Deux Anglais, premiers alliés à Rennes le 4 août 1944
Les premiers alliés dans Rennes : un capitaine anglais et son chauffeur
Vers 8 heures 30, ce vendredi matin, les Rennais, réveillés brutalement il y a trois heures par la série d'énormes explosions des ponts dynamités, attendent la libération de Rennes. La veille et dans la nuit les Allemands quittaient la ville et, dans l'après-midi, on avait vu les premiers F.F.I du côté de la mairie. Les Rennais attendent, chez eux, l'arrivée des troupes américaines, sérieusement accrochées à Maison-Blanche[1], et qui ont envoyé des obus sur la ville ces derniers jours.
Un étrange véhicule descend le Contour de la Motte et s'arrête devant le porche du bel immeuble faisant le coin avec la rue Victor-Hugo. En descendent deux militaires, aussitôt entourés de quelques civils et de pompiers de la caserne près du palais Saint-Georges qui les acclament et auxquels l'officier distribue quelques paquets de cigarettes et du chocolat. Etranges Américains quand même, puisqu'il s'agit d'Anglais non armés ! L'officier se fraye un passage et entre dans l'immeuble et reviendra chercher son chauffeur qui, ayant un fort mal de tête, sera soigné là-haut avec de l'aspirine et quelques compresses d'eau vinaigrée sur la tête. Les voici qui repartent bientôt.
Le captain Alfred-Charles Goss est déçu : la jeune Rennaise est Édith Gauvain dont il était tombé amoureux en 1939, qu'il n'a plus revue depuis juin 1940, qui est l'objet de ce déplacement hasardeux au cours d'une permission exceptionnelle, n'est pas ici, mais est réfugiée à Tresboeuf. Alors direction Tresboeuf, 35 km au sud de Rennes. Il va bien franchir les quais dévastés, à droite du Palais du Commerce. Rennes et ses environs, il les connaît bien et avait bifurqué sans encombre il y a une heure à Saint-Aubin d'Aubigné, sans attendre comme le lui demandaient les Américains, puis avait gagné Rennes par des voies détournées, entrant en ville par la rue de Fougères.
Direction Tresboeuf donc, mais il se trompe de route et, du côté de Pont-Péan, est fait prisonnier ainsi que son ordonnance qui n'avait pas obtempéré à l'ordre de foncer. Le groupe d'Allemands en retraite et à pied est bien content de récupérer ce véhicule.
Il lui faudra, pour retrouver son Edith, s'évader dans des conditions rocambolesques de la poche de Saint-Nazaire
. Il réapparaîtra Contour de la Motte, et se fera reconnaître, avec une grande barbe noire sous une casquette civile trouée, pieds nus dans des sabots de bois, entre deux colosses à brassards noirs avec la mention " MP " (Military Police).
Alfred Charles Goss informe sur l'existence d'un aviateur survivant d'un avion abattu
À 0 h 13 le 30 août 1944, un bombardier Halifax du 502 Squadron, Halifax II JP164 YG-B, en patrouille anti sous marine était abattu en mer par un sous marin, à 8 km au sud-ouest de Saint-Nazaire. Dès le 31 août le 502 Squadron envoyait un télégramme à Mme Hill l’informant que son mari, John B. Hill était porté disparu. En fait, celui-ci était le seul survivant des 9 hommes d'équipage. Le Warrant Officer John Bernard Hill fut recueilli, fait prisonnier et d’abord hospitalisé à La Baule car il avait les côtes meurtries, les genoux enflés et une luxation de l’épaule. Ensuite, il fut transféré dans le camp de prisonniers de Montoir ( au camp Franco, nom donné en raison de la présence en 1943 de nombreux réfugiés républicains espagnols employés à la construction de la base sousmarine) de Saint-Nazaire, [3] mais y sont détenus aussi des Français, des détenus américains et britanniques. Il y était prisonnier notamment avec le Captain Michael Foot et le Lieutenant Rollin. Le 2 octobre, Madame Rollin informa la femme de John Hill que son mari était prisonnier des Allemands à St Nazaire, information confirmée le 26 octobre, par le père du Captain Foot. L’information avait été donnée au père du Captain Foot par le Captain Alfred Charles Goss (126088 – Royal Engineers) qui était aussi prisonnier au camp de Montoir-de-Bretagne près de St Nazaire mais qui s’était évadé le 11 septembre et avait rejoint les alliés. Alfred Goss n'avait côtoyé John Hill que pendant 24 heures. [4]
Le 1er août 1945, le Captain Alfred Charles Goss sortit en uniforme de l'église Saint-Germain, au bras de sa jolie française, Edith, en longue robe de mariée. Ils vécurent en Angleterre et eurent... sept enfants.
Références
- ↑ Le combat du Ier août 1944 à Maison Blanche
- ↑ "France - Liberté égalité fraternité", journal quotidien paraissant à Londres avec le patronage de l'Association des Français de Grande-Bretagne, n°309 du samedi 23 août 1941, page 4 - https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1072028s/f4.item.r=goss
- ↑ https://archives.saintnazaire.fr/page/le-camp-franco-a-gron
- ↑ https://chemin-memoire39-45paysderetz.e-monsite.com/medias/files/histoire-du-halifax-jp164.pdf
- "Il voulait retrouver sa fiancée à Rennes. L'Anglais devance les Américains" - Le "big" baiser rennais au GI Fred" Ouest-France, édition Rennes du 5 août 1994
- " Un officier anglais devance les Américains" par Michel-Jacques Gauvain - Mémoire de l'Université du Temps Libre du Pays de Rennes vol. 17 -2004

