« La mort mystérieuse de l'amiral de Villeneuve » : différence entre les versions

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Sur la ''place aux Arbres'',<ref>[[Place de la Mairie]]</ref> de jeunes Rennais se détournaient vers ces deux étrangers, un homme à la mine distinguée et tristre et un noir, qui se promenaient en silence.
Sur la ''place aux Arbres'',<ref>[[Place de la Mairie]]</ref> de jeunes Rennais se détournaient vers ces deux étrangers, un homme à la mine distinguée et tristre et un noir, qui se promenaient en silence.
Le 21 avril dans la soirée, son valet noir, Jean-Baptiste Bacquè, lui remit une lettre épaisse scellée de cire rouge, lettre dont la lecture le troubla puis il demanda du papier et écrivit une lettre à sa femme. "Au moment où tu recevras cette lettre, ton mari ne vivra plus" lira-t-elle. Le 22 avril, vers dix-sept heures, en rentrant à l’hôtel, le domestique au retour d'une sortie en ville frappe à la porte de la chambre; pas de réponse. Peut-être l’amiral est-il sorti ? Bacqué revient un peu plus tard, frappe de nouveau; toujours pas de réponse.
Le 21 avril dans la soirée, son valet noir, Jean-Baptiste Bacquè, lui remit une lettre épaisse scellée de cire rouge, lettre dont la lecture le troubla puis il demanda du papier et écrivit une lettre à sa femme. "Au moment où tu recevras cette lettre, ton mari ne vivra plus" lira-t-elle. Le 22 avril, vers dix-sept heures, en rentrant à l’hôtel, le domestique au retour d'une sortie en ville frappe à la porte de la chambre; pas de réponse. Peut-être l’amiral est-il sorti ? Bacqué revient un peu plus tard, frappe de nouveau; toujours pas de réponse.
La nuit venue, le domestique s’inquiète de ce silence car personne n’a vu sortir l’amiral. Il décide de prévenir l’hôtelier et tous deux montent à l’étage, à la lumière d’une chandelle. Ils frappent encore une fois en vain. Examinant de près la serrure, ils observent  que la clé était sur la porte, à l’intérieur. L’amiral s’est donc enfermé et, peut- être, a-t-il été pris de malaise, ce qui explique sans doute son silence. Néanmoins ils n’osent enfoncer la porte et alertent la police qui dépêche deux commissaires, Alexandre Bacon et Noël-Vincent Bart, qui arrivent b accompagnés d’un serrurier. Faute d'obtenir de réponse,  les policiers font forcer la serrure.
La nuit venue, le domestique s’inquiète de ce silence car personne n’a vu sortir l’amiral. Il décide de prévenir l’hôtelier et tous deux montent à l’étage, à la lumière d’une chandelle. Ils frappent encore une fois en vain. Examinant de près la serrure, ils observent  que la clé était sur la porte, à l’intérieur. L’amiral s’est donc enfermé et, peut-être, a-t-il été pris de malaise, ce qui explique sans doute son silence. Néanmoins ils n’osent enfoncer la porte et alertent la police qui dépêche deux commissaires, Alexandre Bacon et Noël-Vincent Bart, qui arrivent accompagnés d’un serrurier. Faute d'obtenir de réponse,  les policiers font forcer la serrure.


La chambre est vide, le lit n’a pas été défait. Sur la table, des papiers, ainsi que deux portefeuilles de maroquin rouge disposés en évidence.
La chambre est vide, le lit n’a pas été défait. Sur la table, des papiers, ainsi que deux portefeuilles de maroquin rouge disposés en évidence.
L’un des commissaires pousse alors la porte du cabinet de toilette: Villeneuve gît sur le dos, les bras sur le carrelage. Il porte un pantalon de drap bleu et des bottes,  son torse est dégagé jusqu’à la ceinture, dans un gilet de flanelle sans manches, largement échancré sur le devant. La poitrine est inondée de sang :  un manche noir  est planté sous le sein gauche car toute la  lame d'un couteau de table a pénétré. <ref> ''Ce jour là 22 avril 1806 : la mort de l’amiral Pierre-Charles de Villeneuve, suicide ou assassinat ?'' Napoléon. Histoire du Consulat et de l'Empire Robert Ouvrard – Cori Hauer -mai 2018</ref>
L’un des commissaires pousse alors la porte du cabinet de toilette: Villeneuve gît sur le dos, les bras sur le carrelage. Il porte un pantalon de drap bleu et des bottes,  son torse est dégagé jusqu’à la ceinture, dans un gilet de flanelle sans manches, largement échancré sur le devant. La poitrine est inondée de sang :  un manche noir  est planté sous le sein gauche car toute la  lame d'un couteau de table a pénétré. <ref> ''Ce jour là 22 avril 1806 : la mort de l’amiral Pierre-Charles de Villeneuve, suicide ou assassinat ?'' Napoléon. Histoire du Consulat et de l'Empire Robert Ouvrard – Cori Hauer -mai 2018</ref>


Ce serait donc un suicide, car  Villeneuve a envoyé une lettre à son épouse :  
Ce serait donc un suicide, car  Villeneuve a rédigé une lettre à son épouse :  


''Ma tendre amie,
''Ma tendre amie,
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Le vice-amiral aurait lu le soir même un ouvrage anglais, intitulé ''The Heart'' (''Le cœur'') donnant toutes indications sur la façon d'atteindre l'organe<ref>''La mort de l'amiral de Villeneuve''. A. V. La revue française. Vol. 4 - Hoskin & Snowden. New-York - 1835</ref>. Divers écrits, contradictoires, voire de fabulation, font pencher vers le suicide ou l'assassinat car <ref>[http://www.histoire-empire.org/marine/la_mort_de_villeneuve.htm La mort de Villeneuve], sur le site Histoire Empire</ref>.  L'enquête menée par la police de Fouché conclue à un suicide, confirmé par le docteur O'Meara, médecin à Sainte-Hélène de Napoléon qui lui confiera :" J'ai donné l'ordre à Villeneuve de rester à Rennes, il s'y est renseigné sur l'anatomie et s'est piqué d'une stylet vers le coeur". On peut toutefois s'étonner  de propos que l'Empereur aurait tenus rapportés par O'Meara faisant état d'une épingle : ''Villeneuve, lorsqu’il fut fait prisonnier par les Britanniques, fut tellement affligé de sa défaite qu’il étudia l’anatomie pour se détruire lui-même. À cet effet, il acheta plusieurs gravures anatomiques du cœur, et les compara avec son propre corps, pour s’assurer exactement de la position de cet organe. Lors de son arrivée en France, je lui ordonnai de rester à Rennes et de ne pas venir à Paris. Villeneuve craignant d’être jugé par un conseil de guerre, pour avoir désobéi à mes ordres, et conséquemment avoir perdu la flotte (car je lui avais ordonné de ne pas mettre à la voile et de ne pas s’engager avec les Britanniques), résolut de se détruire. En conséquence, il prit ses gravures du cœur, les compara de nouveau avec sa poitrine, fit exactement au centre de la gravure une longue piqûre avec une longue épingle, fixa ensuite cette épingle, autant que possible, à la même place, contre sa poitrine, l’enfonça jusqu’à la tête qui pénétra le cœur et  il expira. Lorsque l'on ouvrit sa chambre, on le trouva mort ; l’épingle était dans sa poitrine, et la marque faite dans la gravure correspondait à la blessure de son sein. Il n’aurait pas dû agir ainsi, c’était un brave, bien qu’il n’eût aucun talent. »'' <ref>"''Napoleon in exile; or, A voice from St. Helena. The opinions and reflections of Napoleon on the most important events of his life and government in his own words'' " O'Meara Ed. Simpkin & Marshall London - 1822)</ref>
Le vice-amiral aurait lu le soir même un ouvrage anglais, intitulé ''The Heart'' (''Le cœur'') donnant toutes indications sur la façon d'atteindre l'organe<ref>''La mort de l'amiral de Villeneuve''. A. V. La revue française. Vol. 4 - Hoskin & Snowden. New-York - 1835</ref>. Divers écrits, contradictoires, voire de fabulation, font pencher vers le suicide ou l'assassinat car <ref>[http://www.histoire-empire.org/marine/la_mort_de_villeneuve.htm La mort de Villeneuve], sur le site Histoire Empire</ref>.  L'enquête menée par la police de Fouché conclue à un suicide, confirmé par le docteur O'Meara, médecin à Sainte-Hélène de Napoléon qui lui confiera :" J'ai donné l'ordre à Villeneuve de rester à Rennes, il s'y est renseigné sur l'anatomie et s'est piqué d'une stylet vers le coeur". On peut toutefois s'étonner  de propos que l'Empereur aurait tenus rapportés par O'Meara faisant état d'une épingle : ''Villeneuve, lorsqu’il fut fait prisonnier par les Britanniques, fut tellement affligé de sa défaite qu’il étudia l’anatomie pour se détruire lui-même. À cet effet, il acheta plusieurs gravures anatomiques du cœur, et les compara avec son propre corps, pour s’assurer exactement de la position de cet organe. Lors de son arrivée en France, je lui ordonnai de rester à Rennes et de ne pas venir à Paris. Villeneuve craignant d’être jugé par un conseil de guerre, pour avoir désobéi à mes ordres, et conséquemment avoir perdu la flotte (car je lui avais ordonné de ne pas mettre à la voile et de ne pas s’engager avec les Britanniques), résolut de se détruire. En conséquence, il prit ses gravures du cœur, les compara de nouveau avec sa poitrine, fit exactement au centre de la gravure une longue piqûre avec une longue épingle, fixa ensuite cette épingle, autant que possible, à la même place, contre sa poitrine, l’enfonça jusqu’à la tête qui pénétra le cœur et  il expira. Lorsque l'on ouvrit sa chambre, on le trouva mort ; l’épingle était dans sa poitrine, et la marque faite dans la gravure correspondait à la blessure de son sein. Il n’aurait pas dû agir ainsi, c’était un brave, bien qu’il n’eût aucun talent. »'' <ref>"''Napoleon in exile; or, A voice from St. Helena. The opinions and reflections of Napoleon on the most important events of his life and government in his own words'' " O'Meara Ed. Simpkin & Marshall London - 1822)</ref>


Mais le rapport de police fait état de six coups de couteau. Il est difficile d'admettre qu'une personne voulant se suicider se donne six coups de couteau dans la poitrine. L’un des enquêteurs, François Martin, magistrat de sûreté pour l’arrondissement de Rennes,  prescrivit logiquement l’ouverture d’une enquête : ''ayant été instruit que cette mort est le résultat de plusieurs coups de couteau : que, dans pareille circonstance, il est nécessaire d’épuiser toutes les preuves pour connaître parfaitement les causes ou les auteurs d’un pareil événement, nous avons rendu plainte d’office contre tous auteurs, fauteurs ou complices de ce meurtre.''  Martin n'est pas Fouché et la thèse du suicide prévaudra.
Mais le rapport de police fait état de six coups de couteau. Deux policiers les ont constatés. Il est difficile d'admettre qu'une personne voulant se suicider se donne six coups de couteau dans la poitrine. L’un des enquêteurs, François Martin, magistrat de sûreté pour l’arrondissement de Rennes,  prescrivit logiquement l’ouverture d’une enquête : ''ayant été instruit que cette mort est le résultat de plusieurs coups de couteau : que, dans pareille circonstance, il est nécessaire d’épuiser toutes les preuves pour connaître parfaitement les causes ou les auteurs d’un pareil événement, nous avons rendu plainte d’office contre tous auteurs, fauteurs ou complices de ce meurtre.''  Martin n'est pas Fouché et la thèse du suicide prévaudra.


Les obsèques de première classe eurent lieu à l'[[église Saint-Germain]] et la ville de Rennes lui fit des funérailles pompeuses : un somptueux catafalque reçut le cercueil escorté par la troupe en armes et par les corps constitués au son d'une musique funèbre et suivi d'une grande foule. On peut donc s'étonner qu'on n'ait jamais su où il fut inhumé : au cimetière du nord ou dans un des petits cimetières paroissiaux qui existaient encore ? Le nom ''Villeneuve'' est gravé sur la 13e colonne du pilier est de l'Arc de Triomphe.
Les obsèques de première classe eurent lieu à l'[[église Saint-Germain]] et la ville de Rennes lui fit des funérailles pompeuses : un somptueux catafalque reçut le cercueil escorté par la troupe en armes et par les corps constitués au son d'une musique funèbre et suivi d'une grande foule. On peut donc s'étonner qu'on n'ait jamais su où il fut inhumé : au cimetière du nord ou dans un des petits cimetières paroissiaux qui existaient encore ? Le nom ''Villeneuve'' est gravé sur la 13e colonne du pilier est de l'Arc de Triomphe.


[[Catégorie:Faits divers|Mort]]
[[Catégorie:Faits divers|Mort]]
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