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Madeleine vient d’avoir 12 ans quand un détachement de l’armée allemande, l’avant garde d’une multitude de leurs représentants qui occuperont la France durant cinq années, fait son entrée un matin dans Vezin-le-Coquet. Nous sommes en Juin 1940, il fait chaud. Les envahisseurs ont soif et pour entamer leur long séjour apprennent la France, tout d’abord, à travers les cafés. Le petit village de Vezin-le-Coquet 650 habitants, est en mesure de répondre à cette exigence car il en compte bon nombre. On peut nommer celui de chez Letord, Bigot, Bouget, Touffet, Gallais et aussi le café Épicerie Saulnier-Pécoil situé au bout du bourg à gauche en direction du Rheu, intersection de la route de L’Hermitage à proximité de la grange de Pierre Fourché.
Madeleine vient d’avoir 12 ans quand un détachement de l’armée allemande, l’avant-garde d’une multitude de leurs représentants qui occuperont la France durant cinq années, fait son entrée un matin dans Vezin-le-Coquet. Nous sommes en Juin 1940, il fait chaud. Les envahisseurs ont soif et pour entamer leur long séjour apprennent la France, tout d’abord, à travers les cafés. Le petit village de Vezin-le-Coquet 650 habitants, est en mesure de répondre à cette exigence car il en compte bon nombre. On peut nommer celui de chez Letord, Bigot, Bouget, Touffet, Gallais et aussi le café Épicerie Saulnier-Pécoil situé au bout du bourg à gauche en direction du Rheu, intersection de la route de L’Hermitage à proximité de la grange de Pierre Fourché.


C’est là que Madeleine, Henriette et Raphaël vivent avec leurs parents. Madeleine se distingue en présentant déjà un caractère volontaire et enjoué, elle est intéressée par tout ce qui l’entoure, elle aime communiquer et tout particulièrement pour ce qui est d’échanges épistolaires.
C’est là que Madeleine, Henriette et Raphaël vivent avec leurs parents. Madeleine se distingue en présentant déjà un caractère volontaire et enjoué, elle est intéressée par tout ce qui l’entoure, elle aime communiquer et tout particulièrement pour ce qui est d’échanges épistolaires.
   
   
Le café Saulnier-Pécoil ne fait pas exception ainsi, à l’exemple des autres débits de boissons, il est visité par quelques soldats Allemands qui entrent pour consommer. Derechef les vainqueurs (du moment) souhaitent faire croire qu’ils sont venus « en amis » ainsi l’un d’eux veut-il absolument serrer la main de Madeleine. Madeleine n’accepte pas cette main ostensiblement tendue vers elle. Elle recule autour de la grande table de la salle du café, refusant ce contact, poursuivie par le supposé nouvel ami de rencontre. Parmi le groupe d’Allemands présents, dans le café, l’un d’eux, s’exprimant en français, lui dit d’une manière ferme. « ''Serrez-lui la main avant qu’il ne se fâche »''. Contrainte et forcée, craignant une vilaine réaction de l’Allemand, Madeleine accepte alors cette main tendue et dit en la saisissant ''« C’est la première patte de cochon que je serre ce matin »''. Chacun rit alors et ceux qui n’ont pas compris aussi, le rire est communicatif. Comme monsieur Jourdain qui sans le savoir  faisait de la prose, Madeleine, elle, faisait déjà de la résistance.
Le café Saulnier-Pécoil ne fait pas exceptionainsi, à l’exemple des autres débits de boissons, il est visité par quelques soldats Allemands qui entrent pour consommer. Derechef les vainqueurs (du moment) souhaitent faire croire qu’ils sont venus « en amis » ainsi l’un d’eux veut-il absolument serrer la main de Madeleine. Madeleine n’accepte pas cette main ostensiblement tendue vers elle. Elle recule autour de la grande table de la salle du café, refusant ce contact, poursuivie par le supposé nouvel ami de rencontre. Parmi le groupe d’Allemands présents, dans le café, l’un d’eux, s’exprimant en français, lui dit d’une manière ferme. « ''Serrez-lui la main avant qu’il ne se fâche »''. Contrainte et forcée, craignant une vilaine réaction de l’Allemand, Madeleine accepte alors cette main tendue et dit en la saisissant ''« C’est la première patte de cochon que je serre ce matin »''. Chacun rit alors et ceux qui n’ont pas compris aussi, le rire est communicatif. Comme monsieur Jourdain qui sans le savoir  faisait de la prose, Madeleine, elle, faisait déjà de la résistance.
   
   
Durant l’occupation le café Saulnier-Pécoil sera perquisitionné deux fois par les Allemands avec en prime une visite musclée de la milice. La grange de Pierre Fourché, celle des petits bals si prisés des Vezinois, jouxte le café Saulnier-Pécoil. C’est un endroit pratique pour cacher des résistants l’espace d’une nuit, à l’insu du propriétaire qui habite en haut du bourg. Pour ce type d’action, il est vital de n’avoir que peu de témoins. Les Allemands reniflent néanmoins autour et dans le café Saulnier-Pécoil, jusqu'à le perquisitionner. Ils sont venus en pleine nuit, obligeant les demoiselles Pécoil à se lever alors qu’elles rechignent à quitter leur lit. Au terme de la visite rien d’inquiétant n’est trouvé, pas même les drapeaux du front populaire, les documents qui s’y attachent et les tracts qui sont bien cachés dans le grenier. Sans doute cherchaient-ils uniquement des hommes.
Durant l’occupation le café Saulnier-Pécoil sera perquisitionné deux fois par les Allemands avec en prime une visite musclée de la milice. La grange de Pierre Fourché, celle des petits bals si prisés des Vezinois, jouxte le café Saulnier-Pécoil. C’est un endroit pratique pour cacher des résistants l’espace d’une nuit, à l’insu du propriétaire qui habite en haut du bourg. Pour ce type d’action, il est vital de n’avoir que peu de témoins. Les Allemands reniflent néanmoins autour et dans le café Saulnier-Pécoil, jusqu'à le perquisitionner. Ils sont venus en pleine nuit, obligeant les demoiselles Pécoil à se lever alors qu’elles rechignent à quitter leur lit. Au terme de la visite rien d’inquiétant n’est trouvé, pas même les drapeaux du front populaire, les documents qui s’y attachent et les tracts qui sont bien cachés dans le grenier. Sans doute cherchaient-ils uniquement des hommes.
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Finis le vert de gris et la tête baissée au passage de l’ennemi. Finis les contrôles arbitraires. Finie la crainte d’être pris dans une rafle. Vive les beaux uniformes biens coupés, d’une belle couleur d’un franc kaki. Finies les croix gammées et les croix noires, vive les magnifiques étoiles blanches cerclées peintes sur de jolis véhicules remplis de grands gaillards qui saluent avec un large sourire. Vive la croix de Lorraine, les trois couleurs arborées et la Marseillaise chantée sans crainte. Finis l’ombre sinistre de la milice et leurs massacres. Finie la peur au ventre qu’ils provoquaient. Finis les tirs de DCA. Finis aussi les bombardements qui ont tant fait de victimes et qui me faisaient si peur. Cet instant, d’une grande intensité émotionnelle, aussi fugace fut-il, marque pour beaucoup la rupture d’un état de cauchemar vers celui d’un renouveau de liberté et de paix.
Finis le vert de gris et la tête baissée au passage de l’ennemi. Finis les contrôles arbitraires. Finie la crainte d’être pris dans une rafle. Vive les beaux uniformes biens coupés, d’une belle couleur d’un franc kaki. Finies les croix gammées et les croix noires, vive les magnifiques étoiles blanches cerclées peintes sur de jolis véhicules remplis de grands gaillards qui saluent avec un large sourire. Vive la croix de Lorraine, les trois couleurs arborées et la Marseillaise chantée sans crainte. Finis l’ombre sinistre de la milice et leurs massacres. Finie la peur au ventre qu’ils provoquaient. Finis les tirs de DCA. Finis aussi les bombardements qui ont tant fait de victimes et qui me faisaient si peur. Cet instant, d’une grande intensité émotionnelle, aussi fugace fut-il, marque pour beaucoup la rupture d’un état de cauchemar vers celui d’un renouveau de liberté et de paix.


C’est la Libération ! Mot magique qui marquera pour longtemps une période heureuse de notre histoire. Ainsi, en ce mois d’août 1944, le café Épicerie Pécoil, reçoit chaleureusement, après quatre années d’attente, une clientèle à qui Madeleine ne fera pas le coup de la patte de cochon. Des consignes émanant du QG US sont données, aux milliers de GIs au repos pour deux semaines dans de nombreux camps créés pour la circonstance autour de Vezin, de ne pas fréquenter les cafés. Pourtant malgré cela, le café épicerie Pécoil, sans probablement faire exception, reçoit régulièrement la visite de quelques militaires. Le Capitaine Tessier qui parle couramment le français fait partie des habitués, il est cantonné au château de la Glestière. Il s’est autoproclamé neveu du propriétaire du château, puisque celui-ci se nomme tout comme lui TESSIER. Viennent tout aussi régulièrement Carl E. JOHNSON, Robert D. RANDOLPH, Russell LEWIS tous de la Chemical Company 60th et 64th, le Pvt Tony CASTELL 458th AAA AW et aussi Steven (Steve).
C’est la Libération ! Mot magique qui marquera pour longtemps une période heureuse de notre histoire. Ainsi, en ce mois d’août 1944, le café épicerie Pécoil, reçoit chaleureusement, après quatre années d’attente, une clientèle à qui Madeleine ne fera pas le coup de la patte de cochon. Des consignes émanant du QG US sont données, aux milliers de GIs au repos pour deux semaines dans de nombreux camps créés pour la circonstance autour de Vezin, de ne pas fréquenter les cafés. Pourtant malgré cela, le café épicerie Pécoil, sans probablement faire exception, reçoit régulièrement la visite de quelques militaires. Le capitaine Tessier qui parle couramment le français fait partie des habitués, il est cantonné au château de la Glestière. Il s’est autoproclamé neveu du propriétaire du château, puisque celui-ci se nomme tout comme lui TESSIER. Viennent tout aussi régulièrement Carl E. JOHNSON, Robert D. RANDOLPH, Russell LEWIS tous de la Chemical Company 60th et 64th, le Pvt Tony CASTELL 458th AAA AW et aussi Steven (Steve).
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Outre le repos dont ils ont grandement besoin après leur dure campagne qu’ils ont menée en Normandie, des spectacles sont organisés pour distraire cet effectif très important de militaires. Madeleine est invitée à celui notamment donné au bas du champ de Lebastard. Je me rappelle y être aussi présent auprès de mon copain de la Canon Company du 13th Rgt Inf. Même si nous ne saisissons peu, sinon rien des conversations qui sont échangées sur le grand podium dressé en contrebas du pré, qui présente presque la forme d’un amphithéâtre, nous apprécions chansons et musique aux rythmes nouveaux. C’est l’occasion aussi pour les GIs de distribuer des friandises aux spectateurs civils présents. Le spectacle est ouvert à tous. Qu’elle est belle cette liberté nouvellement retrouvée en compagnie de sympathiques amis.
Outre le repos dont ils ont grandement besoin après leur dure campagne qu’ils ont menée en Normandie, des spectacles sont organisés pour distraire cet effectif très important de militaires. Madeleine est invitée à celui notamment donné au bas du champ de Lebastard. Je me rappelle y être aussi présent auprès de mon copain de la Canon Company du 13th Inf Reg. Même si nous ne saisissons peu, sinon rien des conversations qui sont échangées sur le grand podium dressé en contrebas du pré, qui présente presque la forme d’un amphithéâtre, nous apprécions chansons et musique aux rythmes nouveaux. C’est l’occasion aussi pour les GI de distribuer des friandises aux spectateurs civils présents. Le spectacle est ouvert à tous. Qu’elle est belle cette liberté nouvellement retrouvée en compagnie de sympathiques amis !


Musique, chansons et théâtre ne suffisent pas complètement au repos du guerrier. La présentation sur les planches de telles distractions n’exerce pas l’effet suffisant pour calmer ou modérer les ardeurs de tous ces jeunes militaires. Il manque l’ingrédient principal, l’indispensable récréation, celle de jeunes femmes. On note alors, qu’à Vezin, entre le café Bigot et la demeure de madame Bouget la couturière, s’est miraculeusement créé un lieu où d’aimables représentantes de la gent féminine, venues de Rennes, s’exercent contre rétribution, à redonner du courage à nos libérateurs pour leurs prochaines campagnes. Comme déjà précisé dans une des chroniques vezinoises, ce lieu n’a rien de légal, il n’est indiqué sur aucun plan, aussi les militaires qui ont connaissance de son existence sans en connaitre le lieu, errent la nuit dans le village en frappant à de nombreuses portes ou volets. Excédé par leurs continuelles visites nocturnes, le beau-père de Madeleine, un soir, leur verse sur la tète depuis l’étage, le contenu d’un pot de chambre déjà bien visité.
Musique, chansons et théâtre ne suffisent pas complètement au repos du guerrier. La présentation sur les planches de telles distractions n’exerce pas l’effet suffisant pour calmer ou modérer les ardeurs de tous ces jeunes militaires. Il manque l’ingrédient principal, l’indispensable récréation, celle de jeunes femmes. On note alors, qu’à Vezin, entre le café Bigot et la demeure de madame Bouget la couturière, s’est miraculeusement créé un lieu où d’aimables représentantes de la gent féminine, venues de Rennes, s’exercent contre rétribution, à redonner du courage à nos libérateurs pour leurs prochaines campagnes. Comme déjà précisé dans une des chroniques vezinoises, ce lieu n’a rien de légal, il n’est indiqué sur aucun plan, aussi les militaires qui ont connaissance de son existence sans en connaitre le lieu, errent la nuit dans le village en frappant à de nombreuses portes ou volets. Excédé par leurs continuelles visites nocturnes, le beau-père de Madeleine, un soir, leur verse sur la tête depuis l’étage, le contenu d’un pot de chambre déjà bien visité.


Madeleine et Henriette refusent de mettre brusquement fin aux sympathiques contacts qu’elles ont établis avec quelques soldats devenus des amis. Leur départ est bien triste pour beaucoup d’entre nous, un grand vide se crée soudain dans notre petit village. Elles font promettre à leurs amis de leur écrire et promettent, elles aussi, de ne pas les laisser sans leur  envoyer de leurs nouvelles. C’est ainsi que s’établit une correspondance entre les deux sœurs Pécoil et leurs camarades de la 60th et 64th Chemical Company. Certes ce ne fut pas une correspondance suivie mais par exemple Carl E.Johnson adressa à Madeleine plusieurs courriers.
Madeleine et Henriette refusent de mettre brusquement fin aux sympathiques contacts qu’elles ont établis avec quelques soldats devenus des amis. Leur départ est bien triste pour beaucoup d’entre nous, un grand vide se crée soudain dans notre petit village. Elles font promettre à leurs amis de leur écrire et promettent, elles aussi, de ne pas les laisser sans leur  envoyer de leurs nouvelles. C’est ainsi que s’établit une correspondance entre les deux sœurs Pécoil et leurs camarades de la 60th et 64th Chemical Company. Certes ce ne fut pas une correspondance suivie mais, par exemple, Carl E.Johnson adressa à Madeleine plusieurs courriers.


- '''Sur celui du 3 Novembre 1944''' : ''Il informe qu’il est en Hollande, qu’il « travaille » beaucoup et surtout la nuit. Dans le froid qu’il rencontre, il rêve à un bon feu de cheminée chez lui, aux USA. Que Robert (Randolph) est au lit après avoir reçu la lettre d’Henriette – Que Steve ne travaille pas aujourd'hui, il est au quartier Général. Il transmet ses salutations à toute la famille et la remercie pour leur chaleureux accueil à Vezin-le-Coquet.
- '''Sur celui du 3 Novembre 1944''' : ''Il informe qu’il est en Hollande, qu’il « travaille » beaucoup et surtout la nuit. Dans le froid qu’il rencontre, il rêve à un bon feu de cheminée chez lui, aux USA. Que Robert (Randolph) est au lit après avoir reçu la lettre d’Henriette – Que Steve ne travaille pas aujourd'hui, il est au quartier Général. Il transmet ses salutations à toute la famille et la remercie pour leur chaleureux accueil à Vezin-le-Coquet.
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