« Printemps 1940, ça douille à l'arsenal de Rennes » : différence entre les versions

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Elle ajoute : ''La mere Hinet a mis le litre de cidre à 28 sous et sous peu à 1 [franc] 50. Je te dis qu'elle n'est pas longtemps à majorer les prix.''
Elle ajoute : ''La mere Hinet a mis le litre de cidre à 28 sous et sous peu à 1 [franc] 50. Je te dis qu'elle n'est pas longtemps à majorer les prix.''


Il semble qu'elle travaille de nuit en commençant à 15 h 30.
Il semble qu'elle travaille de nuit en commençant à 3 h 30.


Dans la troisième lettre, du jeudi 28 mars, ma grand-mère, bien morose, ne craint pas de faire état de son "cafard" : elle se termine un peu ''gravement'' par : ''Ta petite épouse qui t'aime et t'attend.''. La lettre en réponse sera d'ailleurs bien chaude, pas seulement en raison de la météo devenue souriante. Elle dit aussi sa maison pleine, et qu'elle n'a pu faire ce qu'elle avait prévu, en raison de cet afflux de visites, amicales ou familiales. On y trouve la seconde allusion à des costumes de laine en provenance du secteur de Guer/Plélan : ''Hier, j'ai eu la visite de ma tante et de Rosalie [Tigier, belle-soeur]. Elles m'ont apportés les costumes. J'en ai pris 2 pour moi à ce prix là. Les lainages sont d'un prix fou : un pour Me Monnerais et l'autre pour Me. Bouillez. Mme. Louessard en voudrait aussi ; je vais tacher de lui en faire avoir un.'' - ajoutant : ''Sur le journal, je viens de voir que l'on va avoir 10 [francs] pour l'allocation militaire. On n'aura pas de trop, car la vie est bien chère".
Dans la troisième lettre, du jeudi 28 mars, ma grand-mère, bien morose, ne craint pas de faire état de son "cafard" : elle se termine un peu ''gravement'' par : ''Ta petite épouse qui t'aime et t'attend.''. La lettre en réponse sera d'ailleurs bien chaude, pas seulement en raison de la météo devenue souriante. Elle dit aussi sa maison pleine, et qu'elle n'a pu faire ce qu'elle avait prévu, en raison de cet afflux de visites, amicales ou familiales. On y trouve la seconde allusion à des costumes de laine en provenance du secteur de Guer/Plélan : ''Hier, j'ai eu la visite de ma tante et de Rosalie [Tigier, belle-soeur]. Elles m'ont apportés les costumes. J'en ai pris 2 pour moi à ce prix là. Les lainages sont d'un prix fou : un pour Me Monnerais et l'autre pour Me. Bouillez. Mme. Louessard en voudrait aussi ; je vais tacher de lui en faire avoir un.'' - ajoutant : ''Sur le journal, je viens de voir que l'on va avoir 10 [francs] pour l'allocation militaire. On n'aura pas de trop, car la vie est bien chère".
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La lettre du 3 avril n'est pas plus gaie, avec mention de permissionnaires plus chanceux : ''Tout le monde vient, et pas mon petit soldat cheri'', mettant à contribution son fils dans cette doléance par les mots qu'elle lui prête : ''comme dit Yves, il va peut être venir avec ses trois cheveaux, le pauvre papa. Il serait bien fatigué...''. Son père n'est en fait pour l'heure qu'un modeste palfrenier occupant son temps comme il peut : ''... quand on voit les chefs, on fait mine de frotter...''<ref>D'abord mobilisé dans le 265e régiment d'artillerie lourde divisionnaire, il était passé en octobre 1939 dans le 206e RALD</ref>.
La lettre du 3 avril n'est pas plus gaie, avec mention de permissionnaires plus chanceux : ''Tout le monde vient, et pas mon petit soldat cheri'', mettant à contribution son fils dans cette doléance par les mots qu'elle lui prête : ''comme dit Yves, il va peut être venir avec ses trois cheveaux, le pauvre papa. Il serait bien fatigué...''. Son père n'est en fait pour l'heure qu'un modeste palfrenier occupant son temps comme il peut : ''... quand on voit les chefs, on fait mine de frotter...''<ref>D'abord mobilisé dans le 265e régiment d'artillerie lourde divisionnaire, il était passé en octobre 1939 dans le 206e RALD</ref>.


Il y est rapidement question de l'arsenal : ''Je suis aus pieces de ce matin ; soit disant que l'on va avoir davantage ; les autres vont y etre ces jours ici. On verra bien ce que ça donnera.''
Il y est rapidement question de l'arsenal : ''Je suis aus pieces de ce matin ; soit disant que l'on va avoir davantage ; les autres vont y etre ces jours ici. On verra bien ce que ça donnera.'' Elle ne doit pas s'en plaindre puisque dans sa lettre du 8 avril, mon grand-père lui conseille : ''Si les temps ne sont pas élever, il ne faut pas essayer de gagner de trop, cas il baisse les devies et il faut travailler comme des mercenerres et encore on ne gagne pas cher.''
 
La cinquième lettre, le 4 avril, mêle sentiment et travail à l'arsenal : ''si tu retournes avec tes copains, tu n'es pas pres de venir. Je vis sur l'espoir de te voir une de ces nuits ; quoique je préfererais être de nuit, car je resterais au lit avec toi ; car de jour, c'est moche ; il faut se lever à 4 h 1/2 et laisser son petit au chaud au lieu de rester à le caliner.''. Plus loin, elle dit : ''Je prépare ma gamelle pour demain matin. Ce matin j'ai faillit être en retard ; j'ai couru, si non la porte allait se fermer à mon nez ; il ne faut pas que je recommence.''
 
Dans la sixième lettre, le mardi 9 avril, la permission attendue est toujours la trame de la narration, mais des satisfactions émergent : ''Ce midi, je mange avec Yves, chez Me. Monnerais, une tête de veau avec Joseph et sa soeur. Tout le monde pense à moi : on ne me délaisse pas. Quand on est seule, ça fait bien plaisir. Dimanche, j'avais mon costume de laine ; il fait envie à tout le monde, surtout le prix ... mais c'est toujours Rosalie que ça dérange ; si elle avait encore quelque chose dessus, mais comme elle n'a rien que la peine d'aller les chercher. La mere Hinet en aurait bien pris aussi.'' Anna prend encore la peine de marquer une certaine complicité gourmande en ajoutant dans la marge en travers : ''Je te dirais si la tête de veau était bonne'' - à lui qui avait relaté une petite escapade dans un café de Metz où lui et ses copains ont été bien nourris : ''ça change un peut avec la gamèle''.


== Notes et références ==
== Notes et références ==
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