« La peste à Rennes » : différence entre les versions

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== La "mort noire", épidémie récurrente==
La peste, bubonique ou pulmonaire, la "mort noire", sévit plusieurs fois à Rennes au XVIe et au XVIIe siècle. Dès 1505 , [[Anne de Bretagne]], lors d'un Tro Breizh, avait évité Rennes par crainte d'une épidémie de peste. On la constate en 1563-1564. Dès 1632 on avait construit  à Rennes, au lieu-dit ''La Croix-Rocheraud'' , un établissement destiné exclusivement aux mendiants pestiférés, sous le nom d'hôpital de la Santé. Auparavant ils étaient reçus à Saint-Yves et les morts inhumés dans un terrain appartenant à l'hôpital, près d'une croix Rocheraud. <ref> ''Histoire de Rennes,'' p.244, Émile Ducrest de Villeneuve et D. Maillet. Edouard Morault, libraire. Rennes - 1845 </ref>  Pendant les décennies qui
suivirent 1563, la peste qui n'avait plus fait parler d'elle depuis l'épidémie
de 1507-1509 allait sévir à l'état endémique, avec des accalmies de quelques
années séparées par de mortelles recrudescences  en 1582-1585, de 1588 à 1602, en 1605, de 1607 à 1617, de 1622 à 1627, en 1628, de 1629 à 1634, en 1636-1637 et une dernière fois en 1640.
[[File:Black Death.jpg|right|thumb|300px|Illustration publiée sur une Bible allemande datant de 1411]]
[[File:Black Death.jpg|right|thumb|300px|Illustration publiée sur une Bible allemande datant de 1411]]
== La "mort noire", épidémie récurrente==
La peste, bubonique ou pulmonaire, la "mort noire", sévit plusieurs fois à Rennes au XVIe et au XVIIe siècle. On la constate en 1563-1564, en 1582-1585, de 1588 à 1602, en 1605, de 1607 à 1617, de 1622 à 1627, en 1628, de 1629 à 1634, en 1636-1637 et une dernière fois en 1640. Mais l'on donne alors ce nom à diverses maladies épidémiques.<ref>''La peste à Rennes de 1563 à 1640'', par L. Delourmel. Bulletin et mémoires de la Société archéologique d'Ille-et-Vilaine, vol. XXVI - 1897</ref> A l'emplacement de la [[rue de l'Arsenal]], dès 1546, François Thierry de Boisorcant avait donné une maison et un jardin destinés à accueillir les malades atteints de la peste que l'[[hôpital Saint-Yves]] ne pouvait recevoir. En [[1597]], à la suite de mauvaises récoltes, une grande famine s'installe dans la campagne rennaise. Les paysans viennent chercher aide et nourriture en ville. Le sergent général de la police, Regnard, publie un arrêté qui interdit l'entrée en ville des pauvres gens pour mendier et chercher l'aumône, car on craint les risques d'épidémies de peste ou autres maladies.


A chaque poussée, c'était la même
panique : "le Parlement quittait Rennes pour une ville moins atteinte dans
les environs, et on prenait quelques mesures d'hygiène qui devaient être
périodiquement renouvelées : curage des fossés, évacuation des prisons
encombrées, interdiction de laisser les pourceaux errer dans les rues sous
peine de confiscation au profit de l'Hôtel-Dieu, fermeture des écoles et des
tavernes, sanctions contre les malades s'échappant de leurs maisons cadenassées,
expulsion des marchands ambulants, on défend les rassemblements,
on défend de tirer le Papegaut, on défend les représentations des Mystères
à peine d'emprisonnement des comédiens, etc. Puis la mortalité diminuait,
le Parlement revenait, les Jésuites rouvraient leur collège de Toussaints,
jusqu'à la prochaine alerte". Lors de la peste de 1605, 500 personnes furent hospitalisées dans de
nouveaux bâtiments à la Croix-Rocheron mais dans l'intervalle des épidémies, le
Sanitat servait d'asile aux vieillards et aux mendiants. Des médecins et
chirurgiens supplémentaires durent être engagés.
Grâce à la générosité du prévôt Pierre Alleaume, le bâtiment sud
de l'Hôtel-Dieu Saint-Yves <ref>[[Hôpital Saint-Yves]]</ref> fut rénové en 1617-1620, et un autre
construit à l'est ; et les échevins suivant cet exemple firent édifier
d'autres salles à l'ouest, au long de la ''rue du Port-Saint-Yves''. L'ensemble
représentait, en 1636, un quadrilatère d'environ 40 m de côté, et
220 malades y trouvaient place.  <ref>''Histoire des hôpitaux de Rennes'' par le Professeur J.-C. Sournia. BIU Santé - 1969 </ref> Le 29 juillet 1624, on annula la distribution des prix au collège des jésuites.
Pendant huit ans, de 1624 à 1632, la peste ravage Rennes. Elle se manifestait par des "bosses", de gros bubons  qui noircissaient et pourrissaient, décomposant le sang. On éventait et on désinfectait les maisons par de grands feux pour chasser le "mauvais air". Toutes les classes de la société furent touchées par le mal. En 1626, le corps de  police des magistrats et bourgeois prend des arrêtés souvent draconiens pour  prévenir la contagion. On enjoint à une femme de chambre de sortir dans la journée en emportant les hardes de sa maîtresse morte de la peste, sous peine du fouet. On défend à la veuve d'un pelletier de toucher à ses vieilles hardes et de les éventer, sous peine de mort. On ferme de cadenas la maison d'un mort et, ceux-ci ayant été forcés par des voleurs qui se sont emparés d'objets infestés, on en rend responsables les voisins. On interdit aux habitants de paroisses infestées l'accès à la ville. Vitré accueillera la réunion des Etats de Bretagne, Rennes étant touchée par la peste.<ref> ''Rennes moderne'', par A. Marteville, vol. 2 - 1849</ref>  En 1627 une procession générale fut renouvelée pendant trois jours, la communauté en habits de cérémonies ainsi que tous les corps judiciaires et militaires.<ref> ''Histoire de Rennes,'' p.310, Émile Ducrest de Villeneuve et D. Maillet. Edouard Morault, libraire. Rennes - 1845 </ref> 


Pendant huit ans, de 1624 à 1632, la peste ravage Rennes. Elle se manifestait par des "bosses", de gros bubons  qui noircissaient et pourrissaient, décomposant le sang. On éventait et on désinfectait les maisons par de grands feux pour chasser le "mauvais air". Toutes les classes de la société furent touchées par le mal. En 1626, le corps de police des magistrats et bourgeois prend des arrêtés souvent draconiens pour  prévenir la contagion. On enjoint à une femme de chambre de sortir dans la journée en emportant les hardes de sa maîtresse morte de la peste, sous peine du fouet. On défend à la veuve d'un pelletier de toucher à ses vieilles hardes et de les éventer, sous peine de mort. On ferme de cadenas la maison d'un mort et, ceux-ci ayant été forcés par des voleurs qui se sont emparés d'objets infestés, on en rend responsables les voisins. On interdit aux habitants de paroisses infestées l'accès à la ville. Vitré accueillera la réunion des Etats de Bretagne, Rennes étant touchée par la peste.<ref> ''Rennes moderne'', par A. Marteville, vol. 2 - 1849</ref>
Mais l'on donne alors ce nom à diverses maladies épidémiques.<ref>''La peste à Rennes de 1563 à 1640'', par L. Delourmel. Bulletin et mémoires de la Société archéologique d'Ille-et-Vilaine, vol. XXVI - 1897</ref> A l'emplacement de la [[rue de l'Arsenal]], dès 1546, François Thierry de Boisorcant avait donné une maison et un jardin destinés à accueillir les malades atteints de la peste que l'hôpital Saint-Yves <ref> [[Clinique Saint-Yves]]</ref> ne pouvait recevoir. En [[1597]], à la suite de mauvaises récoltes, une grande famine s'installe dans la campagne rennaise. Les paysans viennent chercher aide et nourriture en ville. Le sergent général de la police, Regnard, publie un arrêté qui interdit l'entrée en ville des pauvres gens pour mendier et chercher l'aumône, car on craint les risques d'épidémies de peste ou autres maladies.  


==Le voeu de 1632==
[[Fichier:Voeu d argent - Basilique de Notre Dame de Bonne Nouvelle.png|right|250px|thumb|voeu à Notre-Dame de Bonne Nouvelle]]
La protection de la Vierge de Bonne-Nouvelle se manifeste notamment à l'occasion de cette épidémie de peste qui dévastait la ville de Rennes et ses environs. Le 12 octobre 1632, un membre notable du clergé suggère l'idée d'un voeu à Notre-Dame de Bonne Nouvelle. La municipalité et toute la ville promirent d'offrir à Marie en « ex voto » une maquette de la ville si Notre-Dame met un terme à l'épidémie. La contagion s'étant effectivement arrêtée le jour même, on confia la réalisation de cette pièce d'orfèvrerie au maître orfèvre parisien La Haye auquel il fallut deux ans pour mener l’œuvre à bien.<ref>''Saint-Aubin et Notre-Dame de Bonne-Nouvelle'', conférence d' Arthur de la Borderie. Plihon et hervé éd. - 1896</ref>  La pièce représentait "''la ville de Rennes, avec ses murs, tours, porteaux, églises et édifices notables; une image de Nostre-Dame, s'élevoit par-dessus, estendant la main sur le convent de Bonne-Nouvelle, son petit Jésus donnant la bénédiction à la ville, le tout du poids de cent dix neuf marcs,'' ( = 29,1 kg) ''provenus d'une cueillette générale qu'on fit par la ville à cette intention''" <ref> ''Vie des SS. de Bretagne'', par le R.P. Albert Legrand, - 1680</ref>  Le voeu fut porté le 8 septembre 1634, en grande procession, de l'[[hôtel de ville]] à la cathédrale puis à l'[[église Notre-Dame de Bonne-Nouvelle]]. Mgr de Cornulier, Évêque de Rennes, annonça en 1634 que la fête du voeu serait célébrée le 8 septembre, jour de la fête de la Nativité de Notre Dame, et ainsi chaque année. Cette maquette a été fondue vers 1794.


''La chapelle de la Sainte Vierge qui joint l'église est renommée dans la province par le grand concours de peuple qui s'y fait les jours de sfeste, l'autel fust beny par Pierre de Cornullier évesque de Rennes.L'image de la Sainte Vierge qui porte le nom de miraculeuse y fust placée en [[1623]]. Les représentations en cire et les voeux y sont en très grand nombre, mais le principal est celuy qui fust fait par la ville en [[1632]] pour remercier dieu de l'avoir délivrée de la peste qui la desoloit depuis huit ans, c'est une ville représentée en argent avec tant d'art que l'on y distingue les édifices publics et les maisons considérables. La protection singulière que la mère de dieu a accordé dans toutes les occasions aux habitans de la ville de Rennes et particulièrement en 1632 engagea cette ville à luy faire ce voeu qu'elle exécuta en [[1634]]. La ceremonie qui s'en fist le jour de la nativité fust très ecclatante, l'évesque tout le clergé, et le parlement en robe rouge s'y estant trouvés.'' <ref> Manuscrit anonyme conservé aux Archives d'llle-et-Vilaine cote : 1 F 292/</ref> <ref> [[La_paroisse_Saint-Germain_de_Rennes_en_1725]]</ref>
==Le  de 1632==
[[Fichier:Voeu d argent - Basilique de Notre Dame de Bonne Nouvelle.png|right|250px|thumb|Vœu à Notre-Dame- de- Bonne- Nouvelle]]
La protection de la Vierge de Bonne-Nouvelle se manifeste notamment à l'occasion de cette épidémie de peste qui dévastait la ville de Rennes et ses environs. Le 12 octobre 1632, un membre notable du clergé suggère l'idée d'un voeu à Notre-Dame de Bonne Nouvelle. La municipalité et toute la ville promirent d'offrir à Marie en « ex voto » une maquette de la ville si Notre-Dame met un terme à l'épidémie. La contagion s'étant effectivement arrêtée le jour même, on confia la réalisation de cette pièce d'orfèvrerie au maître orfèvre parisien La Haye auquel il fallut deux ans pour mener l’œuvre à bien.<ref>''Saint-Aubin et Notre-Dame de Bonne-Nouvelle'', deux conférences d' Arthur de la Borderie. Plihon et Hervé libraires-éditeurs. - 1896</ref>  La pièce représentait "''la ville de Rennes, avec ses murs, tours, porteaux, églises et édifices notables; une image de Nostre-Dame, s'élevoit par-dessus, estendant la main sur le convent de Bonne-Nouvelle, son petit Jésus donnant la bénédiction à la ville, le tout du poids de cent dix neuf marcs,'' ( = 29,1 kg) ''provenus d'une cueillette générale qu'on fit par la ville à cette intention''" <ref> ''Vie des SS. de Bretagne'', par le R.P. Albert Legrand, - 1680</ref>  Le voeu fut porté le 8 septembre 1634, en grande procession, de l'[[hôtel de ville]] à la cathédrale puis à l'[[église Notre-Dame de Bonne-Nouvelle]]. Mgr {{w|Pierre Cornulier}}, évêque de Rennes, annonça en 1634 que la fête du vœu serait célébrée le 8 septembre, jour de la fête de la Nativité de Notre Dame, et ainsi chaque année. Cette maquette, fondue vers 1794, fut reconstituée en 1861.
[[Fichier:Procession_du_voeu.png|300|left|thumb|La procession de la "rendition" du voeu au début du 20e siècle, descendant de la rue de la Monnaie]]
''La chapelle de la Sainte Vierge qui joint l'église est renommée dans la province par le grand concours de peuple qui s'y fait les jours de sa feste, l'autel fust beny par Pierre de Cornullier évesque de Rennes.L'image de la Sainte Vierge qui porte le nom de miraculeuse y fust placée en [[1623]]. Les représentations en cire et les voeux y sont en très grand nombre, mais le principal est celuy qui fust fait par la ville en [[1632]] pour remercier dieu de l'avoir délivrée de la peste qui la desoloit depuis huit ans, c'est une ville représentée en argent avec tant d'art que l'on y distingue les édifices publics et les maisons considérables. La protection singulière que la mère de dieu a accordé dans toutes les occasions aux habitans de la ville de Rennes et particulièrement en 1632 engagea cette ville à luy faire ce voeu qu'elle exécuta en [[1634]]. La ceremonie qui s'en fist le jour de la nativité fust très ecclatante, l'évesque tout le clergé, et le parlement en robe rouge s'y estant trouvés.'' <ref> Manuscrit anonyme conservé aux Archives d'llle-et-Vilaine cote : 1 F 292.</ref> <ref> [[La_paroisse_Saint-Germain_de_Rennes_en_1725]]</ref> Le 9 septembre, une nouvelle procession se dirigea vers l'hôpital de la santé où l'évêque célébra une messe pour les morts. les clés de l'hôpital et celles des maisons des morts pestiférés furent portées devant l'image de Notre-Dame-de-Bonne-Nouvelle. Pendant les quatre jours de solennités l'affluence d'étrangers à la ville fut si grande que le pain manqua. Histoire de Rennes, p.315, Émile Ducrest de Villeneuve et D. Maillet. Edouard Morault, libraire. Rennes - 1845


De 1555 à 1789, le [[Parlement de Bretagne]] a consacré à la peste 45 de ses 275 remontrances sur l'hygiène dans la province.
De 1555 à 1789, le [[Parlement de Bretagne]] a consacré à la peste 45 de ses 275 remontrances sur l'hygiène dans la province.
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