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'''Les "Grands Jours" remplacés par un parlement'''
'''Les "Grands Jours" remplacés par un parlement'''


Il existait en Bretagne, sous les ducs, une juridiction supérieure à l'instar de la France, un conseil qui portait le nom de « Parlement » ; composé de vingt-deux « conseillers du duc » : il se réunissait à intervalles irréguliers ; ses sessions suivaient celles des Etats. Pour remédier aux inconvénients de ces sessions irrégulières, le duc François II, par édit du 22 septembre 1485, créa les « Grands Jours » qui devaient siéger à Vannes du 15 juillet au 15 septembre de chaque année. Ne fonctionnant en fait que du 1er septembre au 5 octobre, les Grands Jours ne pouvaient expédier qu'un nombre restreint d'affaires ; comme, d'autre part, les juges ne jugeaient pas en dernier ressort et que leurs décisions, en cas d'appel, étaient portées devant le parlement de Paris, les procès s'éternisaient, d'où des frais ruineux et d'interminables délais. Le premier vrai affrontement entre Rennes et Nantes, à partir des années 1530, a pour objectif d’obtenir l’intégralité des séances du conseil et chancellerie de Bretagne, cour provinciale dont le personnel n’avait pas vraiment changé depuis [[Anne de Bretagne]]. En fait, la chancellerie et le conseil de Bretagne avaient été enjeux de concurrence entre les deux villes bretonnes quarante ans avant la lutte pour l’obtention des séances du parlement. Charles VIII avait décidé, en 1493, d’établir la toute
Il existait en Bretagne, sous les ducs, une juridiction supérieure à l'instar de la France, un conseil qui portait le nom de « Parlement » ; composé de vingt-deux « conseillers du duc » : il se réunissait à intervalles irréguliers ; ses sessions suivaient celles des Etats. Pour remédier aux inconvénients de ces sessions irrégulières, le duc François II, par édit du 22 septembre 1485, créa les « Grands Jours » qui devaient siéger à Vannes du 15 juillet au 15 septembre de chaque année. Ne fonctionnant en fait que du 1er septembre au 5 octobre, les Grands Jours ne pouvaient expédier qu'un nombre restreint d'affaires ; comme, d'autre part, les juges ne jugeaient pas en dernier ressort et que leurs décisions, en cas d'appel, étaient portées devant le parlement de Paris, les procès s'éternisaient, d'où des frais ruineux et d'interminables délais. Le premier vrai affrontement entre Rennes et Nantes, à partir des années 1530, a pour objectif d’obtenir l’intégralité des séances du conseil et chancellerie de Bretagne, cour provinciale dont le personnel n’avait pas vraiment changé depuis [[Anne de Bretagne]]. <ref>  ''Rennes, naissance d'une capitale provinciale''.(1491-1610) , vol. 1, p. 13 Mathieu  Pichard-Rivalan. Thèse de doctorat. Université Rennes II - 2014 </ref>
(1491-1610) En fait, la chancellerie et le conseil de Bretagne avaient été enjeux de concurrence entre les deux villes bretonnes quarante ans avant la lutte pour l’obtention des séances du parlement. Charles VIII avait décidé, en 1493, d’établir la toute
première alternance officielle entre Rennes et Nantes sur la base de deux périodes de six mois (octobre-mars à Nantes, avril-septembre à Rennes), modèle qui servira d’ailleurs ensuite à l’édit
première alternance officielle entre Rennes et Nantes sur la base de deux périodes de six mois (octobre-mars à Nantes, avril-septembre à Rennes), modèle qui servira d’ailleurs ensuite à l’édit
d’érection du parlement. En août 1531 le roi ordonna que le conseil se tiendrait annuellement, un semestre à Nantes, l'autre à Rennes mais les Nantais se plaignirent, en mars 1533, que le conseil ne s'était pas tenu à Nantes depuis cinq ans. Par lettres du 14 juin 1534 le roi fit injonction de se rendre à Nantes où la séance eut lieu en septembre de l'année suivante, la ville de Nantes offrant à cette occasion au premier président deux pipes de vin d'Anjou (NDLR  480 litres x 2), et deux poinçons de vin d'Orléans (NDLR 228 litres x2) que reçut aussi le second président<ref> Histoire de la Ville de Nantes. t. 2, p. 290, par l'abbé Travers Imprimerie de Forest. Nantes - 1837 </ref>.
d’érection du parlement. En août 1531 le roi ordonna que le conseil se tiendrait annuellement, un semestre à Nantes, l'autre à Rennes mais les Nantais se plaignirent, en mars 1533, que le conseil ne s'était pas tenu à Nantes depuis cinq ans. Par lettres du 14 juin 1534 le roi fit injonction de se rendre à Nantes où la séance eut lieu en septembre de l'année suivante, la ville de Nantes offrant à cette occasion au premier président deux pipes de vin d'Anjou (NDLR  480 litres x 2), et deux poinçons de vin d'Orléans (NDLR 228 litres x2) que reçut aussi le second président<ref> Histoire de la Ville de Nantes. t. 2, p. 290, par l'abbé Travers Imprimerie de Forest. Nantes - 1837 </ref>.
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le 19 mars 1555, le conseil privé refuse de choisir entre Rennes et Nantes, soutenue par les villes bretonnes démarchées.
le 19 mars 1555, le conseil privé refuse de choisir entre Rennes et Nantes, soutenue par les villes bretonnes démarchées.


Julien Champion annonce en assemblée du corps de ville « que les Rennais n’ont deniers communs ne aultres prests en ladite communauté dont ils puissent payer en si brief temps la somme que le roy demande », celle de 5 000 livres pour le parlement de Bretagne et on décide un emprunt auprès des habitants à intérêts de 10%  péniblement financé pour moitié par les marchands, pour l'autre par des nobles et des bourgeois. <ref> ''Rennes naissance d'une capitale provinciale (1491-1610)'', Mathieu Picherd-Rivalan, thèse de doctorat, vol. 1  UEB -2014 </ref>
Julien Champion annonce en assemblée du corps de ville « que les Rennais n’ont deniers communs ne aultres prests en ladite communauté dont ils puissent payer en si brief temps la somme que le roy demande », celle de 5 000 livres pour le parlement de Bretagne et on décide un emprunt auprès des habitants à intérêts de 10%  péniblement financé pour moitié par les marchands, pour l'autre par des nobles et des bourgeois. <ref> ''Rennes naissance d'une capitale provinciale (1491-1610)'', Mathieu Picherd-Rivalan, thèse de doctorat, vol. 1  Université Rennes II -2014 </ref>


'''Le  parlement gagné par Nantes'''
'''Le  parlement gagné par Nantes'''
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Le duc d’Étampes accepte de soutenir une nouvelle requête du corps de ville de Rennes auprès du conseil privé du jeune roi François II à Blois. Le 4 décembre 1559, dans une lettre au gouverneur, le conseil appelle à revoir la localisation de la cité parlementaire et confie à Étampes la responsabilité d’enquêter et de trancher une nouvelle fois entre Rennes et Nantes. Le 26 juin, les Nantais décident d’envoyer Jean Layller, avocat à la cour de parlement, pour aller plaider une nouvelle fois la cause de la ville auprès du conseil du roi. Le 27 septembre, à Vannes, le héraut des États convoque tous les présents, nobles, prélats et représentants des villes, à venir comparaître devant le gouverneur pour choisir entre Rennes et Nantes. Les suffrages furent majoritairement pour Rennes (18 pour Rennes et 9 pour Nantes), considérée comme plus commode comme étant au centre de la province, Nantes étant en extrémité.  
Le duc d’Étampes accepte de soutenir une nouvelle requête du corps de ville de Rennes auprès du conseil privé du jeune roi François II à Blois. Le 4 décembre 1559, dans une lettre au gouverneur, le conseil appelle à revoir la localisation de la cité parlementaire et confie à Étampes la responsabilité d’enquêter et de trancher une nouvelle fois entre Rennes et Nantes. Le 26 juin, les Nantais décident d’envoyer Jean Layller, avocat à la cour de parlement, pour aller plaider une nouvelle fois la cause de la ville auprès du conseil du roi. Le 27 septembre, à Vannes, le héraut des États convoque tous les présents, nobles, prélats et représentants des villes, à venir comparaître devant le gouverneur pour choisir entre Rennes et Nantes. Les suffrages furent majoritairement pour Rennes (18 pour Rennes et 9 pour Nantes), considérée comme plus commode comme étant au centre de la province, Nantes étant en extrémité.  
La ville de Nantes perdit bientôt l'avantage qu'elle avait obtenu. Un édit du jeune roi Charles IX, âgé de 10ans, derrière lequel est sa mère, {{w|Catherine de Médicis}}, en date du 4 mars 1560  porta "translation du Parlement de Bretagne dans la ville de Rennes pour y être sédentaire" mais Rennes eût à rembourser à Nantes ce qu'elle avait payé au roi pour obtenir cette faveur<ref> www.infobretagne.com/parlement-bretagne.htm </ref>. Il en résulta un procès entre les deux villes et le conseil chargea les Etats de délibérer à laquelle des deux villes il convenait plus d'avoir le parlement. Par arrêtés des 2 et 17 mars 1580 le conseil fixa le parlement à Rennes. Nantes tenta vainement de le récupérer, plusieurs fois et à grands frais<ref> Histoire de la Ville de Nantes. t. 2, pp. 290, 291,  par l'abbé Travers Imprimerie de Forest. Nantes - 1837 </ref>.
La ville de Nantes perdit bientôt l'avantage qu'elle avait obtenu. Des lettres royales appelèrent les bourgeois de Rennes à déclarer les raisons de leur opposition au maintien du parlement à Nantes. C'était tendre une perche aux Rennais. Un édit du jeune roi Charles IX, âgé de 10 ans, derrière lequel est sa mère, {{w|Catherine de Médicis}}, en date du 4 mars 1560  porta "translation du Parlement de Bretagne dans la ville de Rennes pour y être sédentaire" mais Rennes dut attendre plusieurs mois (en août le parlement était toujours à Nantes)  et eût à rembourser à Nantes ce qu'elle avait payé au roi pour obtenir cette faveur<ref> www.infobretagne.com/parlement-bretagne.htm </ref>. Il en résulta un procès entre les deux villes et le conseil chargea les Etats de délibérer à laquelle des deux villes il convenait plus d'avoir le parlement. Par arrêtés des 2 et 17 mars 1580 le conseil fixa le parlement à Rennes. Nantes tenta vainement de le récupérer, plusieurs fois et à grands frais<ref> Histoire de la Ville de Nantes. t. 2, pp. 290, 291,  par l'abbé Travers Imprimerie de Forest. Nantes - 1837 </ref>.
 
En 1583, la crainte des troubles de la Ligue avait amené le Parlement à ouvrir sa séance à Dinan, mais, sur réclamation de Rennes, craignant ce précédent, des lettres patentes enjoignirent à la Cour de "désemparer de Dinan et d'aller tenir le Parlement à Rennes, défendant aux présidents et conseillers et autres officiers de le tenir ci-après en autre lieu qu'en ladicte ville de Rennes, où il est établi du consentement et par l'advis des états du pays de Bretagne."  Le Parlement avait enregistré les lettres du roi, proscrit la ligue et défendu, sous peine de mort, de prendre les armes sans l'ordre du sieur de Monbarrot. Aussi, Nantes étant livré à la ligue, le 12 avril 1587, un édit ordonna la translation de la chambre des comptes de Nantes à Rennes où elle vint siéger au couvent des Carmes agrandi à cet effet. En outre, le bureau des finances et la cour des monnaies reçurent aussi l'ordre de quitter Nantes sous quinze jours, à peine de nullité de leurs actes. <ref> ''Histoire de Rennes,'' p.258, pp.264, 265. Émile Ducrest de Villeneuve et D. Maillet. Edouard Morault, libraire. Rennes - 1845 </ref>


'''1590 : un parlement  doublon ligueur à Nantes'''
'''1590 : un parlement  doublon ligueur à Nantes'''
En 1590, le duc de Mercœur, gouverneur de la province, pour asseoir sa puissance politique au nom d'un nouveau roi de France, Charles X, proclamé par la Ligue, voulut, après la mort d'Henri III, faire de Nantes, où la Ligue était maîtresse, le siège du parlement et y appela les membres de la Cour et dix-huit seulement s'y rendirent et s'y réunirent le 8 janvier 1590.  Le parlement rennais travailla , d'accord avec les commandants militaires, à combattre les ennemis du roi, affirmant sa fidélité par ses arrêts du 27 février 1590 qui condamnèrent les parlementaires ligueurs à être pendus ; leurs corps devaient être traînés sur la claie et leurs biens confisqués, condamnation qui resta fictive. Le parlement royaliste, qui continua à se réunir régulièrement, se maintint à Rennes, fidèle à  Henri III puis à Henri IV. Le 27 décembre 1590, les états se réunirent dans la grande salle des Jacobins avec seulement cinq membres du  clergé dont aucun évêque, tous étant ligueurs, 40 nobles et les députés des sept bonnes villes restées fidèles au roi et les demandes de subsides demandées par le roi furent presque toutes accordées. Un service fut célébré aux Cordeliers au nom du parlement pour Henri III et l'on exécuta en effigie les membres de la cour souveraine illégale de Nantes.


En 1590, le duc de Mercœur, gouverneur de la province, pour asseoir sa puissance politique,  voulut, après la mort d'Henri III, faire de Nantes, où la Ligue était maîtresse, le siège du parlement et y appela les membres de la Cour et dix-huit seulement s'y rendirent.et s'y réunirent le 8 janvier 1590. Le parlement royaliste, qui continua à se recruter régulièrement, se maintint à Rennes, fidèle à Henri IV et travailla , d'accord avec les commandants militaires, à combattre les ennemis du roi, affirma ntsa fidélité par ses arrêts et notamment par celui du 27 février 1590 qui condamna les parlementaires ligueurs à être pendus ; leurs corps devaient être traînés sur la claie et leurs biens confisqués, condamnation qui resta fictive. La soumission de la province entraîna la disparition de la Cour rebelle et l'amnistie du 20 mars 1598 ramena au parlement de Rennes presque tous ceux qui l'avaient quitté pour servir la Ligue.
La soumission de la province entraîna la disparition de la Cour rebelle et l'amnistie du 20 mars 1598 ramena au parlement de Rennes presque tous ceux qui l'avaient quitté pour servir la Ligue.
Mais le parlement n'avait à Rennes, depuis son érection, qu'une installation provisoire, incommode et insuffisante, dans les locaux du couvent des Cordeliers. Dès 1564, il fut question de construire pour l'y établir, un palais qu'il devait attendre quatre-vingt-onze ans ; la communauté de ville obtint en 1578 des lettres qui l'autorisaient à lever des subsides pour bâtir « un palais et maison royalle » ; ce fut seulement sous Henri IV (lettres du 3 juillet 1609) que  fut définitivement décidée la construction du palais du [[Parlement de Bretagne]] qui ne sera achevée qu'en 1655.


Le parlement n'avait à Rennes, depuis son érection, qu'une installation provisoire, incommode et insuffisante, dans les locaux du couvent des Cordeliers. Dès 1564, il fut question de construire pour l'y établir, un palais qu'il devait attendre quatre-vingt-onze ans ; la communauté de ville obtint en 1578 des lettres qui l'autorisaient à lever des subsides pour bâtir « un palais et maison royalle » ; ce fut seulement sous Henri IV (lettres du 3 juillet 1609) que  fut définitivement décidée la construction du palais du [[Parlement de Bretagne]] qui ne sera achevée qu'en 1655.
''' L'exil à Vannes'''


''' L'exil à Vannes'''
De 1675 à 1690 le parlement eut sa résidence à Vannes. A la suite de la [[ Révolte du papier timbré]]  à Rennes, en avril, juin et juillet 1675, le roi, par déclaration du 18 septembre suivant, avait transféré à Vannes le siège de la Cour.Ce furent seulement les lettres patentes d'octobre 1689 qui rendirent à Rennes le parlement.
 
'''La fin'''  
 
Les premiers événements de la Révolution bouleversèrent les institutions établies et il en fut ainsi des parlements. Le 3 février 1790, un décret remplaça le parlement par une cour supérieure qui fut installée au palais le 18 février sous la présidence de Talhouêt de Bois-Orhand, ancien président au parlement, mais l'institution fera long feu. Au parlement succédera un tribunal d'appel pour rendre [[En 1800, la Justice à Rennes]].


De 1675 à 1690 le parlement eut sa résidence à Vannes. A la suite de la [[ Révolte du papier timbré]]  à Rennes, en avril, juin et juillet 1675, le roi, par déclaration du 18 septembre suivant, avait transféré à Vannes le siège de la Cour.Ce furent seulement les lettres patentes d'octobre 1689 qui rendirent à Rennes le parlement.




'''références'''
'''références'''
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