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[[Fichier:Autochenille_de_la_4e_DB.png|left|300px|thumb|Autochenille de la 4e DB, à Avranches le 31 juillet 1944]]
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====Des conseils qui font long feu...====
====Des conseils qui font long feu...====
Jean Chasle, 23 ans, qui habite la ferme de ''la Chesnaie'' où cantonnent les Allemands, est au lieu-dit ''Roulefort'', à 1,5 km au nord de celle-ci au bord de la route en direction de [[Betton]], occupé à nettoyer un talus à la faucille, quand il voit arriver une drôle de voiture avec des soldats - c'est une jeep - et, derrière, des chars marqués d’une étoile blanche et de panneaux orange. Ce sont les Américains que l’on croyait à Avranches. L’un d’eux lui dit être Pierre Bourdan - et il connaît cette voix française de l'émission ''Les Français parlent aux Français'' - qui lui demande où est la batterie allemande. Chasle explique qu’elle est près de chez lui, au nord de la ferme ''Les Fontenelles'', dans des cuves bétonnées et cachée aux vues par des haies, aussi tente-t-il, deux fois, la première à Roulefort, la seconde au passage à niveau, de les dissuader ("Ils vous tireraient comme des lapins") et il leur conseille d’entrer dans Rennes ("comme dans du beurre") par la route qui, au passage à niveau, mène à gauche à la route Fougères-Rennes. Pierre Bourdan traduit mais l’officier américain, le colonel Bruce C. Clarke, commandant le groupe de combat A (CCA), dit que les chars ne sont pas faits pour les combats de rue et exige qu’il les conduise à la batterie. Chasle enfourche son vélo et pédale, suivi de la jeep et des chars, l'un deux ayant cassé les barrières du passage à niveau fermées alors que les trains ne circulent plus, et il les mène jusqu’à la cour de la Chesnaye, les chars restant en arrière en file sur la route. Chasle va rejoindre son père qui quitte les lieux avec la famille<ref>Entretien d'Étienne Maignen avec Me Jean Chasle, le 21 mars 2013</ref>. L’officier américain de la jeep a un entretien avec le capitaine commandant la batterie de DCA<ref>Pierre Bourdan occulta maladroitement sa présence le 1er août à Maison-Blanche en relatant un séjour à Granville ce 1er août et son arrivée à Maison-Blanche seulement le 2. Voir ''Carnets de retour en France avec la 2e D.B'', p. 43 et suivantes - Pierre Bourdan - 1er trim. 1945 et ''1er-4 août 1944: L'étrange libération de Rennes'', p 128 à 153. Etienne Maignen. Ed. Yellow Concept - 4e trim. 2017</ref>.
Jean Chasle, 23 ans, qui habite la ferme de ''la Chesnaie'' où cantonnent les Allemands, est au lieu-dit ''Roulefort'', à 1,5 km au nord de celle-ci au bord de la route en direction de [[Betton]], occupé à nettoyer un talus à la faucille, quand il voit arriver une drôle de voiture avec des soldats - c'est une jeep - et, derrière, des chars marqués d’une étoile blanche et de panneaux orange. Ce sont les Américains que l’on croyait à Avranches. L’un d’eux lui dit être Pierre Bourdan - et il connaît cette voix française de l'émission ''Les Français parlent aux Français'' - qui lui demande où est la batterie allemande. Chasle explique qu’elle est près de chez lui, au nord de la ferme ''Les Fontenelles'', dans des cuves bétonnées et cachée aux vues par des haies, aussi tente-t-il, deux fois, la première à Roulefort, la seconde au passage à niveau, de les dissuader ("Ils vous tireraient comme des lapins") et il leur conseille d’entrer dans Rennes ("comme dans du beurre") par la route qui, au passage à niveau, mène à gauche à la route Fougères-Rennes. Pierre Bourdan traduit mais l’officier américain, le colonel Bruce C. Clarke, commandant le groupe de combat A (CCA), dit que les chars ne sont pas faits pour les combats de rue et exige que le jeune Français  les conduise à la batterie. Chasle enfourche son vélo et pédale, suivi de la jeep et des chars, l'un deux ayant cassé les barrières du passage à niveau fermées alors que les trains ne circulent plus, et il les mène jusqu’à la cour de la Chesnaye, les chars restant en arrière en file sur la route. Chasle va rejoindre son père qui quitte les lieux avec la famille<ref>Entretien d'Étienne Maignen avec Me Jean Chasle, le 21 mars 2013</ref>. L’officier américain de la jeep a un entretien avec le capitaine commandant la batterie de DCA<ref>Pierre Bourdan occulta maladroitement sa présence le 1er août à Maison-Blanche en relatant un séjour à Granville ce 1er août et son arrivée à Maison-Blanche seulement le 2. Voir ''Carnets de retour en France avec la 2e D.B'', p. 43 et suivantes - Pierre Bourdan - 1er trim. 1945 et ''1er-4 août 1944: L'étrange libération de Rennes'', p 128 à 153. Etienne Maignen. Ed. Yellow Concept - 4e trim. 2017</ref>.


==== Les Allemands font mouche : de lourdes pertes====
==== Les Allemands font mouche : de lourdes pertes====
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Le ''New York Times'' du 4 août annonce en page 1 la prise de Rennes et invente la reddition d'un millier d'Allemands se rendant sans armes en rangs par quatre, drapeaux blancs au bout de bâtons, officiers en tête et présente une relation fantaisiste du combat de Maison Blanche qui se serait terminé par la destruction de la batterie allemande ! Il relate, en page 4, une communication téléphonée de Saint-Aubin d'Aubigné par son correspondant Gene Currivan, du 2 août mais retardée, titrant :" '''Une colline près de Rennes s'avère un os'''", ajoutant : "''canons de 88 mm allemands, mortiers, tireurs d'élite, mitrailleuses tentent en vain d'encercler une colonne US". ''Il relate que'' "le fer de lance d'une unité blindée a foncé dans ce qu'un officier haut gradé a appelé un "nid de frelons". Comme ils approchaient de Saint-Laurent, "colline donnant sur la belle ville épiscopale de Rennes", ils furent accueillis par des tirs de canons allemands de 88 mm. Une section de chars fut envoyée pour répondre à cette attaque et, approchant la zone de combat où des canons allemands tiraient à bout portant, d'autres canons de 88 mm tirèrent des deux côtés, cernant les Américains. Jusqu'alors on avait cru n'avoir que deux gros canons en face alors que de tous côtés provenait un feu nourri de mortiers et de mitrailleuses. Le colonel qui avait envoyé la colonne en avant et suivait à pied dût rester dans un fossé pendant plus d'une heure. A chaque tentative de sa part pour partir des rafales de mitrailleuse provenant des haies voisines le forçaient à se remettre à couvert. Décrivant plus tard la bataille, il dit que même Hollywood n'aurait produit rien de tel en matière de feu d'artifice et de frissons. Nos pertes furent relativement légères. La bataille finie, il ne resta aucun des canons de 88 mm, les nids de mitrailleuses étaient balayés, les mortiers mis en pièces, et les tireurs qui avaient gaspillé leurs munitions étaient dirigés vers des camps de prisonniers''. (traduction Étienne Maignen)
Le ''New York Times'' du 4 août annonce en page 1 la prise de Rennes et invente la reddition d'un millier d'Allemands se rendant sans armes en rangs par quatre, drapeaux blancs au bout de bâtons, officiers en tête et présente une relation fantaisiste du combat de Maison Blanche qui se serait terminé par la destruction de la batterie allemande ! Il relate, en page 4, une communication téléphonée de Saint-Aubin d'Aubigné par son correspondant Gene Currivan, du 2 août mais retardée, titrant :" '''Une colline près de Rennes s'avère un os'''", ajoutant : "''canons de 88 mm allemands, mortiers, tireurs d'élite, mitrailleuses tentent en vain d'encercler une colonne US". ''Il relate que'' "le fer de lance d'une unité blindée a foncé dans ce qu'un officier haut gradé a appelé un "nid de frelons". Comme ils approchaient de Saint-Laurent, "colline donnant sur la belle ville épiscopale de Rennes", ils furent accueillis par des tirs de canons allemands de 88 mm. Une section de chars fut envoyée pour répondre à cette attaque et, approchant la zone de combat où des canons allemands tiraient à bout portant, d'autres canons de 88 mm tirèrent des deux côtés, cernant les Américains. Jusqu'alors on avait cru n'avoir que deux gros canons en face alors que de tous côtés provenait un feu nourri de mortiers et de mitrailleuses. Le colonel qui avait envoyé la colonne en avant et suivait à pied dût rester dans un fossé pendant plus d'une heure. A chaque tentative de sa part pour partir des rafales de mitrailleuse provenant des haies voisines le forçaient à se remettre à couvert. Décrivant plus tard la bataille, il dit que même Hollywood n'aurait produit rien de tel en matière de feu d'artifice et de frissons. Nos pertes furent relativement légères. La bataille finie, il ne resta aucun des canons de 88 mm, les nids de mitrailleuses étaient balayés, les mortiers mis en pièces, et les tireurs qui avaient gaspillé leurs munitions étaient dirigés vers des camps de prisonniers''. (traduction Étienne Maignen)
[[Fichier:Captain_Joseph_F._Brady.png|150px|left|thumb|Le capitaine Brady du 35e bataillon de chars, contacté le 2 août par le Dr Colas-Pelletier]].
[[Fichier:Captain_Joseph_F._Brady.png|150px|left|thumb|Le capitaine Brady du 35e bataillon de chars, contacté le 2 août par le Dr Colas-Pelletier pour dissuader de bombarder]].
La ville de Rennes reçoit pendant deux jours par intermittence des obus, probablement pour tenter de convaincre l'ennemi de la quitter<ref>[[notes d'un vieux rennais pendant les jours précédant la libération de Rennes]]</ref>, mais pas de bombardement aérien. La libération de Rennes ne sera effective que le 4 août. Questionné en octobre 1945 par [[Yves Milon]] sur ces tirs d'obus, le général Patton aurait répondu avec son humour : "Avant d'entrer chez quelqu'un, on frappe toujours." '''*''' Toutefois elle n'aura pas subi de bombardement aérien, la Résistance ayant informé, le 2 au matin, les Américains de la situation en ville par l'entremise du Dr Marcel Colas-Pelletier qui, par deux fois réussit à joindre, sur la route de Fougères, le captain Joseph F. Brandy, commandant la compagnie D du 35e bataillon de chars et, le 3 août, le général Wood<ref>[[Grâce au Dr Colas-Pelletier les bombardiers américains ne frappèrent pas Rennes les 2 et 3 août 1944]]</ref>.
La ville de Rennes reçoit pendant deux jours par intermittence des obus, probablement pour tenter de convaincre l'ennemi de la quitter<ref>[[notes d'un vieux rennais pendant les jours précédant la libération de Rennes]]</ref>, <ref>[[ Tribulations d'une jeune Rennaise début août 1944]]</ref>  mais pas de bombardement aérien. La libération de Rennes ne sera effective que le 4 août. Questionné en octobre 1945 par [[Yves Milon]] sur ces tirs d'obus, le général Patton aurait répondu avec son humour : "Avant d'entrer chez quelqu'un, on frappe toujours." '''*''' Toutefois elle n'aura pas subi de bombardement aérien, la Résistance ayant informé, le 2 au matin, les Américains de la situation en ville par l'entremise du Dr Marcel Colas-Pelletier qui, par deux fois réussit à joindre, sur la route de Fougères, le captain Joseph F. Brandy, commandant la compagnie D du 35e bataillon de chars et, le 3 août, le général Wood<ref>[[Grâce au Dr Colas-Pelletier les bombardiers américains ne frappèrent pas Rennes les 2 et 3 août 1944]]</ref>.


==='''Aube du 4 Août [[1944]] : La 4e D.B américaine est à la porte de Rennes, les résistants sont dans la place mais les ponts sautent'''===  
==='''Aube du 4 Août [[1944]] : La 4e D.B américaine est à la porte de Rennes, les résistants sont dans la place mais les ponts sautent'''===  
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[[Fichier:Am%C3%A9ricains_rue_Victor_Hugo.png|Left|300px|thumb|Les GI du 13e régiment d'infanterie avancent [[rue Victor-Hugo]] ]]
[[Fichier:Am%C3%A9ricains_rue_Victor_Hugo.png|Left|300px|thumb|Les GI du 13e régiment d'infanterie avancent [[rue Victor-Hugo]] ]]
[[File:Quai_Lamartine.jpeg|350px|right|thumb|4 août 1944 : les ponts ont sauté et voici les immeubles riverains du quai Lamartine]]
[[File:Quai_Lamartine.jpeg|350px|right|thumb|4 août 1944 : les ponts ont sauté et voici les immeubles riverains du quai Lamartine]]
[[Fichier:Rue_de_Nemours_4_ao%C3%BBt_1944.png|350px|right|thumb|4 août 1944: Rue de Nemours: la voie n'est pas coupée. (''Archives de Rennes 255FI412'')]]
[[Fichier:Rue_de_Nemours_4_ao%C3%BBt_1944.png|350px|left|thumb|4 août 1944: Rue de Nemours: la voie n'est pas coupée. (''Archives de Rennes 255FI412'')]]
[[Fichier:Couverture_endommag%C3%A9e.png|305px|right|thumb|Une couverture endommagée]]
[[Fichier:Couverture_endommag%C3%A9e.png|305px|right|thumb|Une couverture endommagée]]


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[[Fichier:Soldats_et_Rennaises.png|300px|right|thumb|GIs et Rennaises, place de la mairie, le 4 août.(166th SIG. Photo Co.  O.S. Halberg)]]
[[Fichier:Soldats_et_Rennaises.png|300px|right|thumb|GIs et Rennaises, place de la mairie, le 4 août.(166th SIG. Photo Co.  O.S. Halberg)]]
[[Fichier:P%C3%A9n%C3%A9tration_dans_Rennes367.jpg|500px|left|thumb|Pénétration des troupes américaines dans Rennes, point de passage obligé : le secteur République-rue de Nemours. Les points rouges marquent les ponts détruits]]
[[Fichier:P%C3%A9n%C3%A9tration_dans_Rennes367.jpg|500px|left|thumb|Pénétration des troupes américaines dans Rennes, point de passage obligé : le secteur République-rue de Nemours. Les points rouges marquent les ponts détruits]]
[[Fichier:GI_place_de_la_mairie.jpg|300px|right|thumb|Les GI descendent la [[place de la Mairie]], au début de la [[rue d'Orléans]], à droite le café "L'Angélus"]]
[[Fichier:Ffi_place_de_la_mairie.jpeg|300px|left|thumb|Les F.F.I. paradent place de la Mairie, le 4 août<ref> cliché U.S.I.S (service d'information des Etats-Unis)</ref>  L. Riordan]] <ref> ''Rennes pendant la guerre. Chroniques de 1939 à 1945'', par Étienne Maignen. Editions Ouest-France - 2013</ref>
[[Fichier:Ronde_place_de_la_mairie197.jpg|300px|center|thumb|Place de la Mairie, le 4 août après-midi]]


[[Fichier:Ffi_place_de_la_mairie.jpeg|"à0px|left|thumb|Les F.F.I. paradent place de la Mairie, le 4 août<ref> cliché U.S.I.S (service d'information des Etats-Unis)</ref>  L. Riordan]] <ref> ''Rennes pendant la guerre. Chroniques de 1939 à 1945'', par Étienne Maignen. Editions Ouest-France - 2013</ref>
[[Fichier:Ronde_place_de_la_mairie197.jpg|300px|center|thumb|Place de la Mairie, le 4 août après-midi]]


[[Fichier:GI_place_de_la_mairie.jpg|300px|right|thumb|Les GI descendent la [[place de la Mairie]], au début de la [[rue d'Orléans]], à droite le café "L'Angélus"]]
[[Fichier:Prisonniers_dans_Rennes.png|300px|thumb|Des prisonniers allemands au début de la rue d'Orléans (''War Pictorial News'')]]
[[Fichier:Prisonniers_dans_Rennes.png|300px|thumb|Des prisonniers allemands au début de la rue d'Orléans (''War Pictorial News'')]]
[[Fichier:$_57_yanks_capture_rennes.JPG|250px|left|thumb|"Les Américains prennent Rennes. Gain de 75 km en 2 jours"]]
[[Fichier:$_57_yanks_capture_rennes.JPG|250px|left|thumb|"Les Américains prennent Rennes. Gain de 75 km en 2 jours"]]
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[[Fichier:Accueil_des_Am%C3%A9ricains_devant_St-Martin194.jpg|center|300px|thumb|Légende de la radiotelephoto "Conduits par une jeune fille qui crie et rit en agitant le drapeau tricolore, des habitants de Rennes acclament les troupes américaines à leur entrée dans la capitale bretonne" (devant la chapelle du collège Saint-Martin, et, vu l'endroit, scène probablement filmée plusieurs heures après l'arrivée des GI en ville) <ref> {{CC-BY-NC-SA}} </ref>]]
[[Fichier:Accueil_des_Am%C3%A9ricains_devant_St-Martin194.jpg|center|300px|thumb|Légende de la radiotelephoto "Conduits par une jeune fille qui crie et rit en agitant le drapeau tricolore, des habitants de Rennes acclament les troupes américaines à leur entrée dans la capitale bretonne" (devant la chapelle du collège Saint-Martin, et, vu l'endroit, scène probablement filmée plusieurs heures après l'arrivée des GI en ville) <ref> {{CC-BY-NC-SA}} </ref>]]
<ref>https://www.cinematheque-bretagne.bzh/Base-documentaire-Rennes-France-_-mobile-broadcasting-station_-Granville_-France-426-11247-0-170.html? </ref>  
<ref>https://www.cinematheque-bretagne.bzh/Base-documentaire-Rennes-France-_-mobile-broadcasting-station_-Granville_-France-426-11247-0-170.html? </ref>  
Les GI du 13e régiment d'infanterie, détaché de la 8e division, entrent dans Rennes vers 9 heures du matin et "acceptent les baisers et les vins des habitants libérés", rapporte Martin Blumenson. Les Rennais s'amassent peu à peu sur la place de la Mairie. "L'ancienne capitale de la Bretagne était belle, vrai parterre de fleurs multicolores au passage de nos unités de tête par les rues et avenues, fusil barrant la poitrine. Des femmes jeunes et vieilles accouraient pour nous serrer la main et embrasser ces Américains survenus et, au passage de nos jeeps et véhicules, les Français, dont beaucoup essuyaient des larmes de joie, accablaient notre convoi de fruits et de fleurs et démontraient leur quasi unanimité en criant "Vive l'Amérique !". <ref> ''Report of Enemy Action'', 13th Infantry APO US Army, September 4 1944. </ref> Un journaliste américain qui a couvert les combats de Normandie depuis le 6 juin constate que "''l'arrivée des Américains ne s'est pas traduite par bombes et obus rasant des maisons de civils. Il n'y a pas eu de féroces combats de rue et maison par maison. Il y a bien eu quelques dégâts mais que l'on répare rapidement'', estime-t-il. [...]''De longues files de véhicules alliés s'écoulent à travers la ville. Une jeep a des portraits d'Hitler et de Goering ficelés à la roue de secours, leurs visages barrés d'une grande croix noires. Les citadins acclament, rient et chargent les jeeps de fleurs''. Il note deux événements "inoubliables" : le défilé de 24 meneurs (sic) de la Résistance, fusils sur l'épaule. "''C'étaient des hommes vieux, jeunes, aux teints clairs ou bronzés. Ils ne manœuvraient pas très bien et paraissaient un peu débraillés [...] Ils étaient fiers et Rennes aussi''". L'autre fait  <ref>[[Libération : le 4 août une Rennaise écrit :]]</ref> :   : un vieillard grimpé sur une coupole et embouchant une trompette pour jouer la Marseillaise. "''Aux premières notes les gens étaient silencieux, les larmes leur venant, puis ils se mirent à chanter. Le son, d'abord faible, résonna avec écho entre les murs à mesure qu'augmentait le nombre de ceux qui chantaient''" <ref> ''Quand Rennes chante la Marseillaise c'est l'esprit de la France qu'on entend'', par G. K. Hodenfield. ''Stars and Stripes''.(journal de l'armée américaine)</ref> Rémy est aussi témoin de ce fait en indiquant que le "vieil homme à longues moustaches blanches à la gauloise [...] était juché à califourchon sur le toit d'une fenêtre mansardée"<ref>''Les Mains Jointes'', par Rémy, Raoul Solar éditeur, p. 226 - 1948 </ref> Le ''Cairns Post'' indique que "l'atmosphère qui prévaut ici semble être une vive amitié absolument sincère".
Les GI du 13e régiment d'infanterie, détaché de la 8e division, entrent dans Rennes vers 9 heures du matin et "acceptent les baisers et les vins des habitants libérés", rapporte Martin Blumenson. Les Rennais s'amassent peu à peu sur la place de la Mairie. "L'ancienne capitale de la Bretagne était belle, vrai parterre de fleurs multicolores au passage de nos unités de tête par les rues et avenues, fusil barrant la poitrine. Des femmes jeunes et vieilles accouraient pour nous serrer la main et embrasser ces Américains survenus et, au passage de nos jeeps et véhicules, les Français, dont beaucoup essuyaient des larmes de joie, accablaient notre convoi de fruits et de fleurs et démontraient leur quasi unanimité en criant "Vive l'Amérique !". <ref> ''Report of Enemy Action'', 13th Infantry APO US Army, September 4 1944. </ref> Un journaliste américain qui a couvert les combats de Normandie depuis le 6 juin constate que "''l'arrivée des Américains ne s'est pas traduite par bombes et obus rasant des maisons de civils. Il n'y a pas eu de féroces combats de rue et maison par maison. Il y a bien eu quelques dégâts mais que l'on répare rapidement'', estime-t-il. [...]''De longues files de véhicules alliés s'écoulent à travers la ville. Une jeep a des portraits d'Hitler et de Goering ficelés à la roue de secours, leurs visages barrés d'une grande croix noires. Les citadins acclament, rient et chargent les jeeps de fleurs''. Il note deux événements "inoubliables" : le défilé de 24 meneurs (sic) de la Résistance, fusils sur l'épaule. <ref>[[Libération : le 4 août d'un Rennais]]</ref>    "''C'étaient des hommes vieux, jeunes, aux teints clairs ou bronzés. Ils ne manœuvraient pas très bien et paraissaient un peu débraillés [...] Ils étaient fiers et Rennes aussi''". L'autre fait  <ref>[[Libération : le 4 août une Rennaise écrit :]]</ref> : un vieillard grimpé sur une coupole et embouchant une trompette pour jouer la Marseillaise. "''Aux premières notes les gens étaient silencieux, les larmes leur venant, puis ils se mirent à chanter. Le son, d'abord faible, résonna avec écho entre les murs à mesure qu'augmentait le nombre de ceux qui chantaient''" <ref> ''Quand Rennes chante la Marseillaise c'est l'esprit de la France qu'on entend'', par G. K. Hodenfield. ''Stars and Stripes''.(journal de l'armée américaine)</ref> Rémy est aussi témoin de ce fait en indiquant que le "vieil homme à longues moustaches blanches à la gauloise [...] était juché à califourchon sur le toit d'une fenêtre mansardée"<ref>''Les Mains Jointes'', par Rémy, Raoul Solar éditeur, p. 226 - 1948 </ref> Le ''Cairns Post'' indique que "l'atmosphère qui prévaut ici semble être une vive amitié absolument sincère".


Les Rennais s'amassent, dans l'après-midi, devant la mairie pour les acclamer ainsi que les nouveaux dirigeants au grand balcon nord de l'hôtel de ville décoré du drapeau français et de la bannière étoilée : Jean Marin, voix de la France Libre et le colonel de Chevigné, délégué militaire pour le front nord, entrés en ville avant les troupes américaines.
Les Rennais s'amassent, dans l'après-midi, devant la mairie pour les acclamer ainsi que les nouveaux dirigeants au grand balcon nord de l'hôtel de ville décoré du drapeau français et de la bannière étoilée : Jean Marin, voix de la France Libre et le colonel de Chevigné, délégué militaire pour le front nord, entrés en ville avant les troupes américaines.
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Au soir de ce 4 août, par mesure de précaution, un couvre-feu sera imposé. Des troupes de la 8e division d'infanterie (8th Infantry Division) vont prendre le relais et sécuriser Rennes et ses abords.
Au soir de ce 4 août, par mesure de précaution, un couvre-feu sera imposé. Des troupes de la 8e division d'infanterie (8th Infantry Division) vont prendre le relais et sécuriser Rennes et ses abords.
=== Chasse aux "collabos" ===
=== Chasse aux "collabos" ===
Certains pourchassent des Rennais dénoncés comme collaborateurs. On arrache les pancartes en allemand, on brûle le kiosque où, pendant quatre ans, les revues allemandes ont figuré en bonne place. <ref>[[Libération : le 4 août une Rennaise écrit :]]<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<<:ref>
Certains pourchassent des Rennais dénoncés comme collaborateurs. On arrache les pancartes en allemand, on brûle le kiosque où, pendant quatre ans, les revues allemandes ont figuré en bonne place. <ref>[[Libération : le 4 août une Rennaise écrit :]]</ref>
[[Fichier:Kiosque_incendi%C3%A9.jpg|300px|left|thumb|Le feu au kiosque à journaux]]
[[Fichier:Kiosque_incendi%C3%A9.jpg|300px|left|thumb|Le feu au kiosque à journaux]]
[[Fichier:3_collaborateurs_%C3%A0_Rennes196.jpg|350px|right|thumb||Trois collaborateurs dans Rennes entourés par des gendarmes. "Quelques scènes laides survinrent, photographiées ici. Certains des hommes attaqués par la foule furent rudement malmenés et auraient beaucoup plus souffert sans l'intervention de la police;" NB: L'homme à droite tient un mouchoir et semble saigner du nez. D'une page intitulée "Scènes d'émeute à Rennes". ''The Sphere'', London, 19 août 1944]]
[[Fichier:3_collaborateurs_%C3%A0_Rennes196.jpg|350px|right|thumb||Trois collaborateurs dans Rennes entourés par des gendarmes. "Quelques scènes laides survinrent, photographiées ici. Certains des hommes attaqués par la foule furent rudement malmenés et auraient beaucoup plus souffert sans l'intervention de la police;" NB: L'homme à droite tient un mouchoir et semble saigner du nez. D'une page intitulée "Scènes d'émeute à Rennes". ''The Sphere'', London, 19 août 1944]]
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