiqué du haut commandement de la Wehrmacht ( "''Das Oberkommando der Wehrmacht gibt bekannt''..." et celui de la Luftwaffe signalent qu' "un bombardement aérien a été couronné de succès sur des trains de transports, de munitions et de matériels industriels en gare de Rennes embouteillée. Des trains sautèrent en l'air dans de violentes explosions, déclenchant une panique monstre parmi les troupes".


====des communiqués allemands laconiques====


Un document des Bundesarchiv indique : " De jour, mention de combat car hier, malgré une situation météorologique pénalisante, un bombardement du III/KG 76 sur la gare de Rennes dans la matinée a eu un effet foudroyant."
== Une pénible mission de réinhumation==


Le 18 juin, le communiqué du haut commandement de la Wehrmacht ( "''Das Oberkommando der Wehrmacht gibt bekannt''..." et celui de la Luftwaffe signalent qu' "un bombardement aérien a été couronné de succès sur des trains de transports, de munitions et de matériels industriels en gare de Rennes embouteillée. Des trains sautèrent en l'air dans de violentes explosions, déclenchant une panique monstre parmi les troupes".
En septembre, le docteur Patay recevra une mission d’officier d’état civil militaire bénévole avec des crédits pour l’exhumation, l’identification, la mise en bière et la ré-inhumation au cimetière de l’est des corps provisoirement mis en fosses communes le long des voies ferrées : prairie de Saint-Hélier, plaine de Baud et passage à niveau de Bray, en Cesson... " ''Dès le début de septembre nous attaquons le plus urgent, à savoir les fosses communes de la prairie Saint-Hélier. C'est un travail épouvantable car les corps, très déchiquetés par l'explosion des wagons de cheddite, ont été ensevelis pêle-mêle par un temps très orageux<; <ils sont en pleine décomposition et il faut avoir le coeur bien accroché pour les fouiller et les examiner en vue de leur identification. [...] Notre travail est compliqué par le fait qu'en raison de la chaleur étouffante qui régnait ce matin du 17 juin,la plupart des hommes avaient tiré la veste et n'avaient donc plus de papiers sur eux''."  805 corps sont mis en bière, sans qu’on puisse compter les corps broyés, calcinés et démembrés, et des blessés graves retirés qui mourront ultérieurement. On peut estimer le nombre des morts à un millier, chiffre épouvantable, mais la moitié du chiffre 2000, lequel est encore couramment repris et cité.




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