« Bombardement du 17 juin 1940 » : différence entre les versions

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== 16 juin, un étrange dimanche dans Rennes encombrée ==
== 16 juin, un étrange dimanche dans Rennes encombrée ==


Le dimanche 16 juin 1940, le journal l'''Ouest-Eclair'' publie en première page un article rassurant sur l'efficacité de « nos bombardiers contre « leurs » chars : ils se comptèrent avec des rires et partirent pour la troisième fois. ». En page 3, sous la rubrique Rennes, un article « circulation et cartes d'identité » indique que, vu l'afflux, [[quai Emile Zola]], où une photo montre la foule des demandeurs de la carte d'identité nécessaire pour circuler sur les routes et en chemin de fer, un second bureau est ouvert au 40 [[rue Vasselot]] à l'école de Préapprentissage. On lit aussi que, sur ordre de l'autorité militaire, les communications téléphoniques émanant des cafés, hôtels et restaurants sont supprimées et il est interdit de servir les clients aux terrasses. Il est aussi rappelé aux membres de la défense passive de Rennes qu'ils ne doivent sous aucun prétexte quitter la ville<ref>L'Ouest-Eclair, 16 juin 1940, [http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k662019z lire en ligne]</ref>.
Le dimanche 16 juin 1940, le journal l'''Ouest-Eclair'' publie en première page un article rassurant sur l'efficacité de « nos bombardiers contre « leurs » chars : ils se comptèrent avec des rires et partirent pour la troisième fois. ». En page 3, sous la rubrique Rennes, un article « circulation et cartes d'identité » indique que, vu l'afflux, [[quai Emile Zola]], où une photo montre la foule des demandeurs de la carte d'identité nécessaire pour circuler sur les routes et en chemin de fer, un second bureau est ouvert au 40 [[rue Vasselot]] à l'école de Préapprentissage. On lit aussi que, sur ordre de l'autorité militaire, les communications téléphoniques émanant des cafés, hôtels et restaurants sont supprimées et il est interdit de servir les clients aux terrasses. Il est aussi rappelé aux membres de la défense passive de Rennes qu'ils ne doivent sous aucun prétexte quitter la ville<ref> L'Ouest-Eclair, 16 juin 1940, [http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k662019z lire en ligne]</ref>.


Les Rennais − qui avaient été surpris, le 24 février, par le premier exercice d'alerte − et les nombreux réfugiés ont entendu des tirs de la D.C.A dans le ciel de Rennes tout bleu, probablement pensera-t-on ensuite, sur un avion allemand venu repérer le triage ferroviaire de la [[plaine de Baud]] avec les trains qui y stationnaient nombreux. En fin d'après-midi, encore quelques trains de troupes françaises et britanniques se succèdent après avoir stationné sur la voie ferrée, du côté du [[boulevard Voltaire]], attendant d'entrer en gare.
Les Rennais − qui avaient été surpris, le 24 février, par le premier exercice d'alerte − et les nombreux réfugiés ont entendu des tirs de la D.C.A dans le ciel de Rennes tout bleu, probablement pensera-t-on ensuite, sur un avion allemand venu repérer le triage ferroviaire de la [[plaine de Baud]] avec les trains qui y stationnaient nombreux. En fin d'après-midi, encore quelques trains de troupes françaises et britanniques se succèdent après avoir stationné sur la voie ferrée, du côté du [[boulevard Voltaire]], attendant d'entrer en gare.
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Des écoliers rennais avaient pu être sensibilisés à la fin de 1939 par un petit fascicule intitulé « Alerte aux avions », illustré par Marcel Jeanjean, dont la couverture représentait un guetteur signalant l'arrivée d'un avion ennemi qui avait tout l'air d'un bombardier Dornier. Une semaine avant le bombardement, en regardant leur hebdomadaire ''Pierrot'', ils avaient pu voir, sur une des pages intitulées "Apprenez à reconnaître les avions ennemis", en n° 15, un dessin du même illustrateur, présentant le Dornier Do-17 qu'il disait surclassé par les avions de chasse alliés<ref>''Pierrot'', "le journal des jeunes", p. 7 - 9 juin 1940</ref>. Mais, ce matin du 17 juin, il n'y avait pas d'avions de chasse alliés dans le ciel rennais.
Des écoliers rennais avaient pu être sensibilisés à la fin de 1939 par un petit fascicule intitulé « Alerte aux avions », illustré par Marcel Jeanjean, dont la couverture représentait un guetteur signalant l'arrivée d'un avion ennemi qui avait tout l'air d'un bombardier Dornier. Une semaine avant le bombardement, en regardant leur hebdomadaire ''Pierrot'', ils avaient pu voir, sur une des pages intitulées "Apprenez à reconnaître les avions ennemis", en n° 15, un dessin du même illustrateur, présentant le Dornier Do-17 qu'il disait surclassé par les avions de chasse alliés<ref>''Pierrot'', "le journal des jeunes", p. 7 - 9 juin 1940</ref>. Mais, ce matin du 17 juin, il n'y avait pas d'avions de chasse alliés dans le ciel rennais.


Le Rennais qui a acheté le journal ce lundi matin n'a en mains qu'une seule feuille, au lieu de quatre la veille. Décidément même le journal... plus rien ne marche... Mais il va encore faire beau, voire chaud. La première page titre : '''Le maréchal Pétain, président du Conseil, le général Weygand, vice-président''' et un titre plus petit annonce '''''la RAF au dessus de l'Allemagne''''', mais en lisant l'article il constate aussi qu'elle opère au sud de la Seine... Et une autre annonce : "Paris reste digne sous l'occupation allemande". Au verso, peu de nouvelles locales, sinon le cadavre d'une ivrogne trouvé dans un champ de blé à [[Cesson-Sévigné]], un tapage nocturne la veille et deux personnes renversées par des autos, une collision entre une auto et un tramway à vapeur, au pont des Trois-Croix. On met en garde contre l'état du pont dans les jardins Saint-Martin, au bas de la Fosse-Courbée. La population est invitée à économiser le gaz pour ménager les approvisionnements en charbon de l'[[Usine à gaz]]. Deux communiqués de l'Université de Rennes : "en raison de la difficulté des communications" les examens du baccalauréat sont différés. Pour la Faculté de Droit, les examens, qui ne devaient concerner que les étudiants de Rennes et de Lille, sont ouverts à tous à la faculté des Lettres, [[place Hoche]] et au Palais de Justice<ref>''L'Ouest-Éclair'' des, 16 et 17 juin 1940</ref>.
Le Rennais qui a acheté le journal ce lundi matin n'a en mains qu'une seule feuille, au lieu de quatre la veille. Décidément même le journal... plus rien ne marche... Mais il va encore faire beau, voire chaud. La première page titre : '''Le maréchal Pétain, président du Conseil, le général Weygand, vice-président''' et un titre plus petit annonce '''''la RAF au dessus de l'Allemagne''''', mais en lisant l'article il constate aussi qu'elle opère au sud de la Seine... Et une autre annonce : "Paris reste digne sous l'occupation allemande". Au verso, peu de nouvelles locales, sinon le cadavre d'une ivrogne trouvé dans un champ de blé à [[Cesson-Sévigné]], un tapage nocturne la veille et deux personnes renversées par des autos, une collision entre une auto et un tramway à vapeur, au pont des Trois-Croix. On met en garde contre l'état du pont dans les [[Prairies Saint-Martin]], au bas de la Fosse-Courbée. La population est invitée à économiser le gaz pour ménager les approvisionnements en charbon de l'[[Usine à gaz]]. Deux communiqués de l'Université de Rennes : "en raison de la difficulté des communications" les examens du baccalauréat sont différés. Pour la Faculté de Droit, les examens, qui ne devaient concerner que les étudiants de Rennes et de Lille, sont ouverts à tous à la faculté des Lettres, [[place Hoche]] et au Palais de Justice<ref>''L'Ouest-Éclair'' des, 16 et 17 juin 1940</ref>.


==Soudain, le bombardement==
==Soudain, le bombardement==
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[[Fichier:Voies_triage_17_06_1940.png|300px|center|thumb|Les voies de triage dévastées où fument les wagons déchiquetés <ref> Die Deusche Wochenschau Juli 1940. Actualités cinématographiques allemandes</ref>]]
[[Fichier:Voies_triage_17_06_1940.png|300px|center|thumb|Les voies de triage dévastées où fument les wagons déchiquetés <ref> Die Deusche Wochenschau Juli 1940. Actualités cinématographiques allemandes</ref>]]
[[Fichier:17_juin_1940.png|300px|center|thumb|"Des hommes du génie des chemins de fer allemands vont procéder à la remise en état".<ref> Die Deusche Wochenschau Juli 1940. Actualités cinématographiques allemandes</ref>]]
[[Fichier:17_juin_1940.png|300px|center|thumb|"Des hommes du génie des chemins de fer allemands vont procéder à la remise en état".<ref> Die Deusche Wochenschau Juli 1940. Actualités cinématographiques allemandes</ref>]]
Le nombre des victimes, hors de proportion avec l’importance des bombes larguées, vient d’une négligence des services de la gare de Rennes ou d'un ordre des autorités militaires qui, plaine Saint-Hélier, ont laissé le train d’artilleurs contre un train de munitions avec des wagons de cheddite qui, en sautant, ont broyé et enflammé les trains voisins et les corps ont été très déchiquetés par l'explosion des wagons <ref> ''Mémoires d'un Français moyen''. René Patay - polycopié p. 134 - 1974 </ref>, et à Baud, ont mis un train de munitions entre le train des Anglais et celui des artilleurs français. À ces victimes, il faut ajouter quelques civils et militaires tués par éclats ou matériaux projetés. Ce sont donc bien deux trains de munitions qui stationnaient sur le triage de Rennes. Traumatisée aux deux sens du terme, la ville se vide d'une partie de sa population qui, en voiture, à bicyclette ou à pied prend les routes de l'ouest ou du sud<ref>''Les Heures douloureuses de Rennes'', par V. Ladan. Impr. Les Nouvelles</ref>. Les évacués ont abandonné des bagages et des voitures d'enfant qui seront stockés plus tard à la gare et classés par ordre alphabétique pour une recherche rapide<ref>Deux photos de ''L'Ouest-Éclair'' du 8 juillet 1940</ref>. Quant aux troupes, elles perdent ce qui pouvait leur rester de moral et elles vont se débander. 34 personnes s'évadèrent de l'asile psychiatrique de Saint-Méen et étaient encore recherchées le 10 juillet.
Le nombre des victimes, hors de proportion avec l’importance des bombes larguées, vient d’une négligence des services de la gare de Rennes ou d'un ordre des autorités militaires qui, plaine Saint-Hélier, ont laissé le train d’artilleurs contre un train de munitions avec des wagons de cheddite qui, en sautant, ont broyé et enflammé les trains voisins et les corps ont été très déchiquetés par l'explosion des wagons <ref> ''Mémoires d'un Français moyen''. René Patay - polycopié p. 134 - 1974 </ref>, et à Baud, ont mis un train de munitions entre le train des Anglais et celui des artilleurs français. À ces victimes, il faut ajouter quelques civils et militaires tués par éclats ou matériaux projetés. Ce sont donc bien deux trains de munitions qui stationnaient sur le triage de Rennes. Traumatisée aux deux sens du terme, la ville se vide d'une partie de sa population qui, en voiture, à bicyclette ou à pied prend les routes de l'ouest ou du sud<ref>''Les Heures douloureuses de Rennes'', par V. Ladan. Impr. Les Nouvelles</ref>. Les évacués ont abandonné des bagages et des voitures d'enfant qui seront stockés plus tard à la gare et classés par ordre alphabétique pour une recherche rapide<ref>Deux photos de ''L'Ouest-Éclair'' du 8 juillet 1940</ref>. Quant aux troupes, elles perdent ce qui pouvait leur rester de moral et elles vont se débander. Des officiers sont vus jeter leur revolvers, aux Trois-Croix, à plusieurs kilomètres des explosions et au bois des Ormes, des officiers français et britanniques qui y avaient caché , depuis plusieurs semaines, des voitures Peugeot et Citroën réquisitionnées, les prirent pour fuir vers des ports de la côte sud bretonne, pour tenter d’échapper à l’invasion ou rallier l'Angleterre. 34 personnes s'évadèrent de l'asile psychiatrique de Saint-Méen et étaient encore recherchées le 10 juillet.


[[Fichier:Prairie_devant_St_helier_juin_1940.jpeg|thumb|En bordure du triage, un train détruit et renversé par l'explosion au bas du remblai, avec débris sur les prairies de la Motte Baril. Au fond, le couvent de la Solitude et l'église Saint-Hélier au dessus de laquelle on aperçoit un peu des superstructures de la brasserie Graff. Photo de Robert Caillard.]]
[[Fichier:Prairie_devant_St_helier_juin_1940.jpeg|thumb|En bordure du triage, un train détruit et renversé par l'explosion au bas du remblai, avec débris sur les prairies de la Motte Baril. Au fond, le couvent de la Solitude et l'église Saint-Hélier au dessus de laquelle on aperçoit un peu des superstructures de la brasserie Graff. Photo de Robert Caillard.]]
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===Liens directs===
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* [[Bombardement du 17 juin 1940 : témoignages]]
* [[Bombardement du 17 juin 1940 : témoignages]] : '''des témoignages étonnants !'''


* [[Défense passive, ou "D.P."]]
* [[Défense passive, ou "D.P."]]
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