Défense passive, ou "D.P."

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La DÉFENSE PASSIVE OU DP :

Dès septembre 1938, à la veille des accords de Munich - qui vont sauver la paix, provisoirement- le maire de Rennes prend les devants en matière de défense passive

SEPTEMBRE 1939, LES RENNAIS SE "DÉFENDENT PASSIVEMENT "

Apprendre la défense passive aux écoliers. Le soldat voit des Dornier Do - 215

Dès le lundi 11 juin 1939, un grand exercice de défense passive, avec occultation des éclairages publics et particuliers de la ville, dont les effets furent observés à bord d'avions survolant Rennes, avait concerné les habitants de Rennes et de ses environs et des enseignements en avaient été tirés dans le journal[1]. Le 30 août un essai des sirènes avait été effectué vers 9h00.

La "DP" à Rennes répartie en secteurs (Archives de Rennes 1 Fi 192)

La France a déclaré la guerre à l’Allemagne le 3 septembre 1939, à 17 heures. Le maire de Rennes n’a pas tardé à réagir, et est même étrangement en avance, comme ceux de Vannes ou de Saint-Marc, près de Brest, puisque le journal L'Ouest-Éclair, édition d’Ille-et-Vilaine, en date du même 3 septembre, donc imprimé dans la nuit précédente, publie, en page de Rennes, sous la rubrique « communiqués et renseignements officiels » un avis préalable à l’apposition d’affiches qui sera effective le jour même ou le lendemain. Rares sont les villes qui ont procédé aussi rapidement. Voici le texte de cet avis : DÉFENSE PASSIVE CONTRE LES ATTAQUES AÉRIENNES

MESURES PRESCRITES EN CAS D'ALERTE

Le maire de Rennes a pris l’arrêté suivant :

Article premier. – Dès l’apposition de la présente affiche, les mesures ci-après seront appliquées sur le territoire de la commune de Rennes :

SIGNALISATION DE L’ALERTE

Article 2. – L’ordre d’alerte est transmis à la population au moyen des signaux sonores ci-après : 1° par le tocsin de l’Hôtel de Ville pendant 4 minutes ; 2° Par sirènes : sons alternativement montants et descendants (sons discontinus et modulés pendant 4 minutes).

MESURES PRESCRITES – ÉCLAIRAGE

Article 3. – Dès la réception de l’ordre d’alerte et pendant toute la durée de l’alerte les habitants sont tenus que de conserver que la lumière strictement indispensable ; toutes précautions devront être prises pour qu’aucune lueur ne filtre au dehors. Cette prescription devra être rigoureusement observée par tous, qu’il s’agisse d’habitations particulières ou de magasins, ateliers, établissements quelconques publics ou privés. L’éclairage public sera supprimé.

Article 4. – À l’intérieur de l’agglomération urbaine ou au voisinage de cette agglomération, les véhicules en marche ne pourront se servir que des phares-code. Les véhicules en station ne devront conserver que leurs feux de position.

Article 5. - L’éclairage intérieur des tramways et autobus sera supprimé : seuls seront conservés les feux camouflés, à l’arrière et à l’avant des voitures.

COMMUNICATIONS TÉLÉPHONIQUES

Article 8. – (sic) Les conversations téléphoniques privées – à l’exception des demandes de secours adressées soit au service d’incendie (téléph. 35-35), soit à l’Hôtel de Ville (téléph. 36-47), soit au commissariat central de police (téléph. 23-37) – sont interdites pendant toute la durée de l’alerte.

Dès le 13 septembre fut prévue la création de postes de secours, à la suite d'une grande réunion tenue la veille à l'amphithéâtre de l’École de médecine sur l'organisation de la D.P : palais Saint-Georges où sera le P.C du directeur de la défense passive, dispensaire de la Croix-Rouge rue Saint-Hélier, brasserie Graff, imprimerie Oberthür, dispensaire de la rue Thiers, crèche de la rue Alain Bouchard, les Récollets rue de Redon et ... deux postes de lavage pour les gaz sont même prévus : aux douches du palais Saint-Georges et à celles de la rue des Polieux. Le 27 septembre sont constitués les îlots de la D.P et un appel est fait pour recruter des chefs d'îlot[2].


Ultérieurement des consignes complémentaires seront données (recopiées ici d'un texte dactylographié d'époque) :


L'entrée des véhicules à l'intérieur de l'agglomération sera arrêtée. Les véhicules qui se trouveront dans l'agglomération devront être conduits à l'extérieur s'ils sont à proximité de la périphérie ou mis en stationnement sur la place la plus proche, afin que la chaussée reste entièrement dégagée pour le passage des voitures de secours et d'incendie.

La circulation des tramways vers le centre sera arrêtée et ceux se dirigeant vers la périphérie gagneront leur point terminus.

Les conducteurs devront garer leurs voitures près d'un trottoir, afin de laisser libre le milieu de la chaussée.

La fin de l'alerte sera diffusée par sirènes de la façon suivante : son s'établissant à une hauteur uniforme et prolongé pendant trois minutes.

Le maire de Rennes rappelle instamment à la population qu'il est de son intérêt de se conformer rigoureusement à ces prescriptions et que toute infraction pourra d'ailleurs être sévèrement punie.

PRÉCAUTIONS à prendre contre l'incendie causé par des bombardements aériens.

"On nous communique,

Le Maire rappelle à la population de Rennes les recommandations suivantes :

Débarrassez vos greniers de toutes matières inflammables.

Placez à portée un extincteur d'incendie;

Approvisionnez-vous de sable et d'une pelle.

En cas d'incendie, ne projetez pas d'eau sur le foyer d'incendie; servez-vous exclusivement de l'extincteur. En même temps, projetez sur le foyer d'incendie une ou plusieurs pelles de sable.

Si vous ne pouvez éteindre l'incendie naissant, appelez le service des pompiers (téléphone : 35-35)".


Les heures de camouflage sont précises, à la minute : dans l'Ouest-Éclair du 29 juin 1943
Avis allemand aux rennais 'Collections Musée de Bretagne)

Dès le début de la guerre avait été imprimé un album intitulé " Alerte aux avions !!. ", manuel officiel élémentaire de défense passive rédigé par les services de la défense et de l'éducation nationales, document de 32 pages illustrées en couleurs par Marcel Jeanjean, intégré au programme d'enseignement du 1er degré et qui devait servir à une formation de 12 heures aux classes du certificat d'études primaires.

Pendant toute la « drôle de guerre », soit pendant plus de neuf mois et demi, l’application des consignes se relâchera et fera l’objet de rappels. Ainsi, le 17 mai 1940, le commissaire central de police fait savoir que la période des observations et recommandations est révolue. La récidive d'infraction à la défense passive dans les 8 mois ou le simple refus d'obtempérer en matière d'éclairage peuvent valoir les peines prévues au décret du 2 février 1940 : six jours à un mois de prison et une amende de 16 à 200F.

En juin 1940 et pendant les années 1943 et 1944, sous les bombardements, les équipes de la défense passive, composées de professionnels et de jeunes gens, s'employèrent courageusement pour dégager et secourir les victimes, luttèrent contre les incendies, pratiquèrent des déblaiements et des membres le payèrent de leur vie.[3]

Avis et avertissement aux Rennais en textes français et allemands[4]

Le 5 janvier 1941, le journal rappelle qu' "en cas d'alerte aérienne, les prescriptions suivantes devront être observées ; toute infraction sera passible de punition :

1°. — Observer toujours le calme.

2°. — Vérifier l'obscurcissement et, autant que possible, supprimer l'éclairage.

3°. — S'éloigner des fenêtres à cause du danger des éclats.

4°. — Ouvrir immédiatement les portes des maisons.

5°. — Les passants et les habitants rechercheront de suite les abris, les couloirs et les tranchées de protection. Il est interdit de circuler dans la rue,

L'Ouest-Eclair du 6 mars 1941 : pour Rennes, ville indisciplinée, à côté du programme des cinémas, un rappel à l'ordre bilingue

6°. — Les conducteurs de tous véhicules gagneront l'extrême droite de la chaussée et s'arrêteront, tout en laissant libre l'accès aux maisons. Ils ne laisseront allumés que les feux de stationnement et se rendront eux-mêmes à l'abri le plus proche.

7°. — Les clients des restaurants et les spectateurs des théâtres resteront dans les locaux et se rendront dans les abris qui s'y trouvent.

8°. — Ne quitter les abris qu'au signal de fin d'alerte"[5].

La D.P. distribue un brassard jaune marqué D.P en lettres noires, à tous ses membres, leur permettant de circuler en ville pendant les alertes.

Le 4 février 1941, un arrêté préfectoral, "pour améliorer l'obscurcissement" impose l'emploi de la lumière bleu foncée aux sources de lumière électrique à partir du 25 février et rappelle l'interdiction de tout éclairage extérieur[6]. Le 4 novembre 1941, les consignes allemandes sont renouvelées.

Le 14 mars 1942 a lieu une première distribution de masques à gaz au Palais Saint-Georges et une seconde est faite le 5 avril.

Des alertes, les Rennais en auront, entendant les bombardiers alliés voler haut au-dessus d'eux vers d'autres cieux souvent bretons, mais pour eux elles ne commenceront à se concrétiser, cruellement, que deux ans et un mois plus tard : le 8 mars 1943. [7]

Liens internes

Bombardement du 17 juin 1940

Bombardement du 8 mars 1943

Références

  1. L'Ouest-Eclair, 14 juin 1939
  2. Les Heures douloureuses de Rennes, par V. Ladam; imp. Les Nouvelles
  3. Émile Riaudel, engagé à 15 ans dans la défense passive
  4. Ouest-Eclair du 28 août 1940
  5. L'Ouest-Eclair, 5 janvier 1941
  6. L'Ouest-Eclair, 4 février 1941
  7. Du débarquement à la libération, alertes, bombes, obus sur Rennes


--Stephanus 20 février 2011 à 15:07 (CET)